Il vaut mieux que ce soit dit !
Le troisième point de désaccord porte sur la création, par le Sénat, d’une commission nationale des recherches impliquant la personne humaine, rattachée à la Haute Autorité de santé, qui serait chargée d’harmoniser les pratiques des comités, mais aussi d’examiner en appel les demandes d’autorisation qui ont fait l’objet d’une décision défavorable d’un comité.
L’Assemblée nationale conteste la compétence d’appel. Elle a donc prévu que la commission nationale des recherches impliquant la personne humaine soit simplement chargée de désigner le CPP auquel le dossier est renvoyé pour un second examen, comme le fait actuellement le ministre chargé de la santé, dans le cadre de la procédure prévue à l’article L. 1123-6 du code de la santé publique. Dont acte.
L’Assemblée nationale conteste surtout le rattachement de cette commission à la Haute Autorité de santé, au motif que cette dernière n’exerce aucune compétence en matière de recherche. C’est pourquoi elle prévoit le rattachement de cette commission au ministre chargé de la santé.
Pour ma part, je souhaite que cette commission soit totalement indépendante. C’est la raison pour laquelle j’avais déposé, en première lecture, un amendement visant à lui donner plus de poids et d’indépendance, et ce dans le seul but d’améliorer le fonctionnement des CPP et de garantir une meilleure protection des personnes. Cependant, comme vous le savez, l’article 40 de la Constitution s’oppose à ce que le Parlement puisse prévoir les modalités qui lui semblent les plus opportunes en la matière. Personne ne m’enlèvera d’ailleurs l’idée que c’est d’une totale absurdité !
C’est pourquoi, par défaut, certes, mais non sans détermination, nous soutenons la position de Mme la rapporteur à la fois pour ce qui concerne le rattachement à la HAS, mais aussi et surtout quant à la composition de cette commission et l’indépendance de ses membres, qui ne peuvent pas être des promoteurs.
Il reste un point sur lequel j’aurais aimé que nous revenions, mais sur lequel la commission ne m’a pas suivi, la participation à des recherches de personnes qui ne sont pas affiliées à un régime de sécurité sociale, notamment les personnes sans-papiers et les migrants.
Vous le dites souvent, Mme la rapporteur, « la recherche n’est pas le soin. » Elle a pour but l’amélioration des connaissances et « sa finalité est altruiste. » Ce n’est que dans certains cas précis et incidemment qu’elle peut amener un bénéfice direct au malade qui y participe. C’est ce qui justifiait, jusqu’à présent, que soient exclues des recherches les personnes non affiliées à un régime de sécurité sociale.
J’aurais souhaité que cette situation soit reconduite, et, quelles que soient les précautions prises par le texte, je trouve cette évolution particulièrement malvenue à l’heure où le Gouvernement s’apprête à restreindre de manière drastique l’accès à l’aide médicale d’État, l’AME, en conditionnant son accès à une participation forfaitaire de 30 euros.
Le risque, c’est donc que les personnes concernées participent à ces recherches pour bénéficier, le cas échéant, de soins gratuits.
Cela pose d’autres problèmes : par exemple, la participation aux recherches suspendra-t-elle une éventuelle procédure de reconduite à la frontière pour le migrant ? On s’exposerait alors au risque de voir des personnes en situation irrégulière participer à n’importe quelle recherche pour pouvoir rester plus longtemps sur le territoire français. Pour ma part, cela ne me dérange pas, mais le problème mérite d’être posé.
Autre question, que se passera-t-il en cas de problème ? Que se passera-t-il si des effets indésirables surviennent, comme cela peut parfois se produire, très longtemps après, à un moment où la personne concernée ne sera plus forcément sur le territoire français ? De quels moyens de recours disposera-t-elle ? C’est la raison pour laquelle je pensais qu’il fallait exclure de la recherche les personnes non couvertes par un régime de sécurité sociale.
En conclusion, soyez assurée, madame la secrétaire d'État, que les trois premiers points que j’ai mentionnés dans mon intervention – le consentement écrit, la répartition aléatoire des protocoles et la composition de la commission nationale – sont, pour nous, incontournables. Et c’est à la seule condition que le texte adopté par la commission des affaires sociales ne soit pas modifié dans son esprit que nous voterons la proposition de loi.
Je remercie vivement Mme le rapporteur, Marie-Thérèse Hermange, et Mme la présidente, Muguette Dini, pour la qualité du travail effectué en commission. Ce n’est pas un hasard si nous avons pu, toutes tendances confondues, aboutir à un texte unanime. Cette unanimité devrait être un gage de sécurité pour le Gouvernement.