Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le rapporteur de la commission des lois vient de nous présenter le contexte et les dispositions de la proposition de loi dont nous entamons la discussion et qui a été déposée par le président de l’Assemblée nationale le 18 novembre 2009, puis adoptée par celle-ci le 27 janvier 2010.
En tant que rapporteur pour avis de la commission des finances, je me limiterai à évoquer ce qui a justifié la saisine de notre commission.
C’est évidemment l’article 3 de la proposition de loi qui a focalisé notre attention. Il vise en effet à modifier le code des juridictions financières pour attribuer à certaines instances parlementaires d’évaluation des politiques publiques, et notamment au CEC, le comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, spécifique à l’Assemblée nationale, le pouvoir de saisir la Cour des comptes d’une demande d’assistance, appelée à donner lieu à la remise d’un rapport, lequel sera susceptible d’être rendu public.
Cette extension du droit de demander des missions d’assistance à la Cour des comptes risque d’entraîner, selon nous, une augmentation du nombre des demandes, augmentation incompatible avec les moyens humains de la Cour. Celle-ci sera donc amenée à trier entre les différentes demandes émanant de chacune des deux assemblées, et même parmi les demandes de chaque assemblée.
Ce risque est d’autant plus important que, comme l’a rappelé le Conseil constitutionnel dans sa décision du 25 juillet 2001 sur la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF, il appartient aux autorités compétentes de la Cour des comptes de faire en sorte que l’équilibre voulu par le constituant dans les fonctions d’assistance de la Cour des comptes, entre le Parlement et le Gouvernement, ne soit pas faussé au détriment de l’un de ces deux pouvoirs. En conséquence, le tri effectué par la Cour concernera toujours les demandes émanant du Parlement.
La commission des finances a donc souhaité, tout d’abord, écarter le risque d’une trop forte augmentation du nombre de demandes adressées à la Cour des comptes. Elle a aussi voulu préserver les spécificités actuelles des commissions des finances et des affaires sociales qui ont été établies par les lois organiques, et qui donnent satisfaction, sous réserve des limites que j’évoquerai dans un instant.
Ainsi, depuis 2003, la commission des finances du Sénat demande tous les ans à la Cour des comptes de mener cinq enquêtes, en application de l’article 58, deuxième alinéa, de la LOLF. Les enquêtes qui nous sont remises, dans un délai de huit mois, donnent lieu à audition pour suite à donner et font l’objet d’une publication.
Les deux amendements que la commission des finances avait adoptés – et il est symptomatique que la commission des affaires sociales ait déposé des amendements rigoureusement identiques – ont été repris dans le texte de la commission des lois, ce dont nous nous félicitons ; j’en remercie le président et le rapporteur de la commission des lois, ainsi que tous ses membres.
Le premier de ces amendements tend à prévoir que les demandes formulées au titre de la nouvelle procédure ne peuvent concerner ni l’exécution des lois de finances ni une question relative aux finances publiques. Cette restriction, qui réserve ces sujets aux commissions des finances et des affaires sociales, avait été posée par la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
Le deuxième prévoit que la Cour des comptes examine en priorité les demandes d’assistance et d’enquête visées à l’article 58 de la LOLF et à l’article L.O. 132-3-1 du code des juridictions financières, articles qui sont antérieurs et ont, par définition, valeur de dispositions organiques.
La commission des finances a souhaité aussi aller « plus loin » et propose de reprendre dans la présente proposition de loi certaines dispositions figurant dans le projet de loi de modernisation des institutions financières déposé par le Gouvernement sur le bureau des assemblées. Le président Accoyer a voulu, en effet, renforcer les prérogatives du Parlement et a notamment prévu d’étendre la saisine de la Cour des comptes.