Intervention de Jean-Pierre Masseret

Réunion du 30 novembre 2009 à 21h45
Loi de finances pour 2010 — Défense

Photo de Jean-Pierre MasseretJean-Pierre Masseret, rapporteur spécial :

Comment sont pilotés les programmes d’équipement ? Quelles sont, à grands traits, les commandes passées au titre du budget de 2010 ? Quels seront les matériels livrés en 2010 ? Enfin, je conclurai par quelques observations.

La loi de programmation militaire, je le rappelle, repose sur quatre principes financiers, que j’évoquerai rapidement.

Premièrement, les économies résultant de la réduction du format des armées doivent être maintenues au sein du budget de la défense. Ce premier principe est pour l’instant difficile à identifier, et il est probablement trop tôt pour en connaître les conséquences réelles.

Deuxièmement, le dispositif du maintien en condition opérationnelle doit être optimisé. Il s'agit là d’un problème ô combien difficile à résoudre, les disponibilités des matériels variant d’une armée à l’autre.

Nous savons que, pour la marine, la situation n’est pas mauvaise, sauf que le parc de sous-marins nucléaires d’attaque vieillit ; l’état de notre porte-avions est plus ou moins bon, de même que celui de l’aéronautique navale. Pour l’armée de terre, la principale question est celle de l’ALAT, l’aviation légère de l’armée de terre. Dans l’armée de l’air, c’est la dégradation des disponibilités du Rafale qui est préoccupante.

Troisièmement, il convient de réaliser le volet « export » des programmes d’équipement.

À cet égard, nous avons noué des relations fortes avec les Émirats arabes unis autour de l’avion de patrouille maritime et du système de contrôle Atlas C2. Avec le Brésil, nous discutons des sous-marins Scorpène. Pour vendre le Rafale, nous nourrissons un certain nombre d’espérances au Brésil, aux Émirats arabes unis, en Libye, en Suisse et en Inde.

Quatrièmement, enfin, des recettes exceptionnelles abondent le budget de la défense. Vous ne serez pas surpris, à cet égard, monsieur le ministre, que je fasse écho aux propos de notre collègue François Trucy !

Le Gouvernement, on le sait, prévoyait 1, 6 milliard d'euros de recettes exceptionnelles en 2009, à partir de deux sources bien identifiées, à savoir l’immobilier et les fréquences hertziennes. Or il n’a enregistré que 400 millions d’euros, ce qui fait une importante différence.

Les recettes de 1, 3 milliard d'euros prévues pour 2010 paraissent par conséquent assez aléatoires. Si cette incertitude devait se vérifier, la gestion des crédits de la défense pour 2010 deviendrait relativement délicate.

J’en viens à mon deuxième point, à savoir la répartition des ressources budgétaires pour 2010.

Je le rappelle, près de 6 milliards d’euros sont affectés aux grands programmes hors dissuasion nucléaire, 3, 5 milliards d'euros – la somme est encore importante – à la dissuasion nucléaire, 2, 8 milliards d'euros à l’entretien des matériels, 2, 3 milliards d'euros aux autres opérations d’armement et 1, 6 milliard d'euros aux infrastructures. À ces montants, il faut ajouter les études hors dissuasion, soit 17 milliards d’euros de crédits.

Mon troisième point porte sur l’incidence de la RGPP. En ce qui concerne la déflation des effectifs, le budget pour 2010 fait état environ de la suppression de 7 000 à 8 000 emplois équivalents temps plein, qui concernent aussi bien les engagés militaires que les civils.

À ce stade de mon intervention, je signalerai, mes chers collègues, deux modifications relatives à la nomenclature budgétaire.

Tout d'abord, pour tenir compte du plan de relance, de nouvelles actions ont été créées dans le budget de 2009, qui seront reproduites en 2010. Ensuite, un audit réalisé par le contrôle général des armées a conduit à réduire le nombre d’indicateurs de façon à mieux mesurer la performance globale des programmes.

J’en viens à mon quatrième point, c'est-à-dire au pilotage des programmes d’équipement. La question essentielle est ici celle de la gouvernance. On le sait, le comité ministériel des investissements de défense a été créé, qui vise à vous aider, monsieur le ministre, dans des prises de décisions, tout en veillant à la maîtrise capacitaire, industrielle mais aussi technologique et financière des projets. Les crédits du programme 146, je le rappelle, sont cogérés à la fois par le chef d’état-major des armées, et par le délégué général à l’armement, qui s’appuient eux-mêmes sur deux structures : un comité de pilotage et un comité de direction.

Quelles commandes ont été passées au titre du budget de 2010 ? Comme il me faut me lancer dans un véritable inventaire à la Prévert, je serai bref : il s'agit de l’adaptation du Triomphant aux missiles M 51, de trois satellites d’observation MUSIS, du satellite de communication Athéna, de quatre hélicoptères Cougar rénovés, des missiles air-air Meteor d’interception, des Mistral rénovés, d’un bâtiment de projection et de commandement de 21 000 tonnes, des armements air-sol modulaires ; enfin, les trois dernières frégates multi-missions, les FREMM, sont commandées et la rénovation à mi-vie des Mirages 2000 D est lancée.

Quelles seront les principales livraisons en 2010 ? Il s’agira du Terrible, qui sera doté du missile M 51, de onze Rafale, de sept Tigre, de quatre NH-90 pour la marine, d’un certain nombre de véhicules blindés de combat d’infanterie, des équipements Felin.

Tous ces équipements, mes chers collègues, sont évoqués avec des détails suffisants dans les rapports relatifs à cette mission. Je formulerai seulement quelques remarques complémentaires.

La fonction stratégique « connaissance et anticipation » se trouve renforcée par des moyens d’observation importants, à savoir le premier Transall-C160 Gabriel, des avions AWACS rénovés, l’Hélios IIB, des stations d’exploitation de données géographiques numériques et le système Syracuse III, doté de 88 stations de communication par satellite.

Le système de forces « protection et sauvegarde » bénéficiera d’une enveloppe de près de 700 millions d’euros ; ces forces recevront 110 missiles air-air MICA, c'est-à-dire missiles d’interception de combat et d’autodéfense, et 80 missiles anti-aériens Aster 30.

Le système de forces de dissuasion, je le répète, recevra une enveloppe de plus de 3, 5 milliards d’euros, permettant de poursuivre la modernisation des composantes de la dissuasion nucléaire.

Des crédits sont maintenus pour préserver les équipes et les compétences nécessaires à la construction d’un second porte-avions, mais la date de cette décision reste indéterminée…

Le remplacement du missile terrestre à moyenne portée Milan constitue un sujet de préoccupation. L’avenir du groupe MBDA est en question, et le choix d’un missile « sur étagère » semble avoir été fait. Ces questions, je le suppose, seront évoquées au cours de nos débats.

J’en viens aux drones tactiques. Des achats ont été réalisés au Canada et auprès de Sagem. Les dysfonctionnements concernant le déploiement des DRAC, les drones de renseignement au contact, n’ont pas été résolus, et il me semble, monsieur le ministre, que vous n’êtes pas encore tout à fait convaincu par le système UAV, c'est-à-dire, en anglais, véhicule aérien non piloté.

Quant au dossier de l’A400M, qui a déjà beaucoup occupé le Sénat, il sera sans doute évoqué par notre collègue Charles Gautier. Le premier vol de cet avion doit avoir lieu à Séville d’ici à une dizaine de jours, entre le 7, le 12 ou le 14 décembre, me semble-t-il, donc très bientôt.

En tout cas, nous sommes convaincus de la qualité de cet avion. Pour de multiples raisons, qui sont évoquées dans le rapport de la commission, le constructeur a pris du retard, ce qui lui est certes préjudiciable financièrement. Toutefois, ces délais sont relativement modestes comparés à ceux que nous constatons souvent pour ce type de réalisations.

Malgré, bien sûr, je le répète, les conséquences de cette situation sur le budget du groupe, l’annulation de sa commande par l’Afrique du Sud et le « trou capacitaire » qu’il faudra combler, cet avion, j’en suis convaincu, sera au rendez-vous des objectifs opérationnels et techniques qui lui ont été assignés.

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