Monsieur Larcher, un petit clin d'oeil : à force d'invoquer la position commune, vous allez produire les mêmes effets que pour ce qui est du référendum de mai prochain, dont on ne cesse de vanter les pseudo-avantages. Plus vous parlez de la position commune, plus ceux qui ont travaillé ce texte le regrettent, texte qui, loin s'en faut, n'a pas fait l'unanimité. Vous les tenez pieds et poings liés avec un accord qui a été signé dans un contexte très différent de celui que vous exploitez aujourd'hui. Je vous incite à continuer de la sorte parce que, très franchement, ils se méfient chaque jour davantage de ce qu'ils peuvent écrire ou dire.
Venons-en à l'amendement n° 124, qui ne manquera pas de vous intéresser.
Dès 2002, le Gouvernement s'est empressé de désagréger de nombreuses dispositions du droit du travail particulièrement protectrices pour les salariés.
Tous les domaines ou presque ont été progressivement remodelés en fonction d'une logique libérale bien connue : affaiblissement de la protection contre les licenciements économiques, notamment les licenciements boursiers, inversion de la hiérarchie des normes relatives aux conventions collectives, ou encore remise en cause de la législation sur les 35 heures.
Le Gouvernement essaie par tous les moyens de faire sauter les restrictions à la flexibilité totale des salariés.
La loi Fillon du 17 janvier 2003 a notamment réduit le taux horaire légal de la majoration des heures supplémentaires, le faisant passer de 25 % à 10 %.
Ce que vous proposez aujourd'hui est donc en contradiction totale avec le dispositif mis en place il y a deux ans. En effet, il est proposé d'augmenter une fois encore le contingent annuel d'heures supplémentaires, en faisant croire aux salariés que ceux qui veulent travailler plus pourront ainsi gagner plus, alors que la majoration des heures supplémentaires est moindre.
Les salariés ne sont pas dupes. Si l'on cumule vos dispositions qui prévoient la baisse de la majoration des heures supplémentaires et l'augmentation du contingent annuel de ces mêmes heures, les salariés, assurément, finiront par se rendre compte qu'ils travailleront beaucoup plus, mais sans que leur salaire augmente significativement.
En revanche, le bénéfice est total pour les employeurs, qui disposeront d'une main d'oeuvre flexible, avec 220 heures supplémentaires par an et par salarié - nous serons là bien loin des 35 heures hebdomadaires -, et cela pour un coût dérisoire.
Par ailleurs, un taux de majoration des heures supplémentaires aussi bas, outre qu'il défavorise évidemment les salariés en termes de salaires et de pouvoir d'achat, ce qui n'échappera à personne, ne favorisera pas l'embauche et le retour à l'emploi des quelque 4 millions de chômeurs que compte actuellement notre pays.
Une politique de l'emploi ambitieuse doit avoir pour objectif la baisse du chômage, l'incitation à l'embauche, la revalorisation des salaires et des conditions de travail, et non la multiplication des profits au seul bénéfice des actionnaires.
Dans ce cadre, l'augmentation du contingent d'heures supplémentaires et la baisse du taux de majoration de ces heures sont des mesures totalement contre-productives. Vous vous en apercevrez très vite.
Le taux de chômage vient de dépasser les 10 % et il n'y a strictement aucune raison que la situation s'améliore de manière significative avec une telle politique. Il convient au contraire de décourager le patronat de recourir aux heures supplémentaires afin de favoriser l'embauche.
Si vous persistez dans cette voie, il est probable que l'on assistera passivement à l'explosion du nombre de travailleurs pauvres dans ce pays et au phénomène, au demeurant compréhensible, du refus d'emplois précaires, à temps partiel, qui maintiennent sous la ligne de flottaison ceux qui les acceptent, c'est-à-dire ceux qui ne peuvent pas faire autrement.
Je ne vais pas vous apprendre qu'en 2005 il est possible d'être salarié et sans domicile fixe. C'est le cas d'un tiers des SDF, et c'est tout simplement inacceptable.
Pourtant, votre politique aura pour conséquence, que vous le vouliez ou non, que vous le reconnaissiez ou non, la multiplication de ces travailleurs pauvres.
Nous souhaitons rétablir les droits et protections nécessaires afin que les salariés retrouvent des conditions de travail et de vie dignes. C'est pourquoi nous proposons par cet amendement de revenir à la législation antérieure à la loi Fillon de 2003.
Il convient, d'une part, que ce soit la loi qui fixe les règles en matière de taux de majoration des heures supplémentaires et, d'autre part, que ces heures soient majorées de 25 % puis, au-delà de la huitième heure, qu'elles soient majorées de 50 %.