Intervention de Brigitte Gonthier-Maurin

Réunion du 26 juin 2008 à 9h30
Droit d'accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires publiques — Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de Brigitte Gonthier-MaurinBrigitte Gonthier-Maurin :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous entamons une nouvelle fois l’examen d’un texte couvert par l’urgence. Il serait plus juste de parler de précipitation.

Il suffit de voir, pour s’en convaincre, le nombre d’amendements de détail – vingt-sept ! – déposés par votre majorité pour « tenter de limiter la casse » et de rendre ce texte présentable, notamment auprès des maires, et ce après le travail pourtant louable effectué par M. le rapporteur.

De la même façon, ce « droit d’accueil », présenté comme une avancée pour les familles, et mis en place si précipitamment, ne s’appliquerait pas, semble-t-il, dans nos départements et territoires d’outre-mer. Est-ce à dire que ce que vous jugez bon pour les familles et les écoliers de métropole ne le serait pas pour ceux de l’outre-mer ?

Il s’agit bien de précipitation lorsque le Président de la République annonce, le 15 mai, le dépôt avant l’été de ce projet de loi. Au même moment, des milliers d’enseignants, de lycéens et de parents d’élèves manifestaient une nouvelle fois contre votre politique de casse du service public de l’éducation.

Cette décision a été prise alors même que les deux expérimentations du « service minimum d’accueil », réalisées sur la base du volontariat des communes, ont été des échecs : 2 023 communes volontaires, le 24 janvier, et 2 837 communes, le 15 mai, sur les 22 500 communes qui comptent des écoles sur leur territoire.

Par ailleurs, cette décision a été prise sans aucune concertation préalable avec les organisations syndicales, auxquelles vous promettiez pourtant depuis un an une négociation. En guise de négociation, elle se sont vu présenter un projet de loi déjà ficelé depuis le 4 juin lors d’un comité technique paritaire ministériel qui a tourné court.

Alors, autant de précipitation, pour quoi faire ?

Ce texte est dangereux pour trois raisons au moins.

Tout d’abord, il instaure, à côté de l’obligation et de la gratuité scolaires, un prétendu droit d’accueil mettant sur le même plan la continuité de l’enseignement et ce qui sera une garderie.

Ensuite, ce texte restreint le droit de grève des enseignants du premier degré.

Enfin, il porte gravement atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales.

Prendre la responsabilité d’introduire dans le code de l’éducation, à côté de l’obligation scolaire et de la gratuité, fondements de notre service public de l’enseignement, ce type de droit d’accueil, constitue une véritable régression. En effet, le droit d’accueil existe déjà de fait, la loi faisant obligation à toute école ouverte d’accueillir les élèves qui s’y présentent. C’est bien pour cette raison que l’usage, en cas de grève, veut depuis toujours que les enseignants avertissent les parents à l’avance, afin de s’assurer qu’aucun élève ne sera laissé sur le trottoir.

Avec ce nouveau « droit d’accueil », vous prétendez garantir aux parents la continuité du service public de l’enseignement. Vous vous appuyez sur l’aspiration bien légitime des parents à vouloir bénéficier de cette continuité et vous prétendez respecter ainsi leur droit au travail : un comble, quand le Gouvernement, dans le même temps, organise la dégradation des droits et des garanties au travail !

Mais peut-être conviendrait-il de s’interroger sur les cas dans lesquels cette continuité n’est plus assurée.

En cas de grève ? Dans le primaire, on ne comptabilise pas plus de trois jours de grève par an, en moyenne, depuis 2000. N’est-ce pas plutôt pour les cas de non-remplacement des maîtres absents que se pose véritablement un problème ? En tout état de cause, c’est sur ce sujet que les parents d’élèves alertent de plus en plus souvent les inspecteurs de l’éducation nationale.

Comment, en effet, ne pas s’inquiéter de la dégradation des conditions de remplacement, liée, notamment, aux suppressions de postes ?

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