Intervention de Nicole Bonnefoy

Réunion du 6 octobre 2010 à 14h30
Réforme des retraites — Article 1er A

Photo de Nicole BonnefoyNicole Bonnefoy :

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, notre dispositif de retraite est l’aboutissement d’un long processus historique et politique qui a conduit à la création d’un système par répartition, base de notre modèle social, s’appuyant sur la solidarité entre les générations.

Aujourd’hui, monsieur le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, face à des mutations socio-économiques, mais aussi à cause de certaines dispositions que vous avez prises, lesquelles ont mécaniquement entrainé une diminution du niveau des pensions, notre système de retraite est remis en question par ce que vous appelez une « réforme » qui, en réalité n’en est pas une.

En effet, dans une réforme digne de ce nom, on fait des choix pour régler des problèmes, en apportant un mieux aux personnes qu’elles concernent. Ici, rien de tel ! Votre projet de loi ne règle rien quant à l’équilibre financier du système des retraites ; sa mise en œuvre ne fera qu’aggraver la vie quotidienne des salariés et des futurs retraités.

Depuis que vous avez présenté votre projet de loi, monsieur le ministre, vous n’avez de cesse de laisser croire que l’allongement de la durée du temps de travail est une « fatalité », qu’il n’est pas possible de faire autrement, parce que l’homme vit plus longtemps.

Mais pourquoi vit-il plus longtemps ?

Parce qu’il a, de ses mains, sur des décennies, amélioré son outil de travail ; parce qu’il a, par son intelligence, son savoir, fait progresser la science. Ce sont autant d’avancées qui sont dues à l’œuvre humaine et qui doivent servir l’homme !

Il s’agit donc non pas d’une fatalité, mais d’un progrès humain, qu’il nous appartient de mesurer et de restituer, de redistribuer à l’homme qui en est à l’origine, et ce de façon juste et durable.

Mais quelle société voulons-nous ? Une société où il faut travailler, travailler encore, travailler toujours plus ? Et pour gagner quoi, au bout du compte ? Le droit de partir à la retraite à 67, 69 ou 70 ans, fatigué, usé, physiquement, moralement, ou les deux, après avoir passé sa vie à travailler ou à rechercher du travail ?

Il y a un temps pour tout, pour étudier, pour travailler, pour se cultiver, pour les loisirs, pour sa famille, et un temps pour soi.

En maintenant l’âge de départ à la retraite à 60 ans, nous permettons à ceux qui veulent partir de le faire, parce qu’il y a une vie après le travail ; dans cette logique, d’une certaine façon, nous redistribuons le travail. Ne l’oublions pas, les deux tiers des actifs âgés de 55 à 65 ans n’ont actuellement pas d’emplois, quand, dans le même temps, le taux de chômage avoisine les 10 % et que les 18-25 ans n’ont jamais été dans une situation aussi précaire.

Monsieur le ministre, je déplore que cette prétendue réforme soit à l’image de la société actuelle, qui renie l’humain au profit d’intérêts économiques ne servant qu’une poignée d’individus quand tant d’autres subissent !

Je déplore la brutalité de vos mesures. Elles ne visent qu’à répondre à la pression conjuguée des marchés financiers et des agences de notation, qui exigent une réduction des budgets publics et sociaux dans tous les pays européens.

Les citoyens attendent de nous autre chose : que nous construisions un système de retraite où s’articulent aspirations individuelles et effort collectif, un système découlant d’un vrai choix de société et non d’un choix financier !

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