L’article 13 tient une place centrale dans le projet de loi portant réforme de la représentation devant les cours d’appel.
Madame la ministre d’État, pourquoi, en fin de compte, avons-nous choisi la procédure de l’expropriation, dont nous voyons les inconvénients, notamment sa lenteur, alors que, incontestablement, le recours à une commission ad hoc paraît tout à fait adapté, à l’instar de ce qui a été institué dans des situations comparables, en particulier lors de la suppression du monopole des commissaires-priseurs ?
Ce qui nous sépare, c’est que vous envisagez une indemnisation à 100 % pour le seul préjudice causé par la perte du droit de présentation, alors que nous vous avons longuement expliqué qu’il convenait de prendre également en compte le préjudice de carrière, le cas échéant, ainsi que le préjudice économique et les préjudices accessoires, qui ont été objectivement reconnus.
La commission que vous souhaitez mettre en place devrait avoir la possibilité de moduler l’indemnisation en fonction de l’ampleur du préjudice. Pour l’avoué qui part à la retraite, le préjudice de carrière est nul, et le préjudice économique, s’il existe, minime. En revanche, l’avoué débutant ou en milieu de carrière deviendra avocat, certes, mais un avocat sans clients ; il devra, du jour au lendemain, recommencer une carrière de zéro. Je rappelle que le préjudice de carrière a toujours été indemnisé.
C’est l’unique point qui nous différencie, madame la ministre d’État. Nous avons opté, pour notre part, pour l’intervention du juge de l’expropriation, car il est certain qu’il tiendra compte de toutes les causes de préjudice, comme le souhaitent les auteurs des amendements n° 1 rectifié et 45 rectifié.
Nous pourrions être d’accord sur le principe de la commission que vous envisagez de créer, à condition qu’elle ne se limite pas à l’indemnisation de la perte du droit de présentation. La position de la commission des lois à cet égard est claire et ferme. Les amendements qui vont dans ce sens sont cohérents.
Votre amendement n° 50 rectifié, monsieur Mézard, pourrait s’inscrire dans la démarche de modulation de la commission des lois, puisque vous proposez une majoration de l’indemnité à hauteur de 20 % de la valeur de l’office. Cependant, à trop vouloir préciser, nous risquerions d’omettre certains éléments.
En tout état de cause, la navette permettra d’approfondir la réflexion.
Je reconnais, madame la ministre d’État, qu’en portant l’indemnisation à 100 %, vous avez amélioré le texte initial, qui était compliqué, totalement insuffisant et susceptible d’être frappé d’inconstitutionnalité. Cette mesure représente un progrès considérable. Son financement par une « taxe de postulation », si je puis dire, perçue sur une certaine période, permettrait une indemnisation convenable des avoués. Nous ferions œuvre de justice en adoptant un tel dispositif, sans compter que nous serions insoupçonnables devant la Cour européenne des droits de l’homme. Au vu de son arrêt Lallement du 12 juin 2003 et de l’article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme relatif au droit de propriété, il y aurait un risque à ne pas indemniser correctement des professionnels qui ne sont pour rien dans cette réforme.
Telle est la synthèse de la position que la commission a adoptée à la suite d’un travail très approfondi, vous en conviendrez, monsieur Godefroy.