Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale pour assurer le traitement des réclamations des justiciables paraît fort complexe.
Alors qu'il s'agissait de créer une voie de recours directe et efficace pour les justiciables s'estimant lésés par le comportement d'un magistrat, le nouvel article 48-2 adopté par l'Assemblée nationale aboutit, en effet, à une procédure peu lisible.
Il soumet effectivement la saisine finale du CSM, autorité disciplinaire, à trois filtres : un parlementaire, le Médiateur de la République et le ministre de la justice ou, le cas échéant, les chefs de juridiction. Or, les justiciables peuvent et pourront encore demain s'adresser directement au garde des sceaux ou aux chefs des cours d'appel.
On peut, en outre, s'interroger sur l'attribution de cette mission au Médiateur de la République.
Aux termes de l'article 1er de la loi du 3 janvier 1973 instituant un médiateur, ce dernier reçoit les réclamations concernant le fonctionnement des administrations. Entrent, par conséquent, dans son champ de compétence les demandes relatives aux dysfonctionnements du service de la justice.
En revanche, le médiateur n'a aucune compétence pour connaître des comportements des magistrats susceptibles de recevoir une qualification disciplinaire. Les garanties attachées à l'indépendance de la magistrature rendent indispensable l'intervention, en ce domaine, d'une autorité légitime.
Pourtant, l'objet des réclamations mettant en cause le comportement des magistrats paraît suffisamment spécifique pour que leur examen soit confié à un organe collégial, rassemblant des personnes ayant l'expérience du milieu judiciaire.
La commission souhaite que les personnes désirant présenter une réclamation sur le comportement d'un magistrat puissent s'adresser directement à une instance spécifique et collégiale, dont la saisine pourra effectivement aboutir à l'intervention de l'autorité disciplinaire.
Tel est l'objet de cet amendement, qui vise à insérer, au sein de l'ordonnance du 22 décembre 1958, un dispositif permettant à toute personne physique ou morale qui s'estimerait lésée par un fait susceptible de recevoir une qualification disciplinaire commis par un magistrat dans l'exercice de ses fonctions de saisir la commission que nous avons appelé - mais nous pouvons évoluer - « de transparence de la justice ».
Cette commission serait placée auprès du ministre de la justice, dans un objectif de cohérence avec le pouvoir de saisine du CSM dont il est investi.
Sur le modèle de la commission des requêtes près la Cour de justice de la République, elle serait chargée d'examiner ces réclamations afin d'ordonner soit leur classement, en l'absence d'éléments tendant à établir une faute disciplinaire de la part du magistrat, soit, à l'inverse, leur transmission au ministre de la justice, à qui il appartiendrait, le cas échéant, de saisir le CSM.
La composition de la commission lui donnerait la légitimité requise pour exercer sa mission de filtrage des requêtes. Elle comprendrait en effet exclusivement des spécialistes du fonctionnement de la justice, à savoir quatre anciens membres du CSM, dont deux personnalités n'appartenant pas à l'ordre judiciaire, désignés par le ministre de la justice, et une personnalité qualifiée n'appartenant pas à l'ordre judiciaire, désignée conjointement par le premier président de la Cour de cassation et par le procureur général près cette cour, ce qui leur donnerait l'occasion de collaborer efficacement.
Ces membres, nommés pour une durée de cinq ans non renouvelable, éliraient en leur sein un président.
L'équilibre ainsi défini au sein de la commission entre magistrats et non magistrats garantirait le traitement impartial des requêtes.