De notre point de vue, le présent projet de loi confirme le manque de détermination du Gouvernement sur ce dossier.
Pourtant, dans la continuité du Grenelle de l’environnement et de l’étude du schéma national des infrastructures de transport, il y avait là une formidable opportunité pour assurer la promotion du fluvial, qui est un mode de transport de fret alternatif à la route, à la fois efficace et économe en rejets de CO2.
Faut-il rappeler que, sur 8 500 kilomètres de réseau navigable, seuls 3 200 sont adaptés au fret ?
Ce texte constitue donc une occasion manquée, car, plutôt que de promouvoir effectivement ce moyen de transport au travers d’engagements précis et chiffrés, le Gouvernement, une fois de plus, préfère jouer la carte de l’affichage politique en proclamant : « Nous créons la structure qui servira de support à notre politique. »
Cela se résume, pour l’instant, à un slogan, car des dispositions concernant presque exclusivement le personnel ou le mode de gestion ne sauraient suffire à relever le défi que constitue l’essor de ce secteur.
La « fusion-absorption » de 4 400 agents du ministère et de 400 salariés de VNF au service de la création de cette « super-agence » du fluvial est sans doute un passage obligé, mais sûrement pas une fin en soi.
D’ailleurs, il aura fallu toute l’imagination et l’abnégation de M. le rapporteur, ajoutées au travail de la commission, pour qu’un amendement de cinq pages se substitue à une rédaction issue de vos services, monsieur le ministre, qui était loin d’être satisfaisante et n’aurait sans doute pas survécu à un éventuel examen du Conseil constitutionnel.
Si l’on se réfère à ce qui s’est passé lors de la création de Pôle emploi ou des agences régionales de santé, il apparaît qu’on n’a sans doute pas fait le meilleur choix ! En effet, au moment où je vous parle, aucune visibilité de gestion n’est assurée ni dans un cas ni dans l’autre. Je redoute que la future Agence des voies navigables de France ne soit affectée du même syndrome.
Je le répète, aucun véritable projet d’envergure pour le secteur fluvial n’est exposé dans ce texte. J’ai bien compris que le projet du canal Seine-Nord Europe allait mobiliser une somme considérable, mais ce sera au détriment des autres projets, qui pourront seulement bénéficier d’une somme de 840 millions d’euros sur quatre ans. Ce montant sera insuffisant. J’en veux pour preuve que la seule remise en état du réseau magistral est évaluée à 1, 5 milliard d’euros.
Par ailleurs, d’autres points nous préoccupent, qui ont suscité d’importantes discussions en commission.
La nouvelle agence aura la possibilité d’exploiter l’énergie hydraulique, de créer des filiales et de prendre des participations chez des opérateurs de droit privé dans le cadre de la mise en place d’opérations de valorisation immobilière. À ce titre, je partage les inquiétudes exprimées à l’instant par mon collègue Roland Ries.
En effet, il est à craindre qu’en se lançant dans ce type d’opérations la future agence ne se détourne de ses missions essentielles, qui sont pourtant loin d’être menées à bien actuellement. Je veux parler de l’entretien, de l’extension et de la promotion des voies navigables ainsi que de leurs dépendances. À l’évidence, de telles missions ne peuvent se concevoir qu’en développant un transport fluvial complémentaire des autres modes de transport. Or nous pouvons actuellement constater une incapacité de l’État et de ses services à remplir ces missions de base.
À cet égard, en tant que sénateur de la Haute-Garonne, je me joins aux trois orateurs originaires de la même région que moi qui m’ont précédé à la tribune pour dénoncer l’état catastrophique du canal du Midi.