Ainsi, 40 % des aides publiques de l’État vont au logement locatif privé, 30 % aux propriétaires et 30 % au logement social. En d’autres termes, 70 % des investissements d’État sont orientés vers le secteur privé !
Aujourd’hui, le Gouvernement annonce comme un progrès la mise en chantier de 120 000 logements, soit 10 000 de plus que l’année précédente, alors même que, selon les chiffres du rapport de la Fondation Abbé Pierre, il faudrait construire 900 000 logements pour répondre à la demande ! Ce projet de budget entérine donc la sous-production de logements. Nous ne pouvons l’admettre.
Si les crédits du programme 177, Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables, sont globalement en augmentation, force est de constater que, comme le note très justement le rapporteur spécial de la commission des finances, « la trajectoire retenue pour les trois prochaines années est celle d’une réduction progressive des crédits budgétaires ».
Nous sommes donc agréablement surpris de l’amendement déposé par le Gouvernement, qui tend à remédier à la sous-dotation qui affectait les crédits de l’aide alimentaire, ainsi que ceux des organismes logeant les personnes défavorisées.
Le programme 109, quant à lui, est constitué par les aides au logement. Ce programme est très important puisqu’il a concerné plus de 6, 3 millions de foyers en 2009 et qu’il représente 5, 277 milliards d’euros. Ses crédits sont pourtant en baisse de 84 millions d’euros. Je rappelle que nous demandons régulièrement une revalorisation de 20 % de l’aide personnalisée au logement, l’APL, afin de rendre ce dispositif cohérent avec l’évolution du coût de la vie.
Par ailleurs, je ne peux passer sous silence le scandaleux mécanisme permettant la non-rétroactivité du versement des APL entre le moment où la demande est déposée et celui où l’APL est mise en œuvre par la caisse d’allocations familiales, mécanisme voté lors de l’examen du dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale. Une telle mesure devrait permettre de réaliser une économie de 240 millions d’euros au détriment des plus fragiles.
Selon nous, cette décision est une honte, alors même que la crise sociale et économique jette dans la précarité un nombre de familles de plus en plus important.
Les crédits de paiement du programme 135, Développement et amélioration de l’offre de logement, sont en baisse de 18 %, cette baisse atteignant même 22 % pour la seule action Construction locative et amélioration du parc. Une telle diminution est réalisée grâce à un tour de passe-passe permettant un recours plus important aux fonds de concours, lesquels deviennent la clef de voûte de ce programme.
En réalité, cet apport extrabudgétaire est une ponction réalisée sur les HLM à hauteur de 340 millions d’euros par an sur trois ans. Je parle ici du fameux article 99 du présent projet de loi de finances, qui prévoit de ponctionner les ressources des offices d’HLM à la fois pour financer l’ANRU et pour compenser la baisse des aides à la pierre.
Nous réaffirmons notre indignation et notre colère. Cette mesure, présentée comme la suppression d’une niche fiscale, est un hold-up sur les moyens du logement social. L’Union sociale pour l’habitat, l’USH, estime que, en l’état, cette taxe ferait baisser de 20 000 le nombre de logements chaque année.
Ainsi, et ce malgré la nouvelle proposition du rapporteur spécial de limiter la recette attendue de cette ponction à 150 millions d’euros, le financement des aides à la pierre serait au final assuré non plus par la solidarité nationale, mais bien par les offices et les locataires. Nous proposerons donc tout simplement la suppression de l’article 99.
Que dire également des perspectives financières pour les trois années à venir, alors que vous proposez de faire passer les crédits des aides à la pierre de 790 millions d’euros en 2008 à seulement 400 millions d’euros en 2013 ?
Ce programme se caractérise également par une diminution sévère de la subvention moyenne par logement financé par un prêt locatif à usage social – les logements PLUS –, laquelle passe de 1 000 euros à 800 euros, et par logement financé par un prêt locatif aidé d’intégration – les logements PLAI –, laquelle passe de 12 000 euros à 10 760 euros.
Ainsi, la participation de l’État aux nouvelles constructions de logements sociaux aura diminué de moitié au cours des dernières années alors que l’effort des offices d’HLM est passé, lui, de 2, 5 % à 12 %.
En poursuivant la baisse des crédits, l’État entend continuer de reporter les besoins en financements des opérations sur les autres intervenants : collectivités locales, Action Logement, organismes d’HLM. Pourtant, les collectivités sont en grande difficulté du fait de la suppression de la taxe professionnelle. Il leur sera donc difficile de maintenir un tel niveau d’effort. Et je ne parlerai même pas de l’ANRU, qui est au bord de la cessation de paiement !
La conclusion est donc sans appel : on construira moins avec moins d’argent.
Parallèlement, nous ne disposons pas d’éléments nous permettant d’apprécier l’efficacité de la dépense fiscale, qui est exorbitante, plus importante même que les crédits de la mission ! Ces exonérations atteignent 12 milliards d’euros cette année, soit une progression de 5, 8 %.
C’est dans ce contexte que Nicolas Sarkozy reformule son espoir d’une « France de propriétaires », notamment grâce à l’instauration d’un nouveau prêt à taux zéro, le PTZ +, prévue à l’article 56 du projet de loi de finances, lequel se substituera à trois outils – le PTZ, le Pass-foncier et la déduction des intérêts d’emprunt.
Ce PTZ + devrait permettre de réaliser une économie de 2, 5 milliards d’euros en 2018. Pour les membres de la majorité, c’est donc une bonne disposition. Or comment favoriser l’accession à la propriété alors que le niveau de vie est en baisse constante, que la précarité dans le travail se généralise, que l’État renonce à la maîtrise foncière afin de limiter la spéculation qui se développe ?
À qui profitera donc ce PTZ +, si ce n’est aux banques, qui se sont déjà honteusement gavées durant la crise ?