Intervention de Jean-Louis Carrère

Réunion du 30 novembre 2009 à 15h00
Loi de finances pour 2010 — Action extérieure de l'état

Photo de Jean-Louis CarrèreJean-Louis Carrère :

Le Président Sarkozy a inauguré en grande pompe aux Émirats arabes unis une base militaire française permanente qui implique la rénovation de l’ancien accord de défense. Quel est le contenu du nouvel accord ?

Selon un quotidien – merci la presse ! –, la France « s’engage à utiliser tous les moyens militaires dont elle dispose – tous les moyens, mes chers collègues – pour défendre les Émirats arabes unis s’ils venaient à être agressés ». Ces moyens devront être « définis en commun » par les deux pays.

Présenté comme « extrêmement contraignant », cet accord le serait plus encore que le traité de l’Atlantique Nord, qui fonde l’Alliance atlantique. Ce nouvel accord fait suite à un accord de défense, signé en 1995, qui « maintenait la décision d’intervenir dans une ambiguïté et une incertitude ».

Monsieur le ministre, la France s’est-elle engagée à utiliser des moyens militaires nucléaires pour défendre un pays tiers ?

La nouvelle base militaire, face à l’Iran, répond-elle à une politique bien définie ? Si oui, laquelle ? Récemment, les accords de défense entre la France et le Koweït ont été mis à jour. Ces dernières années, notre pays a sensiblement renforcé ses liens avec les États du Golfe…

Lors d’un discours prononcé devant le parlement sud-africain, en févier 2008, le Président Sarkozy avait annoncé la révision des accords de défense « obsolètes » signés par Paris avec des pays africains. Est-ce que ce mouvement a déjà commencé, monsieur le ministre ?

Avons-nous analysé, contrôlé, débattu de ces accords nouveaux ou renouvelés ? Non ! Je vous l’affirme, mes chers collègues, le Parlement devrait se pencher sur ces accords de défense, et sur leurs conséquences. Toutefois, objectivement, à l’hyper-président il convient un micro ou un mini-parlement !

Monsieur le ministre, l’Union européenne va se doter d’un « service d’action extérieure ». Nous en parlerez-vous ? Quelles sont les propositions de la France en la matière ? Allons-nous vers une diplomatie à deux vitesses, l’une nationale et l’autre européenne ? Allons-nous, en cette période de vaches maigres, « doublonner » les services extérieurs ? Vaste programme pour le nouveau Haut Représentant, qui sera sans doute une Haute Représentante, d'ailleurs !

Le service européen d’action extérieure sera composé de fonctionnaires du Conseil, de la Commission et de diplomates des États membres, et son effectif pourrait dépasser, à plein régime – écoutez bien, mes chers collègues ! – 5 000 personnes, ce qui n’est pas rien !

Devrions-nous attendre que tout soit cuisiné, ficelé, pour être informés, pour émettre notre avis ?

Par ailleurs, je crains que la nouvelle donne, vu le choix du président de l’Union européenne et de la ministre des affaires étrangères, Haute représentante pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, ne soit qu’un leurre – un de plus, me direz-vous – destiné à distraire et les opinions publiques et les parlements nationaux.

L’Europe patine et la dernière présidence française n’a pas fait avancer la lourde machine européenne. Si, peut-être, en matière de communication, où vous excellez tous, bien sûr !

Monsieur le ministre, avec de petits moyens et une politique manquant d’ambition et de souffle et se développant dans une opacité qui semble convenir au domaine réservé, le compte n’y est pas !

Nous ne pouvons, dans ces conditions, approuver ni cette politique étrangère ni le budget qui la contraint, mais qui l’illustre bien !

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