Intervention de Richard Yung

Réunion du 15 janvier 2008 à 16h15
Ratification d'une ordonnance portant réforme de la filiation — Adoption d'un projet de loi

Photo de Richard YungRichard Yung :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le texte que nous examinons actuellement est un projet de loi de ratification de l'ordonnance du 4 juillet 2005 portant réforme de la filiation et modifiant ou abrogeant diverses dispositions relatives à la filiation.

Une première remarque vient aussitôt à l'esprit : pourquoi avoir procédé par voie d'ordonnance ? C'est un débat ancien, puisqu'il remonte à trois ans, mais avouez que la technique est assez curieuse, sur un sujet aussi fondamental touchant la société, qui mérite un débat approfondi, dans le pays et devant le Parlement. Il fallait que cette remarque soit faite pour l'avenir.

Vous avez rappelé, monsieur le rapporteur, que la ratification de cette ordonnance, à l'exception d'une disposition relative à la dévolution du nom de famille, a déjà été votée par le Parlement lors de l'examen du texte qui est devenu la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs. Malheureusement - ou plutôt, heureusement ! -, l'article qui procédait à cette ratification a été censuré par le Conseil constitutionnel, au motif qu'il constituait un « cavalier ». Au fond, cette censure nous permet d'avoir un débat, même court, et c'est une bonne chose !

Il est nécessaire de faire évoluer le droit de la filiation et de la famille pour qu'il suive et encadre la vie de la société. La conception de la famille et la définition des relations en son sein figurent parmi les aspects de notre vie sociale qui se sont le plus transformés au cours des cinquante dernières années.

Si je me reporte à ma jeunesse, il y a cinquante ans, dans mon petit village de Touraine, un enfant né hors mariage était montré du doigt, une femme qui avait eu un enfant hors mariage était ostracisée. On ne parlait de ces choses-là qu'à voix basse : une sorte d'opprobre social couvrait toutes ces questions. Une grande variété de douleurs en a résulté pendant de longues années.

Les choses ont évolué, d'abord lentement, puis plus rapidement, avec l'interruption volontaire de grossesse, la création du pacte civil de solidarité, la conception pour autrui - même si elle est interdite en France -, les tests ADN, etc. En même temps, la famille est restée une valeur centrale de notre société, peut-être la plus fondamentale, même après l'évolution des moeurs et des mentalités qui a suivi mai 68.

Dans notre société qui vit en partie dans la crainte - en particulier pour les jeunes générations -, dans notre société de plus en plus individualiste, orientée vers le résultat et le profit, la famille reste l'élément central autour duquel se retrouvent notamment les enfants. Le tête-à-tête entre les parents et les enfants est devenu aujourd'hui une relation curieusement inversée : ce sont les parents qui aident leurs enfants, même majeurs.

Nous devons trouver le bon équilibre entre cette évolution extrêmement rapide des moeurs et de la conception des liens du couple et l'importance centrale qui reste attachée au mariage. Le Parisien libéré de ce matin nous annonce que le nombre de naissances en France n'a jamais été aussi élevé : on a encore enregistré près de 820 000 naissances en 2007. Mais l'article ajoute que, pour la première fois, le nombre d'enfants nés dans les liens du mariage est inférieur à celui des enfants nés hors mariage, ces enfants qu'on appelait autrefois les « enfants du péché »...

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