Intervention de Brice Hortefeux

Réunion du 29 novembre 2010 à 14h45
Loi de finances pour 2011 — Immigration asile et intégration

Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration :

Mesdames, messieurs les sénateurs, alors que nous entamons une nouvelle étape administrative, la volonté de maîtriser l’immigration est clairement réaffirmée.

Lorsque Nicolas Sarkozy a été élu Président de la République, il m’a chargé de concevoir et mettre en œuvre une nouvelle politique migratoire.

La création d’un ministère en charge de l’immigration était une véritable innovation, et ce à double titre.

En effet, d’une part, pour la première fois dans l’histoire de la Ve République, un ministère régalien de plein exercice était chargé de gérer l’ensemble du parcours d’un étranger candidat à l’immigration dans notre pays, depuis l’accueil au consulat jusqu’à l’intégration et l’éventuel accès à la nationalité française, ou le retour vers le pays d’origine.

D’autre part, il s’agissait de regrouper des administrations, des services et des prérogatives qui étaient jusque-là éclatés entre plusieurs ministères : l’intérieur, les affaires sociales ou encore les affaires étrangères. Nous avons donc bâti une administration spécialisée, légère, réactive, opérationnelle, qui était en fait une administration d’état-major.

Aujourd’hui, avec le rattachement organique des services de l’immigration au ministère de l’intérieur – j’y reviendrai tout à l’heure, monsieur Yung –, nous abordons une nouvelle étape de la politique d’immigration de ce quinquennat.

Je le dis très clairement, cette organisation ne signifie ni la disparition de la politique d’immigration que nous avons construite, ni même le dépeçage administratif et institutionnel des services. Je souhaite préciser au rapporteur François-Noël Buffet qu’il est hors de question de déconstruire ce que nous avons bâti de toutes pièces !

En réalité, c’est donc à structure et à périmètre constants que je procède à ce rattachement organique. C’est la raison pour laquelle le décret d’attribution qui a été publié vendredi dernier ne fait que fusionner le décret d’attribution du ministre de l’intérieur et celui de l’ancien ministre de l’immigration, à deux ou trois mots près, qui ne vous ont pas échappé…

La seule chose qui change, c’est qu’il y aura désormais un pilotage politique unique. Les trois principes qui guident cette politique, et que j’avais édictés dès 2007, sont donc aujourd’hui confirmés. Ils sont simples, cohérents et justes.

Premièrement, la France a le droit de choisir – comme tout pays, ni plus ni moins – qui elle veut et qui elle peut accueillir sur son territoire.

Deuxièmement, sauf cas particuliers, tout étranger en situation irrégulière a vocation à être reconduit dans son pays d’origine, de manière contrainte s’il le faut, mais autant que possible de manière volontaire. Des situations particulières – qu’elles soient politiques, religieuses, sanitaires ou sociales – peuvent naturellement se présenter, mais le principe est simple : on ne vient pas dans notre pays si l’on n’y est pas autorisé. Dans le cas contraire, on a vocation à être reconduit dans son pays d’origine.

Troisièmement, un étranger qui est accueilli légalement sur le territoire a, pour l’essentiel, les mêmes droits économiques et sociaux que les Français.

Où en sommes-nous aujourd’hui ?

Dès 2007, la politique menée par le Gouvernement pour retrouver la maîtrise des flux migratoires et favoriser l’intégration a produit des résultats. Ce que j’avais engagé a été poursuivi par Éric Besson, même s’il est vrai que des préoccupations demeurent.

En effet, chaque année, nous devons combattre l’immigration clandestine et faire reculer ceux qui en vivent ou qui l’exploitent. Cela signifie que nous devons tenir nos objectifs d’éloignement. En 2008 et 2009, nous avons dépassé ces objectifs, qui étaient de 27 000 éloignements, en en réalisant près de 30 000. Pour l’année 2010, l’objectif est de réaliser 28 000 éloignements. Sur les dix premiers mois de l’année, nous en sommes très exactement à 23 498.

Simultanément, nous menons une lutte implacable contre les passeurs, les marchands de sommeil – Catherine Troendle l’a évoquée – et les « patrons voyous » qui sont, même s’il faut faire attention aux mots, des sortes d’esclavagistes modernes, exploitant la misère humaine. C’est un combat politique, mais c’est aussi et surtout une exigence morale !

Ainsi, depuis le début de l’année, comme l’a précisé M. Buffet, ce sont 156 filières d’immigration clandestine qui ont été démantelées, contre 126 sur la même période en 2009.

Parallèlement, nous faisons des efforts pour rééquilibrer l’immigration familiale au profit de l’immigration professionnelle. Ainsi, 20 000 titres de séjour ont été délivrés pour motif professionnel en 2009. À vrai dire, ce résultat n’est pas très satisfaisant et j’aurais souhaité qu’il soit supérieur, mais la crise économique explique en partie cette évolution. Avant celle-ci, nous étions parvenus à stabiliser le nombre de titres pour motif professionnel, alors qu’il avait diminué pendant des années.

Dans le même temps, l’immigration familiale décroît. Le nombre de titres délivrés pour ce motif a été en baisse entre 2006 et 2008. Il a légèrement augmenté en 2009 puisque 82 000 titres ont été délivrés cette année-là contre 81 605 en 2008.

Sur trois ans, une tendance lourde est observée, qu’a mise en exergue par Catherine Troendle : l’augmentation de la part de l’immigration professionnelle dans l’ensemble des arrivées. Nous considérons naturellement cela comme une bonne chose.

La politique que nous mettons en œuvre repose aussi sur la coopération européenne et un partenariat renforcé avec les pays sources.

Sur le plan européen, j’avais décidé, lorsque la France a présidé pendant six mois l’Union européenne, de placer la régulation de l’immigration au cœur de mes priorités. Vous savez à quel point je me suis impliqué – je remercie ceux d’entre vous qui ont bien voulu le rappeler – dans la construction, puis la négociation d’un pacte européen sur l’immigration et l’asile, qui a été adopté à l’unanimité par tous nos partenaires, toutes tendances politiques confondues, en octobre 2008.

J’aimerais que Mme Tasca ne l’oublie pas quand elle nous dit que nous menons une politique effroyable et condamnable. En vérité, madame, la même politique est conduite à peu près partout en Europe ! Si, en vous adressant au Gouvernement, vous expliquez que la politique est abominable, j’imagine que, lorsque vous retrouvez vos amis de l’Internationale socialiste, vous les haranguez avec encore plus de véhémence, vous dénoncez violemment la politique qu’ils mènent là où ils sont au pouvoir !

Croyez-moi, quand nous discutons avec des socialistes espagnols ou des travaillistes britanniques – ils étaient au gouvernement il y a encore peu de temps –, si je peux employer une expression triviale, nous nous trouvons un peu « mous du genou » !

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