Intervention de Virginie Klès

Réunion du 27 avril 2010 à 14h30
Article 65 de la constitution mandat des membres du conseil supérieur de la magistrature — Discussion d'un projet de loi organique en deuxième lecture et d'un projet de loi organique en procédure accélérée

Photo de Virginie KlèsVirginie Klès :

Madame la présidente, madame le ministre d’État, mes chers collègues, de quoi s’agit-il aujourd’hui ? Il nous faut débattre du projet de loi organique relatif à l’application de l’article 65 de la Constitution. Les objectifs de ce texte sont de réaffirmer voire de rétablir la confiance du citoyen en sa justice, laquelle – doit-on encore le garantir et le prouver ? – est impartiale et indépendante.

Beaucoup de choses ont déjà été dites. L’originalité de mon intervention tiendra peut-être au fait que j’ai décidé d’adopter le point de vue d’un citoyen lambda, d’un simple « justiciable », pour reprendre un terme juridique, et surtout pas celui d’un juriste.

Puisqu’il s’agit de rétablir la confiance du citoyen, mettons-nous à sa place ! Demandons-nous si, pour un citoyen, ce texte est effectivement de nature à garantir l’impartialité et l’indépendance de la justice, et à le prouver. La confiance ne se décrète pas : elle se construit, mais se détruit aussi rapidement. C’est un sentiment qui se fonde sur des engagements clairs, réciproques, crédibles, suffisants, mais surtout tenus, compris et accessibles.

Ce texte traite de la composition et des modalités de fonctionnement du Conseil supérieur de la magistrature. Qu’est-ce que le Conseil supérieur de la magistrature pour nos concitoyens ? L’instance qui juge les juges. Cette instance a donc le devoir d’être absolument irréprochable et exemplaire. Elle a une grande valeur symbolique pour le citoyen ; elle sera le vecteur de la confiance en la justice. Dès lors, il importe d’accorder le plus grand intérêt à ce texte, à la composition du CSM et à la nomination des personnalités qualifiées, comme à son fonctionnement.

Ce texte comporte un certain nombre d’avancées, il convient de le reconnaître.

La possibilité accordée au justiciable de saisir le CSM et d’y être entendu est une avancée non négligeable, malgré la lourdeur et la complexité des procédures. Ce droit existe désormais, et il faut le faire connaître afin que les gens s’en saisissent.

J’approuve également l’amélioration de la parité entre les femmes et les hommes concernant les nominations des personnalités qualifiées. Madame le ministre d’État, en tant que femmes, nous ne pouvons que nous réjouir des avancées en la matière.

La procédure d’interdiction temporaire d’exercice applicable aux magistrats ainsi que la reconnaissance de la gravité du manquement en cas de saisine disciplinaire du CSM par les justiciables sont aussi des avancées.

Le fait que le Président de la République ne soit plus le président du CSM et le garde des sceaux son vice-président est une disposition phare du texte dont la portée est à mon sens purement symbolique, ce qui ne signifie pas qu’elle soit inutile. Le symbole permet souvent, au même titre que les effets de communication, d’intéresser le citoyen à ce type de procédure. Cette disposition est donc importante, même si elle est loin d’être suffisante.

Le fait que le chef de l’État ne préside plus le CSM ne suffit pas à garantir l’indépendance du Conseil. Plusieurs orateurs ont évoqué les conditions de nomination du secrétaire général. Le Sénat avait prévu la saisine pour avis du CSM sur cette nomination, mais cette disposition ne figure plus dans le texte qui nous revient de l’Assemblée nationale. Quel dommage !

J’en viens maintenant aux nominations des personnalités extérieures. Quoi qu’on en dise, elles demeurent aux mains du pouvoir politique et soumises au fait majoritaire. Ces personnalités ont pourtant un poids important au sein du CSM ; il ne faut pas les négliger. Quel dommage, encore une fois ! Pourquoi maintenir un dispositif prévoyant uniquement l’avis du pouvoir politique en place, et ce d’autant que nous ne savons pas quelles compétences ou qualités seront requises pour siéger au CSM ?

Le CSM se doit pourtant d’être exemplaire. Il est la vitrine de la transparence et de l’indépendance de la justice. Les compétences et les qualités des personnalités extérieures devraient en conséquence être définies en amont de leur nomination. En tout cas, c’est mon opinion en tant que citoyenne.

Oui, évidemment, à l’autonomie budgétaire et financière ! Initialement proposée, puis retirée du texte, elle y est réintroduite. Il faut la garantir et la maintenir.

Sans autonomie budgétaire et financière, le Conseil supérieur de la magistrature n’est pas indépendant. Or nous voulons qu’il le soit ! En effet, comme il est la vitrine, comme il est le « juge des juges », c’est à partir de sa composition et de son fonctionnement que le citoyen appréciera l’autonomie, l’indépendance et l’impartialité de la justice. Il est donc important, essentiel même, de maintenir l’autonomie budgétaire et financière du CSM.

Sur la complexité des procédures que j’ai déjà évoquée tout à l’heure, je serai brève. J’ignore s’il faut être juriste pour simplifier les choses. Toujours est-il qu’il me paraît aujourd'hui extrêmement compliqué pour un simple citoyen de trouver la bonne porte en vue de saisir le CSM.

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