Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, puisque nous allons très bientôt entrer dans le détail des différentes dispositions du texte, je reviendrai simplement sur quelques points qui ont été évoqués par les orateurs, que je remercie de leurs interventions, et rectifier quelques affirmations qui ne correspondent pas complètement à la réalité.
Tout d’abord, plusieurs sénateurs et sénatrices de gauche ont laissé entendre qu’il existait, derrière ce texte instituant un droit d’accueil, une volonté d’imposer aux communes l’obligation de se substituer au service d’enseignement qu’assure l’État. Je leur réponds clairement qu’il n’en est rien. Il s’agit, très précisément, d’accueillir les enfants lorsque, un jour de grève, les enseignements ne sont pas assurés. Ce service pourrait aussi être imaginé dans le cas où un enseignant absent ne peut pas être remplacé et où il est impossible d’accueillir les élèves dans d’autres classes.
Autrement dit, il s’agit d’accueillir, d’encadrer et de surveiller, mais nullement de se substituer, d’une manière ou d’une autre, à des obligations d’enseignement.
Ensuite, en ce qui concerne la question du financement de ce service, M. Collombat a rappelé la faiblesse du potentiel financier des communes. Nous ne souhaitons évidemment pas leur imposer cette dépense nouvelle et nous envisageons le principe du versement d’une contribution par l'État, qui prendra d’ailleurs plutôt la forme d’une compensation, comme l’a suggéré M. Longuet, avec l’instauration d’un minimum.
Madame Gourault, vous avez posé la question de savoir s’il fallait légiférer, en passer par ce texte ? Je crois que c’était nécessaire. Un tel dispositif a déjà été mis en place, en effet, par un certain nombre de communes, mais selon des modalités très diverses. C’est une question d’équité que de faire en sorte que, partout sur le territoire, les familles puissent trouver les mêmes services.
Au demeurant, j’ai entendu votre message, ainsi que celui de Mme Dini, et je partage votre souci d’introduire de la souplesse dans le dispositif et d’éviter d’imposer des normes excessives. Nous avons pris beaucoup de précautions avec ce texte qui, bien que normatif, puisqu’il s’agit d’une loi, vise essentiellement l’équité et nullement la contrainte.
Certains sénateurs du groupe socialiste et du groupe communiste républicain et citoyen ont mis en cause l’intention même de ce projet de loi. Ils l’ont présenté comme un texte démagogique, élaboré par calcul, avec la volonté de monter les parents contre les enseignants. Ils nous ont en fin de compte suspectés d’utiliser cette loi pour servir d’autres buts que celui qu’elle vise vraiment, c'est-à-dire un service rendu aux familles. Il ne s’agit évidemment pas de cela ! Ce texte résulte simplement d’un constat que j’ai eu l’occasion de faire moi-même lors d’un déplacement, en janvier dernier, dans des communes qui avaient mis en place ce service d’accueil : le droit de grève gêne le droit de travailler, en particulier celui des mères de famille ou des familles modestes, qui ont besoin de faire garder leurs enfants.
La combinaison de ces deux droits mérite que le législateur s’en occupe. Tel est le sens du présent texte.
Je veux souligner que cette volonté législative ne dissimule aucune intention maligne d’opposer les familles aux enseignants. Bien au contraire, sachant que les familles reprochent précisément aux enseignants grévistes de leur compliquer la vie, le dispositif proposé constitue le meilleur système pour mettre fin à un tel conflit.
Madame Gonthier-Maurin, le texte ne prévoit pas que les collectivités d’outre-mer soient exclues du bénéfice de ce dispositif. En vertu du principe d’identité législative, l’ensemble de ces collectivités est concerné par le texte.
S’agissant du remplacement d’un enseignant absent, j’ai personnellement souhaité que nous rappelions dans le texte, alors que ce n’était pas son objet principal, que l’État donne l’exemple et s’oblige à trouver des solutions de remplacement plus efficaces afin d’éviter ces successions de journées sans cours que M. Bodin a évoquées. Pour permettre d’assurer la continuité du service public, j’ai donc décidé de proposer une réorganisation du remplacement, en émettant le vœu que le dispositif trouve une application rapide, sachant qu’il faut néanmoins procéder avec prudence, compte tenu de la complexité de sa mise en place.
D’autres sujets ont été effleurés au cours de cette discussion générale, qui ne constituent pas directement le « cœur de cible » du projet de loi, en particulier la question des suppressions d’emploi ou celle de la carte scolaire.
Tout d’abord, je suis extrêmement surpris d’entendre même des orateurs bien informés continuer à dire que le texte cache une quelconque pénurie. Je rappelle que le premier degré ne subit aucune suppression d’emploi. Bien au contraire, dès la rentrée prochaine, 840 emplois supplémentaires seront affectés aux écoles de France, qui ne sont pas touchées par les ajustements budgétaires et les décisions de non-renouvellement de postes.
C’est pourquoi il ne me paraît pas convenable d’invoquer cet argument dans le cadre de la présente la discussion législative.
Ensuite, concernant la carte scolaire, madame Gourault, je persiste à penser que son assouplissement doit permettre à des élèves assignés à résidence dans des quartiers difficiles de tenter leur chance dans d’autres conditions. C’est un service que nous rendons aux familles, en nous fondant sur des critères sociaux, que j’ai moi-même fixés. Il ne s’agit pas d’inciter les bons élèves à fuir. Il s’agit de permettre aux élèves méritants, qui sont titulaires de bourses sociales, qui sont handicapés ou dont les familles connaissent des difficultés particulières, de bénéficier de ce droit nouveau.
Vous avez raison d’évoquer cette question, car elle reflète l’intention constante, chez le législateur comme au sein du Gouvernement, de donner des droits supplémentaires aux familles : le droit de choisir son école, le droit de faire garder son enfant, le droit de bénéficier de la continuité des enseignements.
Telles sont bien les intentions qui inspirent le présent projet de loi, à l’exclusion de toute querelle cachée ou de la création d’une source supplémentaire de conflictualité.