Ce projet de budget prévoit en effet une exceptionnelle progression des fonds de concours. Leur montant atteint 13, 13 millions d’euros en autorisations d’engagement et 93, 13 millions d’euros en crédits de paiement.
Les fonds de concours sont même devenus la clé de l’équilibre du financement du programme Développement et amélioration de l’offre de logement.
D’abord, ils permettent d’annuler l’écart entre les autorisations d’engagement et les crédits de paiement sur la « ligne fongible » des aides à la pierre par un apport de 80 millions d’euros en crédits de paiement.
Ensuite, ils permettent de pallier l’impossibilité dans laquelle se trouve l’ANAH, l’Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat, d’assumer la lutte contre l’habitat indigne dans le cas des travaux d’office, dont elle a pourtant, dorénavant, la charge, en reversant au budget de l’État 10 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement.
Enfin, les fonds de concours permettent d’atténuer la baisse des dépenses de fonctionnement de l’administration centrale du logement : 3, 13 millions d’euros sont prévus en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, en principe destinés à des actions de communication sur la garantie des risques locatifs, la GRL.
En matière de financement extrabudgétaire, il n’est pas inutile non plus de rappeler que les sommes nécessaires à l’ANRU, pour passer la fameuse « bosse » des années 2011 à 2014, proviennent essentiellement d’Action Logement et, peut-être, si la proposition de la commission des finances n’était pas adoptée, du monde HLM, par un prélèvement de 260 millions d’euros à cette fin.
S’agissant du principe de l’autorisation budgétaire par le Parlement et de l’association de celui-ci à la décision d’engagement de dépenses publiques, nous assistons donc à un recul.
Certains pourraient se dire que, en période de restriction budgétaire, peu importe d’où viennent les moyens pourvu qu’ils existent. Certes, mes chers collègues, mais ces pratiques sapent la confiance des acteurs de terrain de ces politiques publiques, acteurs qui ont besoin de visibilité.
Pour tout dire, mes chers collègues, quel dommage de brouiller ainsi le message de l’État alors que le programme national de rénovation urbaine, le PNRU, est plébiscité sur le terrain par les maires, quels qu’ils soient, et que, depuis deux ans, nous n’avons jamais autant financé de logements sociaux, puisque le chiffre atteint est de 120 000 par an contre 40 000 en 2002 !
La seconde observation de la commission des finances concerne la sincérité budgétaire.
Là encore, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, il existe une grande marge de progression
À cet égard, j’aurais pu choisir d’évoquer les aides personnelles au logement : nous verrons bien si les mesures d’économie que vous proposez dans ce projet de loi de finances et dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale permettront de faire face à leur évolution.
Je préfère néanmoins retenir, parmi d’autres exemples, celui, très explicite, des crédits du programme 177, Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables.
Certes, nous avons constaté la poursuite du « rebasage » à la hausse de certaines dotations, par exemple celle qui est destinée au paiement des nuitées hôtelières. Cependant, il est vrai que, l’année dernière, j’avais relevé l’irréalisme d’une dotation en baisse de plus de 40 %.
Je constate heureusement que ce projet de budget est revenu à une estimation plus sérieuse en actant un retour à un nombre de nuitées sensiblement égal à celui qui était constaté pour 2009, c’est-à-dire 13 000 nuitées, pour un coût de 62 millions d’euros.
Toutefois, qu’il s’agisse de l’hébergement d’urgence ou de l’aide alimentaire, les dépenses sont encore trop systématiquement sous-évaluées.
À cet égard, j’ai bien noté – et je m’en félicite –, que, par voie d’amendement, le Gouvernement nous propose d’augmenter de 17, 3 millions d’euros les crédits destinés aux maisons relais et à l’aide alimentaire.
En dépit de cet apport important, je ne suis pas vraiment certain que nous parviendrons à compenser la fin du plan de relance, qui avait très largement contribué, l’an passé, au financement de ces actions.
Ma seconde observation porte sur la sincérité budgétaire, qui touche le premier instrument de la politique du logement, la dépense fiscale.
Celle-ci, comme chaque année, est largement supérieure à la dépense budgétaire puisqu’elle s’élève à plus de 12 milliards d’euros, en progression de 5, 8 % par rapport à 2010.
J’ai dénombré soixante-huit dépenses fiscales rattachées à la mission, mais seules quarante font l’objet d’une estimation.
L’insuffisance quantitative de l’évaluation se double, parfois, d’approximations méthodologiques. Je l’ai constaté, par exemple, s’agissant de l’évaluation de la dépense fiscale correspondant au dégrèvement de taxe d’habitation en faveur des personnes de condition modeste relogées dans le cadre d’un projet ANRU. À mon sens, cette dépense fiscale a été très surestimée, à hauteur de 25 millions d’euros.
Si je prends l’exemple du dispositif le plus emblématique, le « Scellier », nous ne disposons pas d’élément sur la répartition géographique des bénéficiaires ou sur la nature des biens qui font l’objet de cette niche fiscale, peut-être utile mais fort coûteuse.