Intervention de Christine Boutin

Réunion du 10 juillet 2008 à 11h00
Installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d'habitation — Article 2, amendement 2

Christine Boutin, ministre :

Vous ne serez pas surpris, monsieur Madec, que le Gouvernement émette un avis défavorable sur vos deux sous-amendements.

S’il est prévu d’imposer l’installation de détecteurs, c’est pour permettre à des personnes occupant un appartement où se déclare un incendie de pouvoir le quitter avant qu’il ne soit trop tard, sans pour autant que les autres occupants évacuent.

L’installation de détecteurs dans les parties communes risquerait d’inciter l’ensemble des occupants à emprunter les escaliers pour évacuer alors même que, lorsque l’alarme se déclencherait, lesdits escaliers seraient déjà envahis par les fumées provenant de l’appartement où l’incendie s’est déclaré.

Il faut rappeler qu’il est beaucoup plus sûr pour les occupants de rester chez eux en attendant l’intervention des services de secours, en fermant les fenêtres et en calfeutrant les portes par des linges humides. Dans les incendies de bâtiments d’habitation, les personnes qui décèdent sont presque toujours celles qui ont essayé de fuir par leurs propres moyens en utilisant les escaliers enfumés.

J’en viens au sous-amendement n° 2. Je pense très sincèrement que, quelle que soit la décision que nous adopterons, il faut en simplifier la mise en œuvre. Si l’installation des détecteurs revient au propriétaire et leur entretien à l’occupant, la multiplication des responsabilités sera source de confusion : l’entretien doit incomber à l’occupant, qui est le premier intéressé à ce que le détecteur fonctionne en cas de sinistre.

En conséquence, monsieur le sénateur, le Gouvernement a émis un avis défavorable.

Enfin, je voudrais, à propos de l’amendement n° 1 de la commission, faire un bref rappel historique.

Lors de l’examen en deuxième lecture de la proposition de loi à l’Assemblée nationale, le Gouvernement a donné un avis favorable à un amendement tendant à faire reposer l’obligation sur l’occupant, et non sur le propriétaire. En effet, le but est que chaque logement soit pourvu d’un équipement contribuant à la sécurité des occupants du logement concerné, la sécurité des habitants des autres logements étant assurée par les règles de construction tendant à circonscrire l’incendie dans le local où il se déclare en l’attente de l’intervention des services de secours.

Je précise que l’article 1733 du code civil désigne le locataire comme étant la personne qui répond au premier chef des incendies, sauf s’il peut démontrer qu’il n’en est pas responsable et que l’incendie est arrivé par cas fortuit ou force majeure, ou par vice de construction, ou que le feu a été communiqué par une maison voisine.

Les arguments développés par la commission, même s’ils s’appuient sur des exemples étrangers, ne me convainquent pas totalement, je l’ai déjà indiqué. Tout d’abord, l’occupation du parc n’est pas la même en France que, par exemple, en Angleterre. Ensuite, le fait que la mise en place de détecteurs repose sur le propriétaire alors que l’entretien repose sur l’occupant ne facilitera pas la prise de conscience par l’occupant de l’importance qu’il y a pour lui d’entretenir le dispositif mis en place par le propriétaire. Je pense même que, si nous voulons vraiment que la grande campagne de communication que nous appelons tous de nos vœux permette la sensibilisation du public sur ce sujet, elle y parviendra mieux si c’est l’occupant qui est chargé de cette mise en place, plutôt que le propriétaire.

Par ailleurs, il faut éviter que la loi n’évoque des détecteurs normalisés : nous devons laisser au décret en Conseil d’État le soin de définir les caractéristiques techniques auxquelles doivent satisfaire ces équipements.

Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 1.

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