L’article 10 tel qu’il est rédigé permet à La Poste d’attribuer gratuitement des actions à ses personnels, conformément aux dispositions du code de commerce.
Pourtant, le capital de La Poste n’a pas vocation à faire l’objet de quelque ouverture que ce soit, tant la nature de sa mission est par essence publique.
En effet, comment concilier actionnariat – et donc rentabilité – avec les missions de service public de cet établissement ? À mon sens, c’est tout simplement impossible. En intégrant une notion de rentabilité, on supprime la dimension sociale et sociétale de La Poste.
Monsieur le ministre, votre proposition peut sembler louable, mais pensez-vous que les salariés de La Poste, dont le salaire moyen s’élève à environ 1 200 euros, auront à cœur de faire fructifier leurs actions ? Ils souhaiteraient plutôt avoir une augmentation de salaire et poursuivre leur mission de lien social en offrant aux usagers un service public digne de ce nom et efficace.
Avec l’adoption de cet article, les fonctionnaires employés par La Poste pourront bénéficier de l’attribution d’actions dans les mêmes conditions que les salariés.
À première vue, et dans un souci d’équité, cette disposition peut paraître positive, mais, comme je viens de l’indiquer, comment croire que des employés aux revenus modestes seront plus intéressés par des actions placées sur des fonds communs de placement d’entreprise, où les conditions de récupération des fonds sont plus que draconiennes, que par des augmentations de salaire ?
Sous couvert d’intentions louables, il ne faudrait pas que ces actions soient, pour le fonctionnaire ou le salarié, un motif de non-augmentation du salaire ou de négociation du salaire lors d’une embauche.
L’ensemble des obligations qui pèsent sur La Poste – un service continu, égal sur tout le territoire, sans distinction d’origine, d’appartenance sociale ou politique ou syndicale – impose un statut public et de fortes garanties déontologiques, incompatibles avec la notion de rentabilité.