Intervention de Gérard Longuet

Réunion du 26 juin 2008 à 9h30
Droit d'accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires publiques — Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de Gérard LonguetGérard Longuet, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mesdames, messieurs les sénateurs, la commission des finances, dont j’ai l’honneur de vous présenter l’avis sur ce projet de loi, ne s’est pas exprimée sur le fond, souscrivant dans sa majorité à la quasi-totalité des conclusions de notre excellent rapporteur, Philippe Richert. Elle s’est demandé si ce texte avait des conséquences sur les finances publiques de l’État et des collectivités locales. Nous disposons d’une expérimentation, un dispositif d’accueil ayant déjà fonctionné à trois reprises, les 24 janvier, 15 et 22 mai derniers.

Le 22 mai, à peine 3 000 communes ont organisé un système d’accueil ayant bénéficié à une population globale représentant entre 2 millions et 2, 5 millions de nos compatriotes. Statistiquement, cette expérimentation a permis de toucher, en moyenne, un Français sur trente. C’est à la fois significatif du point de vue du fonctionnement du dispositif et très insuffisant par rapport aux besoins de l’ensemble des familles françaises.

En termes de finances publiques, l’équilibre du projet de loi paraît pertinent. Comme Philippe Richert l’a indiqué, les conséquences financières de la mise en œuvre du dispositif envisagé sont réelles, car l’accueil n’est pas assuré par les mêmes personnels que pour l’enseignement.

Il s’agit donc d’assurer un droit d’accueil et non une continuité de l’enseignement. Seules sont visées les écoles maternelles et primaires parce que, vous le savez, mes chers collègues, dans les collèges et dans les lycées, l’enseignement est dispensé par une multiplicité d’enseignants. Le chef d’établissement – principal de collège ou proviseur de lycée – a les moyens d’organiser l’accueil des élèves, les enseignants n’étant pas tous statistiquement en grève au même moment. Il lui appartient de faire en sorte que les élèves soient accueillis dans le cadre, soit de cours en horaires décalés, soit de permanences. Tel n’est pas le cas des écoles maternelles et primaires, où l’enseignant unique place l’élève dans la situation binaire d’avoir ou de ne pas avoir un interlocuteur en face de lui. C’est une raison supplémentaire, d’ordre financier, qui justifie la mise en place du dispositif qui nous est soumis.

De plus, le seuil de déclenchement prévu par le projet de loi, que notre débat conduira peut-être à modifier, est fixé à 10 % de grévistes. C’est intéressant pour les écoles maternelles et primaires, notamment en milieu rural, qui souvent ont moins de dix classes. Se pose la question de la libre organisation communale et de la libre coopération intercommunale pour faire face aux problèmes de la taille des écoles, du nombre d’enseignants concernés et de la prise en compte du seuil de déclenchement.

Je ne reviendrai pas sur les modalités qui ont été évoquées par Philippe Richert. La mise en œuvre du dispositif est prévisible. En effet, le projet de loi prévoit une déclaration d’intention de grève dans les quarante-huit heures précédant le mouvement, un seuil du déclenchement et, point très important, la responsabilité de la commune ou de l’intercommunalité pour ce qui concerne les modalités d’organisation de l’accueil. Il s’agit de l’application du principe constitutionnel de libre administration des communes et, surtout, d’une simple question de bon sens, tant le système des écoles maternelles et primaires est diversifié, pour des raisons démographiques.

Avant d’entrer dans le vif du sujet du financement, je rappelle tout d’abord pour le plaisir de l’érudition juridique que l’enseignement public scolaire est laïc, gratuit et obligatoire et que la présence scolaire, c’est la forme quasi-universelle de l’instruction, mais elle n’est pas la seule forme.

L’État est astreint à une obligation non pas d’accueil, mais d’enseignement. C’est donc une nouvelle compétence que le projet de loi tend à créer. Dans les relations entre l’État et les collectivités locales, l’accueil des enfants en période de grève constitue non pas un transfert de compétence, mais une nouvelle compétence. L’État entend faire assumer l’accueil par les collectivités locales, qui ont la responsabilité de l’organisation pratique de l’enseignement primaire.

Selon l’article 72-2 de la Constitution, modifié en 2003, l’État doit mettre à leur disposition des moyens déterminés par la loi pour assurer cette prestation nouvelle. Encore faut-il que la loi fixe des ressources qui soient suffisantes dans le cadre de la libre administration des communes. Je rappelle que, aux termes de la décision du Conseil constitutionnel du 13 janvier 2005, la commune doit garder une maîtrise dans l’organisation et l’adaptation d’une obligation nationale.

En ce qui concerne les relations entre l’État et les communes, monsieur le ministre, il conviendra de trouver le point d’équilibre le plus juste entre la liberté communale et la participation de l’État.

La commission des finances a déposé un amendement, en apparence sémantique, mais qui va au-delà, consistant à remplacer le mot « contribution », certes sympathique, par le mot « compensation », plus rassurant pour les collectivités locales.

Les impôts, qui sont des contributions républicaines volontaires, représentent un effort national. Une longue expérience républicaine de plus de deux siècles a amené la commission des finances à préférer une compensation à une contribution.

Monsieur le ministre, si les communes ont la liberté d’organisation, vous faites des propositions très attractives. Vous suggérez que les locaux scolaires soient mis à disposition pour assurer l’accueil, sans que cela soit obligatoire. De ce fait, les communes pourront tenir compte des réalités locales et rechercher le système le mieux adapté. Ainsi seront respectées à la fois l’obligation d’accueil et la liberté d’organisation des communes, qui ont la responsabilité d’assurer cet accueil.

Quant au respect de l’équilibre financier des dépenses communales, la première expérimentation qui a été menée n’est pas totalement concluante.

Monsieur le ministre, vous avez accueilli favorablement la proposition de M. Carle, ce dont la commission des finances se réjouit. Il y a des effets d’échelle à prendre en compte pour les petites communes, le coût des élèves accueillis n’étant pas strictement proportionnel au nombre total d’élèves pouvant être accueillis.

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