Monsieur le secrétaire d’État, en premier lieu, cette mesure de relèvement de l’âge d’annulation de la décote risque de rendre encore plus difficile la situation des femmes. En effet, jusqu’à présent, elles ne peuvent, majoritairement, partir dès 60 ans faute d’avoir pu cumuler suffisamment d’annuités.
Or ce texte ne règle rien. Pire, il proroge ce phénomène : de nouveau, ce seront elles qui, majoritairement, devront attendre leurs 67 ans pour bénéficier d’une retraite à taux plein. Si elles choisissent de partir plus tôt, ce sera avec une retraite amputée de la décote.
En outre, étant donné que ce texte ne règle pas le problème des personnes exclues du marché du travail, notamment des seniors, cette mesure n’est pas sans impact sur l’assurance chômage. En effet, chaque année, entre 20 000 et 30 000 personnes resteront plus longtemps au chômage. Cela coûtera près de 265 millions d’euros par an à la seule UNEDIC.
Or, à cette somme, il faut ajouter le surplus dû au relèvement du nombre d’années de cotisation pour bénéficier d’une retraite à taux plein, ainsi que celui résultant de la part élevée que représentent les 55-60 ans parmi les personnes en situation de chômage.
Enfin, en relevant l’âge d’annulation de la décote à 67 ans, vous condamnez de nombreux salariés à ne pas profiter pleinement de leur retraite. Je me contenterai de citer, à l’appui de mon argumentation, deux chiffres qui viennent d’un organisme dont l’impartialité ne peut être contestée, l’INSEE.
Cet institut s’est intéressé au calcul de l’espérance de vie « en bonne santé », c’est-à-dire sans limitation d’activité ou sans incapacité majeure liée à des maladies chroniques, aux séquelles d’affections aiguës ou de traumatismes.
Cette espérance de vie en bonne santé était estimée en 2007 à 63, 1 ans pour les hommes et à 64, 2 ans pour les femmes.
Il est inadmissible de contraindre ainsi les salariés les plus fragiles, ceux dont les parcours professionnels sont souvent difficiles et irréguliers, et dont les revenus dépassent souvent à peine le SMIC, à rogner sur leur temps de vie en bonne santé pour bénéficier d’une retraite à taux plein.
Nous sommes nombreux sur ces travées à avoir rappelé que d’autres leviers auraient dû être mis en œuvre pour ne pas faire reposer la question du financement de notre régime de retraites sur les seuls salariés, a fortiori s’ils sont déjà en situation de fragilité. Mais vous les avez sciemment occultés…