Je m’inquiète également du transfert des crédits du développement solidaire à la mission « Immigration, asile et intégration », et donc, en fait, au ministère de l’intérieur. On introduit ainsi une séparation entre ces activités et celles qui sont relatives à la coopération. C’est préjudiciable à un double titre : en termes de lisibilité budgétaire et en raison de la mauvaise interprétation que feront de cette décision les pays auxquels cette politique est destinée.
J’en viens à ce projet de budget proprement dit, qui traduit plusieurs choix que vous avez opérés, monsieur le ministre.
Premier choix : vous avez procédé à un relèvement des barrières administratives, ce qui entraîne une augmentation des difficultés et des tracasseries que doivent surmonter les migrants. Il n’est que de voir la politique des taxes que vous mettez en œuvre et sur laquelle nous reviendrons lors de l’examen des amendements : les droits de chancellerie dont doivent s’acquitter les étrangers lors de leur demande de visa augmentent de façon tout à fait considérable. Ainsi, au Mali, il faut débourser 220 euros en moyenne, alors que le salaire moyen local est de 61 euros, sans d’ailleurs avoir la certitude d’obtenir le document demandé.
Une fois arrivés sur le territoire français, les étrangers doivent s’acquitter d’autres taxes, dont le montant ne cesse d’augmenter ; nous y reviendrons tout à l’heure.
Cette politique n’est pas bonne dans la mesure où, de facto, elle encourage indirectement l’immigration irrégulière : les candidats à l’immigration cherchent à éviter d’avoir à payer ces taxes et se tournent vers les filières de passeurs.
La seule disposition positive prévue pour 2011 concerne l’obligation, pour l’administration consulaire, de motiver les décisions de refus de visa. C’est une très bonne mesure. En tant que sénateur représentant les Français établis hors de France, je peux témoigner que les sollicitations à ce sujet représentent une partie importante de notre travail : même si elles sont indues, nous nous acquittons de cette tâche. Je m’interroge seulement sur la capacité des consuls à faire face à cette situation, vu l’état de dénuement dans lequel se trouvent les postes.
Deuxième choix : la « chasse aux étrangers » et l’augmentation du nombre des interpellations. Depuis 2002, les forces de l’ordre sont mobilisées pour procéder à des interpellations de masse qui visent plus particulièrement les étrangers dont on soupçonne qu’ils sont en situation irrégulière.
Cette pratique a un avantage, celui de tirer vers le haut le taux d’élucidation, car un étranger en situation irrégulière interpellé équivaut à un cas élucidé.