Intervention de Évelyne Didier

Réunion du 17 novembre 2010 à 22h00
Adaptation de la législation au droit communautaire — Article 3

Photo de Évelyne DidierÉvelyne Didier :

Cet article tend à transposer un petit morceau de la directive Services. Il s’agit d’une méthode utilisée depuis de nombreux mois par le Gouvernement afin d’éviter une discussion politique sur la nocivité de l’application de cette directive.

En effet, la dérégulation qui y est proposée ne peut s’accompagner que d’une harmonisation par le bas des conditions sociales des professionnels concernés. En l’espèce, il s’agit de la mise en conformité des conditions d’exercice de la profession de géomètre-expert avec la directive Services, que tendait également à réaliser l’article 85 de la proposition de loi de M. Warsmann.

Je vous rappelle les propos de Pierre Bibolet, président de l’ordre des géomètres-experts, sur cette proposition. Il regrettait « l’attaque portée au principe d’indépendance par l’adoption de dispositions autorisant la détention majoritaire du capital social dans une structure commerciale au sein de laquelle le géomètre-expert n’exercera pas ». Il ajoutait : « Le Conseil supérieur y était fortement opposé et n’a pas été entendu sur ce point. »

Depuis l’adoption de la loi de 1994, les conditions d’exercice sont déjà plus souples. Ainsi, il a été permis aux professionnels ressortissants d’un État membre de l’Union européenne d’effectuer certains travaux de manière temporaire et occasionnelle, sans être inscrits à l’ordre des géomètres-experts. L’inscription au tableau de l’ordre a également été élargie. Par ailleurs, les travaux réalisés par les géomètres-experts ont également été étendus puisqu’il leur a été permis d’exercer des activités d’entremise ou de gestion immobilières, pour lesquelles ils doivent cependant tenir une compatibilité particulière.

Les présentes dispositions vont encore plus loin que la loi de 1994. En effet, elles assouplissent encore plus les conditions d’exercice pour les activités d’entremise et de gestions immobilières, conformément à la position de l’Union européenne, hostile au principe de spécialité, principe qui permet pourtant de garantir la qualité des professionnels.

D’autre part, les conditions de diplôme sont également assouplies, permettant à terme le remplacement des épreuves orales et écrites par la soutenance d’un mémoire. Sans contester le bien-fondé de cette évolution, nous sommes circonspects sur toute volonté d’amoindrir le degré de connaissances nécessaire à l’exercice de cette profession.

Pour finir, je souhaite vous rappeler les termes de l’intervention de Pierre Bibolet lors du 40e congrès des géomètres-experts : « Je ne suis pas certain que notre ministère de tutelle ait pris la mesure de l’engagement du Conseil supérieur sur […] la spécificité de notre profession, seule détentrice d’une délégation de service public parmi les professions impactées par la directive Services. […] Je ne comprends pas que l’État français ait favorisé la liberté d’établissement au détriment de la qualité des services, pourtant au cœur de la directive Services. »

Nous devons bien avouer que nous ne voyons pas dans cette réforme une orientation précise en termes de service public et d’intérêt général. Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de cet article.

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