Intervention de Laurent Béteille

Réunion du 29 novembre 2010 à 10h00
Loi de finances pour 2011 — Justice

Photo de Laurent BéteilleLaurent Béteille :

Monsieur le garde de sceaux, qu’il me soit permis tout d’abord de vous féliciter pour vos nouvelles fonctions, car j’ai plaisir à vous voir exercer de telles responsabilités.

La discussion que nous entamons aujourd’hui sur les crédits de la mission « Justice » est l’occasion, pour nous, de constater que le budget de la justice reste, cette année encore, une des grandes priorités du Gouvernement. Le groupe UMP se félicite que, pour la septième année consécutive, ce budget soit en sensible augmentation.

L’engagement du Président de la République en faveur du rapprochement de la justice et du citoyen se concrétise à travers ce budget, qui atteindra 7, 128 milliards d’euros, soit une augmentation de 4, 15 % en crédits de paiement.

À ce titre, je tiens à souligner les efforts réalisés par notre majorité en faveur de la justice, alors même que le contexte budgétaire, mes chers collègues, ne s’y prête guère. Les crédits des programmes Justice judiciaire, Accès au droit et à la justice et Conduite et pilotage de la politique de la justice progressent respectivement de 4, 4 %, de 12, 3 % et de 7 %.

Nous nous réjouissons de l’augmentation substantielle de ces crédits qui permettront de renforcer les moyens de nos institutions judiciaires. Ainsi, l’administration pénitentiaire et le secteur judiciaire voient leurs effectifs croître. En ce sens, nous approuvons le rééquilibrage du ratio greffiers-magistrats dans le milieu judiciaire avec la création de 400 postes de greffiers.

Ce budget répond à plusieurs interrogations, notamment celles émises dans le milieu carcéral à l’issue de la loi pénitentiaire. Ce secteur voit conjointement la création de 413 emplois, le remplacement des départs à la retraite, ainsi que des redéploiements. Cela aboutira à l’affectation de 1 000 emplois additionnels pour l’année à venir.

Cet accroissement ne peut qu’être salué au moment où la loi pénitentiaire, que notre majorité peut se féliciter d’avoir adoptée, requiert, d’une part, que des établissements pénitentiaires soient construits et, d’autre part, que les missions traditionnelles soient mieux adaptées aux solutions de remplacement à l’emprisonnement prévues dans le texte de loi.

L’ampleur des changements, tels que le recentrage des services pénitentiaires et de probation sur la prévention de la récidive ou encore la priorité donnée à la prise en charge des mineurs délinquants, nécessitait un déploiement financier plus important. C’est chose faite à travers le projet de loi de finances pour 2011, et ce malgré un contexte budgétaire qui appelle aux restrictions.

Si j’approuve cette politique de modernisation favorable à un rééquilibrage des crédits de personnel, je souhaite vous interroger, monsieur le ministre, sur la question des crédits de fonctionnement. En effet, de nombreuses difficultés sont soulevées dans les bâtiments de justice, notamment en raison de frais de gestion disproportionnés au regard du budget alloué. Monsieur le ministre, quelles solutions envisagez-vous d’apporter aux difficultés de gestion que connaissent les tribunaux ? Il est essentiel de donner les moyens matériels suffisants pour que la justice soit rendue dans les meilleures conditions possibles. Il en va de la qualité et de la rapidité de notre système judiciaire.

Moderniser notre appareil judiciaire, c’est également renouveler l’immobilier pénitentiaire. Sur ce sujet, le groupe UMP salue le volontarisme dont le Gouvernement fait preuve. En effet, à travers plusieurs programmes immobiliers de construction, notre pays devrait disposer, en 2017, de 68 000 places en prison, sachant qu’aujourd’hui 61 000 personnes sont incarcérées.

En plus des investissements extrabudgétaires, le budget pour 2011 poursuit, dans le bon sens, l’inscription de crédits de paiement pour les investissements : 331 millions d’euros pour l’immobilier pénitentiaire et 200 millions d’euros pour la réhabilitation de tribunaux vétustes.

Nous devons faire ces choix pour le renouvellement du parc immobilier judiciaire, car il n’est pas acceptable, en France, que les conditions de détention dans certaines maisons d’arrêt portent atteinte à la dignité de la personne et, par là même, à celle de la patrie des droits de l’homme.

Au-delà de l’examen du budget consacré au système carcéral, je souhaiterais aborder plus particulièrement la question de la prise en charge des personnes atteintes de troubles mentaux et ayant commis une infraction.

En effet, l’excellent rapport du groupe de travail dédié à ce sujet de nos collègues Jean-René Lecerf, Christiane Demontès, Gilbert Barbier et Jean-Pierre Michel relève que la prise en charge de ces détenus repose actuellement sur des unités de consultations et de soins ambulatoires qui assurent les soins courants dans les établissements pénitentiaires de leur zone géographique, sur les services médico-psychologiques régionaux basés principalement en maison d’arrêt et chargés des soins psychiatriques et de la préparation du suivi post-pénal et, enfin, sur les unités hospitalières spécialement aménagées, qui permettent une hospitalisation des détenus équivalente à celle qui prévaut en dehors du milieu carcéral.

Si, dans leur rapport, nos collègues reconnaissent les efforts réalisés ces dernières années, ils montrent également que le milieu carcéral peut être un lieu d’aggravation de certaines pathologies en l’absence de structures adaptées aux soins psychiatriques.

C’est pourquoi, monsieur le ministre, à l’heure où la justice est en forte évolution et, en vue des futures réalisations immobilières, nous souhaiterions connaître vos engagements sur le sujet.

Enfin, moderniser notre appareil judiciaire, c’est rapprocher nos concitoyens de la justice. Ce rapprochement passe évidemment par l’accès à la justice, qui plus est par l’égal accès de tous à la justice. Cela m’amène à intervenir sur la question de l’aide juridictionnelle.

Les crédits qui lui sont affectés dans le projet de loi de finances pour 2011 font l’objet d’une forte augmentation, pour atteindre 312, 3 millions d’euros. Cette hausse s’explique principalement par l’application du taux normal de la TVA pour les missions effectuées par les avocats. Nous nous réjouissons de cette hausse, qui permettra une meilleure prise en charge de l’aide juridictionnelle afin de promouvoir l’accès à la justice aux plus défavorisés. Pour autant, cela sera-t-il suffisant ? Nous éprouvons quelque inquiétude sur ce point.

Cependant, si les crédits augmentent et que l’instauration d’un ticket modérateur permettra de limiter les abus de recours infondés, un problème persiste dans ce système, à savoir le recouvrement de l’aide juridictionnelle auprès de la partie qui perd son procès.

Actuellement, l’utilité financière de cette procédure se révèle quasiment nulle en raison du manque de temps et de moyens qui y sont affectés. Dès lors, monsieur le garde des sceaux, pouvez-vous nous présenter vos ambitions pour que le recouvrement devienne efficient ?

C’est parce que ce budget, fondé sur une optimisation de la gestion des ressources financières, a pour objet de conforter les professionnels de la justice et de rendre aux justiciables toute la confiance qu’ils doivent avoir dans nos institutions judiciaires, que le groupe UMP votera les crédits de la mission « Justice ».

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