Intervention de Jean Louis Masson

Réunion du 27 avril 2010 à 14h30
Article 65 de la constitution mandat des membres du conseil supérieur de la magistrature — Discussion d'un projet de loi organique en deuxième lecture et d'un projet de loi organique en procédure accélérée

Photo de Jean Louis MassonJean Louis Masson :

Madame le président, madame le ministre d’État, mes chers collègues, comme plusieurs intervenants avant moi, je déplore le retard pris par le Gouvernement dans l’élaboration de ce projet de loi organique prévu par la Constitution.

Le problème va d’ailleurs bien au-delà du texte qui nous est aujourd'hui soumis. Il concerne tous les projets de loi organique rendus nécessaires par la révision constitutionnelle, mais également les décrets d’application. Certaines lois sont en effet inapplicables, parfois durant plusieurs années, simplement parce que le Gouvernement n’a pas publié les décrets d’application. Il serait peut-être opportun que, au plus haut niveau de l’État, on décide de faire un peu moins de réformes, mais de les faire plus sérieusement. Si tel était déjà le cas, nous n’en serions peut-être pas là où nous en sommes actuellement !

Sur le fond, je suis très favorable aux mesures qui nous sont proposées, car elles me paraissent constituer des avancées très satisfaisantes. Il y a des points très positifs.

Cela étant dit, il faut juger la réforme qui nous est soumise à la lumière des garanties que l’on doit au justiciable, à savoir les garanties d’équité et d’indépendance de la justice. L’indépendance du pouvoir judiciaire par rapport au pouvoir politique est l’un des fondements de la démocratie.

Or, pour ma part, comme d’autres dans cette enceinte, j’avoue que les projets de loi annoncés par le Gouvernement m’inquiètent, notamment la suppression du juge d’instruction, dont le travail serait plus ou moins effectué par le procureur de la République, qui est aux ordres. Je considère que ce serait tout à fait désastreux pour la démocratie. On constate dès à présent des dérives dans des affaires politiques, même si, bien entendu, les procureurs de la République prétendent qu’ils n’y sont pour rien. On n’avait jamais vu de procureur de la République convoquer la presse avant de prendre une décision, puis annoncer sa décision en indiquant que ni le garde des sceaux ni le Président de la République ne lui ont demandé quoi que ce soit ! Une telle situation est affligeante pour la France.

Je redoute la suppression du juge d’instruction et son remplacement par le procureur de la République, qui restera aux ordres comme le sont actuellement les procureurs de la République. Ces derniers devraient être indépendants du pouvoir politique, a fortiori si les juges d’instruction sont supprimés.

Je m’abstiendrai sur ces deux projets de loi organique, madame le ministre d’État, même si je considère qu’ils sont globalement satisfaisants, parce que je n’approuve pas du tout, dans le domaine judiciaire comme dans d’autres, la politique du Gouvernement.

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