Cher collègue Jack Ralite, je crois que tous ceux qui s'occupent du logement partagent votre analyse et considèrent qu'il est en effet difficilement supportable de constater, dans un pays développé comme le nôtre, des situations aussi indignes quant au logement. Le problème est de savoir comment nous pouvons y remédier.
Bien sûr, il ne sert à rien de revenir sur les responsabilités : nous avons tous, où que nous situions sur l'échiquier politique, y compris donc à gauche, une lourde responsabilité dans la situation que nous connaissons actuellement parce qu'on n'a pas construit suffisamment de logements quand il aurait fallu le faire.
Rendre le droit au logement opposable, ce serait possible, mais à condition de faire comme en Écosse, c'est-à-dire en prévoyant une date pour sa mise en oeuvre effective et se donnant auparavant tous les moyens de garantir son applicabilité à la date ainsi fixée.
En France, compte tenu de l'actuelle pénurie de logements, il serait irréaliste de rendre aujourd'hui le droit au logement opposable. Nous savons bien que, de toute façon, nous ne disposons pas à présent de suffisamment de logements pour satisfaire tous nos concitoyens. C'est d'ailleurs tout le mérite du gouvernement actuel d'avoir présenté ce texte par lequel est pris l'engagement d'un effort historique, inédit jusqu'à maintenant et qui est, en tout cas, de l'avis unanime, extrêmement ambitieux.
En tant que président du groupe « décentralisation » du Conseil national de l'habitat, je me suis entretenu récemment de cette question avec les représentants de l'association Droit au logement : eux-mêmes reconnaissaient qu'il est impossible de rendre directement le droit au logement opposable. Mieux vaut parler de « droit au logement effectif », pour essayer d'avancer le plus rapidement possible vers un nombre de logements permettant de répondre aux besoins de la quasi-totalité de nos concitoyens en la matière.
Jamais n'a été proposée une loi de programmation de construction de logements comme celle qui vous est soumise, et hommage doit être rendu au Gouvernement pour la détermination qu'il manifeste ainsi.
Voilà pourquoi, monsieur Ralite, je souhaiterais que vous acceptiez de retirer cet amendement.
Vous-même savez bien qu'il est impossible de rendre le droit au logement opposable du jour au lendemain. Lorsque auront été construits des logements en nombre suffisants pour héberger tous nos concitoyens - et cette condition préalable doit être remplie le plus rapidement possible -, alors, oui, nous pourrons rendre le droit au logement opposable, ce qui permettra d'ailleurs de stimuler la construction de nouveaux logements pour les générations futures.
Nous sommes tous aussi conscients que vous des difficultés que vous évoquez : nous aussi rencontrons des gens qui ne trouvent pas un toit, nous aussi savons que c'est la base de tout, pour mener une vie normale, stable, avoir un emploi, etc. Simplement, il faut d'abord, tous ensemble, nous donner les moyens d'avancer pour atteindre cet objectif.
Je serais désolé de devoir émettre un avis défavorable sur cet amendement et je préférerais donc que vous le retiriez.