Intervention de Roland Muzeau

Réunion du 3 mars 2005 à 22h00
Réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise — Vote sur l'ensemble

Photo de Roland MuzeauRoland Muzeau :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la durée du travail relève de l'ordre public social. Ces lois sont faites pour protéger la santé et l'emploi. Le progrès, c'est de travailler moins en gagnant plus, et non pas l'inverse.

La productivité et la richesse de notre pays ont atteint de hauts niveaux, avec des profits records et des dividendes qui, en 2003, représentaient 7 % du PIB, contre 5, 3 % aux Etats-Unis, où les salariés ne bénéficient pas des 35 heures !

Dans ce contexte, le slogan que vous rabâchez depuis trois jours, « travailler plus pour gagner plus », est plus qu'inexact : il est mensonger et provocateur pour les millions de nos concitoyens qui veulent travailler mais n'ont pas d'emploi ou sont contraints au travail à temps partiel.

En vérité, avec la présente proposition de loi, faux nez du Gouvernement, il s'agit de faire travailler plus pour gagner plus. Car, malgré la propagande que vous avez faite autour de ce texte, il est impossible d'ignorer qu'il constitue une étape décisive dans votre politique de paupérisation du salariat. La « smicardisation » de la société est bien votre objectif !

Vous osez encore prétendre mettre en avant le dialogue social, alors que votre réforme a été unanimement dénoncée par les organisations syndicales de salariés et qu'elle a suscité grèves et manifestations.

Tous les clignotants sociaux sont au rouge. L'ensemble des associations impliquées dans le champ social font état de l'extrême gravité de la situation, de l'exclusion massive, des ravages de la pauvreté dans notre société.

« Et alors ? », répond le Gouvernement, dans un pas de deux avec le MEDEF, et avec la complicité de quatre députés de l'avant-garde ultralibérale, « Il faut réduire le code du travail et placer les salariés dans un face-à-face avec leur employeur ! » Mais, inéluctablement, dans ce face-à-face, ils seront toujours perdants.

Vous avez refusé tous les amendements présentés par le groupe communiste républicain et citoyen, qu'il s'agisse du contingent d'heures supplémentaires, du rétablissement du taux de majoration de ces dernières ou d'autres sujets majeurs tels que le travail de nuit, la santé au travail, les règles de prise en compte du temps de trajet dans le temps de travail, la définition de l'astreinte, la revalorisation des temps partiels ou l'utilisation du compte épargne-temps.

De même, vous avez refusé de faire droit à nos propositions visant à réduire les inégalités entre les hommes et les femmes sur le plan de l'emploi et du pouvoir d'achat, lequel accuse encore un écart de 25 %.

Rien de surprenant à tout cela, car votre réforme s'inscrit parfaitement dans la politique de destruction du droit du travail et de régression sociale que votre gouvernement mène depuis plusieurs années : de Fillon à Larcher, tout se tient !

Derrière votre volonté d'isoler les salariés et de multiplier les cas particuliers et les règles dérogatoires, votre but est d'individualiser les rapports entre salariés et employeurs, car vous ne savez que trop à quel point ce rapport de force est inégal et à qui il profite.

Il y a quelque temps déjà, un article, qui garde pour moi toute sa pertinence, est paru dans Le Figaro - j'ai de bonnes lectures ! -, sous le titre : « Pour le droit de dire non à l'actionnaire ». Il reste parfaitement d'actualité à l'heure où sont annoncés des chiffres de progression records pour les profits de certains piliers de la bourse : Total, 23 % ; BNP, 24 % ; L'Oréal, 143 % ; Renault, 55 % ; Arcelor, 872 % ; Danone, 10 % ; Schneider, 30 % ; Bouygues, 41 % !

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