Intervention de Brigitte Gonthier-Maurin

Réunion du 26 juin 2008 à 9h30
Droit d'accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires publiques — Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de Brigitte Gonthier-MaurinBrigitte Gonthier-Maurin :

Bien que vous vous abritiez derrière la décision du Conseil constitutionnel du 16 août 2007 concernant les transports, nous pensons que, avec cet article 3, il y a bien atteinte à l’exercice du droit de grève des enseignants du premier degré.

Ce projet de loi tend à créer une procédure « d’alerte sociale ». Ce pourrait être une bonne nouvelle, tant sont ignorées les revendications des organisations syndicales, notamment sur les suppressions de postes et la réforme des programmes. En réalité, ce processus de négociation préalable, qui n’impose aucune obligation de résultat à l’État en termes de prise en compte des revendications, va conduire à un allongement du temps nécessaire pour le dépôt d’un préavis de grève : onze jours.

L’obligation faite ensuite à toute personne exerçant des fonctions d’enseignements de se déclarer nominativement gréviste au moins quarante-huit heures avant une grève ne constitue pas non plus une avancée démocratique. Elle revient même à ignorer l’usage qui est en vigueur dans le premier degré puisque les enseignants informent toujours les parents au moins trois jours à l’avance de leur intention de faire grève.

Je résume : aux onze jours nécessaires pour le dépôt d’un préavis s’ajoutent les cinq jours francs obligatoires entre le dépôt de ce préavis et la grève.

Les enseignants ne pratiquent pas de grèves sauvages et se mobilisent toujours pour défendre une qualité d’enseignement au service de tous les élèves. Votre objectif, monsieur le ministre, est, en réalité, de décourager les enseignants de faire grève en alourdissant la procédure et en accentuant la pression.

C’est tout le sens de l’article 5 de ce projet de loi, qui tend à inverser la procédure de déclaration de grève. Jusqu’à présent, la loi exige des enseignants qu’ils informent le directeur de leur école et les parents de leur intention de faire grève. C’est ensuite à l’inspecteur de l’éducation nationale de leur circonscription de constater l’état de grève. Désormais, aux termes de l’article 5, « toute personne exerçant des fonctions d’enseignement dans une école maternelle ou élémentaire publique » devra informer « l’autorité administrative, au moins quarante-huit heures avant de participer à la grève, de son intention d’y prendre part ».

Cela posera un problème, car informer son autorité administrative de son intention de prendre part à la grève, cela ne veut pas dire faire effectivement grève. En revanche, c’est être déclaré comme gréviste auprès de l’inspecteur de l’éducation nationale dont on dépend. N’est-ce pas là une façon de mettre dans la loi une pratique de plus en plus usitée consistant à opérer systématiquement, en cas de grève, des retenues sur salaire, à charge pour les non-grévistes de prouver qu’ils étaient bien au travail ?

Les maires connaissent le haut niveau de conscience professionnelle des enseignants de leur commune, ces mêmes maires à qui vous voulez imposer la responsabilité de gérer les conséquences des conflits sociaux avec vos fonctionnaires.

Quid, par ailleurs, du droit de grève des agents territoriaux, qui vont se voir proposer d’endosser la casquette de briseurs de grève ?

Les expérimentations l’ont montré : les maires, de droite comme de gauche, ne veulent pas que ce service leur soit imposé. À Saint-Quentin, dans l’Aisne, commune dont M. Xavier Bertrand, grand militant du service minimum, est maire-adjoint, le maire ne pas l’a pas organisé.

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