J’ai déjà eu l’occasion de présenter cet amendement lors de l’examen du titre Ier. Il m’avait alors été demandé de le rectifier et de le déplacer au titre II, avant l’article 13. De quoi s’agit-il ?
Avec l’arrêt Corbeau, la Cour de justice des communautés européennes a reconnu expressément que les États membres peuvent « conférer à des entreprises, qu’ils chargent de la gestion des services d’intérêt économique général, des droits exclusifs qui peuvent faire obstacle à l’application des règles du traité sur la concurrence, dans la mesure où des restrictions à la concurrence, voire une exclusion de toute concurrence, de la part d’autres opérateurs économiques, sont nécessaires pour assurer l’accomplissement de la mission particulière qui a été impartie aux entreprises titulaires des droits exclusifs ».
Cette décision a été confirmée récemment par deux autres arrêts : Arrêt Commune d’Almelo et arrêt International Mail Spain. On peut donc considérer qu’il s’agit d’une jurisprudence constante.
L’arrêt Corbeau n’est pas passé inaperçu. En 2000, dans une proposition de résolution sur la deuxième directive postale, le député Alain Barrau a rappelé l’importance de cette jurisprudence pour assurer l’équilibre économique du service public assumé par le titulaire du droit exclusif. Le rapport d’information de M. Hubert Haenel Les services d’intérêt général en Europe, déposé le 16 novembre 2000, y fait également référence.
En 2006, lors de l’examen, au titre du respect du principe de proportionnalité, de la proposition concernant la troisième directive postale, la Commission européenne, qui était interrogée sur ce sujet, n’a donné aucune réponse probante.
En avril 2009, dans le cadre de l’examen de la proposition de résolution européenne déposée par Mme Catherine Tasca, j’ai moi-même évoqué cette jurisprudence, afin d’illustrer l’intérêt de mettre en place une législation-cadre européenne pour les services d’intérêt général.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous demandons à l’État français de se rapprocher d’autres États européens et d’obtenir un moratoire sur l’entrée en vigueur de la directive 2008/6/CE du 20 février 2008. Il nous semble en effet que, dans le contexte économique actuel, qui est extrêmement dégradé, de nombreux États européens seraient prêts à « engager le fer » avec la Commission européenne pour faire en sorte que l’on renonce à supprimer le secteur réservé.