... et c'est un pourcentage tout aussi faible du total des crédits consacrés à la santé dans notre pays.
La faiblesse des crédits de cette mission témoigne très largement du désengagement de l'État et d'un transfert de plus en plus important vers la sécurité sociale, dont la mission « Santé » est devenue une annexe.
Ainsi l'État intervient-il de moins en moins. Désormais, il conçoit et pilote la politique de santé, et l'assurance maladie en assure le financement bien que ses ressources demeurent insuffisantes ; nous l'avons largement déploré dans le passé.
Dans cette mission, les programmes sont d'inégale importance. Je n'aborderai que les deux premiers d'entre eux, laissant le soin à mon collègue Jean-Pierre Michel de vous parler du programme « Drogue et toxicomanie ».
Le programme « Santé publique et prévention » vise à mettre en oeuvre les priorités de santé publique définies par la loi du 9 août 2004. C'est un programme essentiel, dont l'objet est de mettre un terme au déséquilibre persistant entre les soins et la prévention qui caractérise notre pays.
Ce programme se décline essentiellement en différents plans. Incontestablement, en matière de prévention et de santé publique, la notion de « plan » est adaptée.
Ces plans permettent d'avoir une vision d'ensemble, associant généralement les facettes hospitalo-universitaires et la recherche, les soins hospitaliers et l'accompagnement social et médico-social des malades concernés.
De fait, de nombreux plans sont régulièrement annoncés. Force est de constater cependant qu'ils ont parfois du mal à trouver une traduction budgétaire !
Ainsi, c'est seulement à partir de 2007, monsieur le ministre, que le plan psychiatrie et santé mentale 2005-2008 sera enfin effectivement mis en place. Pour autant, avec 5, 6 millions d'euros de crédits prévus, il demeure en fait largement sous-doté compte tenu des besoins considérables de ce secteur.
Ce n'est pas le seul plan à être sous-doté. Comme l'ont déjà fait remarquer MM. les rapporteurs, la montée en charge du plan cancer se fait au détriment d'autres pathologies graves ; je pense aux maladies rares, aux hépatites ou encore à l'obésité. Pour les deux premières, les crédits sont en baisse de 50 % et, pour la dernière, les crédits du plan national nutrition santé baissent de 12, 7 %.
On peut aussi s'étonner de la forte baisse des crédits en ce qui concerne la lutte contre l'alcool et le tabac - ils diminuent de 36, 06 % - au moment même où l'on durcit la réglementation sur l'interdiction de fumer - c'est une bonne chose - et où est lancé un programme de lutte contre toutes les dépendances, y compris contre les médicaments et les jeux.
Pour en finir avec le thème de la prévention, j'ajouterai simplement, ce qui changera un peu la tonalité de mon intervention, que nous avons apprécié la clarté et la fermeté des propos du ministre de la santé sur deux sujets de santé publique importants : les publicités pour les produits alimentaires pour les enfants, notamment à la télévision, sujet sur lequel le groupe socialiste était intervenu avec beaucoup d'insistance en 2004, et la tentative de certains députés d'instaurer une sensibilisation des élèves aux bienfaits du vin. J'espère que cette fermeté perdurera !
Le programme « Offre de soins et qualité du système de soins » vise, quant à lui, à adapter le dispositif de soins pour qu'il puisse répondre aux besoins de la population en assurant une offre de soins de qualité, suffisante et accessible à tous. Ce programme est essentiel.
Pourtant, dans ce domaine, le budget de l'État n'intervient que pour moins de 1 % du total des dépenses effectuées à ce titre. Encore une fois, c'est l'assurance maladie qui finance la plus grande partie de ces actions.
Ce programme permet notamment de financer la formation médicale de nos futurs médecins. Ces crédits sont en hausse de 11 %. Pourtant je m'interroge, monsieur le ministre : cette hausse sera-t-elle suffisante pour financer l'instauration d'un stage en médecine générale lors du deuxième cycle des études médicales ?
La mise en place enfin effective de ce stage, aux cotés des stages hospitaliers, qui permettra aux étudiants de faire un choix éclairé sur leur filière de troisième cycle, et l'annonce officielle de la signature par le ministre de l'éducation nationale et le ministre de la santé de l'arrêté reconnaissant la médecine générale au sein du Conseil national des universités, sont de bonnes nouvelles. J'espère que cela permettra de résoudre certains problèmes de démographie médicale dont je vous ai déjà abondamment parlé et qui sont loin d'être réglés !
La discipline médecine générale doit maintenant concrètement être dotée des moyens de son enseignement et de sa recherche, ouvrant de véritables perspectives pour les médecins généralistes enseignants et les étudiants choisissant cette filière.
En parlant d'universités, je voudrais dire que les étudiants sages-femmes demandent « l'universitarisation » de leur diplôme, ce qui leur permettrait de s'insérer dans le système LMD, licence-master-doctorat, et d'ouvrir leur cursus vers d'autres filières, notamment via les équivalences, ainsi que vers la recherche.
Un rapport a été remis en ce sens cet été à M. le ministre de la santé. Quelles suites pensez-vous y donner ?
Quant aux ostéopathes, même si leur profession est parfois contestée par certains, ils attendent depuis cinq ans la publication des décrets d'application de l'article 75 de la loi du 4 mars 2002. Le Parlement également attend, car il souhaiterait que les textes adoptés soient suivis de la publication des décrets d'application !
Il semble qu'après la condamnation par le Conseil d'État le Gouvernement ait enfin réagi et s'apprête à publier des décrets. Quel sera leur contenu ? Respecteront-ils l'esprit dudit article 75, notamment en ce qui concerne l'usage du titre, la durée des études ou l'homologation des écoles de formation ?
Les ostéopathes qui manifestaient il y deux jours ont de sérieux doutes, puisque, pour ménager les médecins et les kinésithérapeutes, vous semblez avoir choisi la voie a minima, c'est-à-dire celle qui offre le moins de garanties tant pour la discipline que pour le patient.
De ce point de vue, monsieur le ministre, la France est très en retrait par rapport à nombre de pays de l'Union européenne.
En matière d'accès aux soins, l'essentiel des crédits prévus par le programme concernent la télémédecine - 1, 3 million d'euros - et la modernisation de notre système de soins. L'objectif est d'assurer à la population des conditions d'accès aux soins satisfaisantes et des délais raisonnables.
En tout état de cause, l'accès aux soins ne repose pas seulement sur les évolutions technologiques. Le premier accès aux soins, c'est de pouvoir être reçu par un médecin !
Nous devrions tous être choqués par ces médecins qui refusent de prendre en charge les patients bénéficiaires de la couverture maladie universelle, la CMU, ou de l'aide médicale de l'État, l'AME. C'est une attitude contraire au code de déontologie et elle doit faire l'objet de sanctions.
À cet égard, le silence des instances ordinales est tout aussi choquant. Il est inacceptable de se retrancher derrière des procédures administratives ou encore de prétendre que les bénéficiaires de la CMU ou de l'AME n'honorent pas leurs rendez-vous.
Nous ne pouvons que partager l'avis du Comité consultatif national d'éthique qui constate que les enjeux financiers pèsent de plus en plus sur le système de santé. Son président, le professeur Didier Sicard, a des propos très durs à l'égard de ces médecins devenus « obsédés par l'aspect financier » et qui « perdent leurs valeurs au détriment de celles qui entourent l'acte médical ».
Le Parlement a décidé de la CMU : elle doit être acceptée par tous les médecins !
Aujourd'hui, il faut réagir pour faire cesser ces agissements ; mais il ne faut pas simplement, comme le propose le rapporteur pour avis, informer les médecins qui connaissent parfaitement leurs obligations, il faut également sanctionner ceux qui refusent les soins.
C'est dans ce programme également qu'est prévue la subvention de l'État à la Haute autorité de santé, la HAS : elle s'élève à 1 million d'euros seulement en 2007, soit dix fois moins qu'en 2006 !
Vous justifiez cette baisse spectaculaire par une montée en charge plus lente que prévue des activités de la HAS. Cela s'explique aussi peut-être par le fait, monsieur le ministre, que le Gouvernement n'accorde pas à cette haute autorité la place qu'il devrait et qu'il se plaît à ignorer superbement certaines de ses recommandations !
Je pense notamment aux recommandations concernant l'internement forcé totalement ignorées dans le projet de loi relatif à la prévention de la délinquance. Et pour cause, c'est la notion de soins que la HAS met en avant.
Nous aurons l'occasion d'en reparler le 21 décembre prochain lorsque nous examinerons le projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique, ainsi qu'à l'occasion de la seconde lecture du projet de loi relatif à la prévention de la délinquance.
Cependant, dès maintenant, je tiens à vous dire, monsieur le ministre, que nous ne pouvons pas accepter que les articles 18 à 24 soient disjoints du texte pendant la navette, pour que vous puissiez prendre les mesures concernées par voie d'ordonnance.
En conclusion, les crédits de la mission « Santé » sont loin d'être satisfaisants. Leur faiblesse et leur inégale répartition ne peuvent absolument pas garantir l'efficacité de la politique de prévention et l'amélioration de l'offre de soins. Le rapporteur de la commission des affaires sociales en est conscient et n'a pas été exempt de critiques. Contrairement à lui - cela ne vous surprendra pas, monsieur le ministre -, nous en tirerons les conséquences en votant contre les crédits de la mission « Santé ».