Intervention de Ivan Renar

Réunion du 26 juin 2008 à 9h30
Droit d'accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires publiques — Question préalable

Photo de Ivan RenarIvan Renar :

Après le paquet constitutionnel sur le droit de grève, l’égalité des fonctionnaires, la libre administration des collectivités locales et leur financement pour toute compétence nouvelle, nous considérons, et c’est la deuxième raison de notre question préalable, qu’il n’y a pas lieu de légiférer en ce domaine, et encore moins de cette façon.

Cette nouvelle restriction du droit de grève, la deuxième en moins d’un an, est inquiétante pour tous les salariés de notre pays, qu’ils relèvent du secteur public ou du secteur privé. La grève venant, par définition, perturber un service, une fabrication, il se trouvera toujours de bonnes raisons, ou de bons esprits, pour tenter d’en réduire le droit. Personne n’est à l’abri de nouvelles restrictions !

Mais, par-delà le droit de grève, ce projet est aussi très dangereux pour notre système éducatif. En effet, sous couvert de création d’un service d’accueil à l’occasion de grèves qualifiées d’« importantes » dans l’exposé des motifs du projet de loi, et sous le prétexte de mouvements de grève, vous signez la fin des remplacements des enseignants absents dans les écoles maternelles et élémentaires.

Le danger est bien là, même si, dans le projet initial, la formulation était suffisamment large et peu explicite pour passer sans encombre l’avis du Haut Conseil de l’éducation et du Conseil supérieur de l’éducation.

La commission a déposé un amendement dans lequel elle formule explicitement cet objectif. Ainsi, sous couvert d’un faux argument sur les difficultés, certes réelles, des parents les rares jours de grève, vous réduisez vos responsabilités éducatives. Après le savoir minimum, avec le socle commun de la réforme Fillon, voici le service minimum de garderie, organisée par l’éducation nationale. Vous mettez donc, dans le code de l’éducation, la garderie scolaire au même niveau que les principes de l’éducation nationale que sont l’obligation scolaire et la gratuité.

M. le rapporteur écrit même, dans son rapport que – je résume –, derrière la notion d’obligation scolaire, l’obligation d’accueil serait concomitante à l’élément éducatif, dans l’attente des parents. Dès lors, la puissance publique organisatrice du service d’enseignement devrait prendre cette évolution en compte. C’est grave !

Si ce texte était adopté en l’état, les enseignants pourraient, aux termes du code de l’éducation, ne plus être remplacés. Ainsi, le Gouvernement n’aura-t-il plus l’obligation de prévoir les effectifs de remplacement nécessaires à la continuité du service public d’éducation.

M. le rapporteur propose de supprimer l’obligation de remplacement des maîtres, considérant que, devant les difficultés d’y parvenir, l’accueil est aujourd’hui devenu essentiel.

Il y a là une dérive difficilement acceptable. Elle laisse penser que l’enseignement serait devenu accessoire. C’est la conception même de l’école et de l’instruction publique qui est en jeu.

Rien dans l’exposé des motifs de ce projet de loi ne laissait présager que l’accueil scolaire serait organisé pour pallier l’absence des enseignants, quelle qu’en soit la cause. Certes, la deuxième phrase de l’article L. 133-1 du code de l’éducation, créé par l’article 2 de ce projet de loi, était suffisamment floue pour permettre une interprétation imprécise de la loi. Je remercie le rapporteur d’en expliciter le contenu. Mais le projet de loi prend dès lors une tout autre direction, une tout autre ampleur, une tout autre signification. Il doit donc être réécrit afin de mettre en cohérence son intitulé, ses objectifs, ses motivations et sa rédaction. C’est la troisième raison de notre question préalable, d’autant que la preuve est maintenant faite que ce projet ne répond pas à l’obligation de clarté et d’intelligibilité de la loi.

Enfin, d’autres points contenus dans ce texte manquent pour le moins de précision et les amendements proposés par la commission viennent souvent en brouiller un peu plus la compréhension.

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