Intervention de Michel Sergent

Réunion du 7 décembre 2007 à 9h30
Loi de finances pour 2008 — Sport jeunesse et vie associative

Photo de Michel SergentMichel Sergent, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, comme l'an dernier, je commencerai mon intervention en saluant l'efficacité du ministère de la santé, de la jeunesse et des sports qui, une nouvelle fois, a répondu avant la date limite du 10 octobre à l'intégralité de mon questionnaire budgétaire. Les réponses qu'il m'a fournies étaient du reste d'une qualité satisfaisante.

Je serai un peu plus circonspect s'agissant de l'examen au fond du sujet, c'est-à-dire des crédits qui nous sont présentés.

Ceux-ci sont en baisse, ce qui peut paraître paradoxal quand on se souvient des fortes déclarations qu'avait faites sur le budget du sport, durant la campagne électorale, le candidat qui fut ensuite élu à la présidence de la République.

Surtout, nous le verrons, les baisses ne concernent pas les dépenses de structure, mais bien les crédits d'intervention inscrits à la mission, et ce pour des raisons peu satisfaisantes.

Je vais me montrer un peu plus précis en entrant dans le détail des programmes.

À périmètre constant, avant la seconde délibération de l'Assemblée nationale, qui n'a que modérément changé la donne, les crédits du programme « Sport » baissent de 24, 6 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 17 millions d'euros en crédits de paiement, soit une diminution respectivement de 11, 6 % et de 7, 6 % par rapport à 2007.

Certes, cette baisse doit être, en quelque sorte, compensée par l'augmentation concomitante des moyens du Centre national de développement du sport, le CNDS, dont le budget devrait passer de 236 millions d'euros à 266 millions d'euros en 2008.

Néanmoins, je ferai deux observations.

Premièrement, le budget du CNDS dépend, par construction, de l'évolution des recettes de la Française des Jeux, d'une part, et d'une fraction du produit des droits télévisés des événements sportifs, d'autre part. Or il s'agit de deux recettes à l'évolution incertaine en raison de la prochaine ouverture à la concurrence du secteur des jeux et de la renégociation des droits télévisuels du championnat de France de football.

Deuxièmement, le CNDS, qui est certes appelé à financer des opérations visant à développer le « sport pour tous », peut se substituer au budget de l'État, mais les « coupes » concerneront aussi d'autres domaines, comme les aides aux fédérations, qui ne relèvent pas du champ du CNDS.

Certains acteurs du monde sportif risquent ainsi de faire face à des difficultés financières, notamment les « petites » fédérations, l'adjectif n'ayant évidemment rien ici de péjoratif.

Il est à craindre que la baisse de ces crédits utiles soit liée à la nécessité de financer deux dépenses d'un montant peut-être plus élevé que ce que l'État avait initialement envisagé : la rénovation de l'Institut national du sport et de l'éducation physique, l'INSEP, et le remboursement à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l'ACOSS, de l'exonération des « droits à l'image collectifs » des sportifs professionnels.

S'agissant de l'INSEP, comme je l'ai déjà indiqué lors de l'examen de la loi du 31 juillet 2007 de règlement du budget de l'année 2006, les autorisations d'engagement affectées à la partie « nord » - les équipements extra-sportifs -, qui fait l'objet d'un partenariat public-privé, sont passées de 60 millions à 88 millions d'euros, soit une hausse de près de 50 %.

Quant à la partie « sud » du site - équipements sportifs -, qui relève uniquement de l'État, il apparaît que les autorisations d'engagement correspondantes ont été réévaluées de 13, 8 millions d'euros par rapport à un engagement de départ de 55, 2 millions d'euros. Il est vraiment nécessaire que le coût de la rénovation de l'INSEP, par ailleurs nécessaire, soit enfin maîtrisé.

Au sujet des droits à l'image, dont de nombreux orateurs risquent de reparler, je suis en train de mener un contrôle budgétaire dont je ne veux pas préjuger le résultat. Le monde du sport professionnel - clubs et ligues - a déjà pu me dire à quel point ce dispositif lui semblait indispensable dans un contexte de concurrence exacerbé depuis l'arrêt Bosman. J'observe simplement que le coût du dispositif paraît dériver : après 15 millions d'euros inscrits en loi de finances pour 2007 - qui devraient, en fait, approcher 30 millions d'euros en exécution -, l'inscription en projet de loi de finances pour 2008 s'élève à 32 millions d'euros - plus de 15 % des crédits de paiement du programme « Sport ». Les clubs sportifs étant, en pratique, ordonnateurs de cette dépense publique non plafonnée, celle-ci n'est pas contrôlable ni même visible pour l'État payeur.

On pourrait m'objecter que la progression des salaires engendre par ailleurs des rentrées supplémentaires de cotisations sociales.

Néanmoins, je ne peux que constater que, si des recettes existent, elles n'ont pas d'impact sur le budget du sport qui, lui, supporte les dépenses. Cette situation ne peut, à mon sens, perdurer bien longtemps.

Enfin, mais j'y reviendrai plus en détail lors de la discussion des amendements, je vous proposerai de tirer les conséquences de l'actuelle meilleure santé financière du consortium Stade de France, qui diminue le coût financier pour l'État de la pénalité pour absence de club résident.

Le programme « Jeunesse et vie associative » subit, lui aussi, une baisse de crédits, non compensée, elle, par le CNDS : si, à périmètre constant, les autorisations d'engagement sont stables, les crédits de paiement baissent d'environ 4 millions d'euros, soit près de 3 %.

Et, là aussi, ce qui est touché, ce n'est pas la structure, ce sont les crédits d'intervention.

Subissent particulièrement les effets de la rigueur au sein de l'action n° 3, les associations nationales agréées, dont les subventions directes diminueraient de 1, 8 million d'euros - soit une baisse de 14, 4 % -, et les crédits à la disposition des services déconcentrés pour le soutien aux politiques locales de la jeunesse dans le cadre des actions partenariales locales, dont les crédits seraient réduits de 800 000 euros, soit une baisse de 23, 8 %.

Subit également ces effets dans une moindre mesure, au sein de l'action n° 2, le dispositif « Envie d'agir ! », destiné à soutenir les jeunes, notamment ceux des quartiers en difficulté, qui veulent réaliser un projet, souvent à caractère professionnel : les crédits dévolus à cette action diminueraient de 400 000 euros, c'est-à-dire de 5, 4 %.

C'est pourquoi l'amendement que je proposerai tendra à compenser exactement ces baisses envisagées et, à mon sens, peu opportunes.

Enfin, le programme soutien intitulé « Conduite et pilotage de la politique du sport, de la jeunesse et de la vie associative » regroupe 443 millions d'euros de crédits de paiement, soit environ 57 % des crédits de paiement de la mission. Il regroupe également la totalité des emplois de la mission, soit, pour 2008, 7 044 équivalents temps plein travaillé.

Comme je l'ai déjà dit, et même si cette centralisation peut présenter certains avantages en termes de gestion, ce format est, en soi, un problème : les gestionnaires des deux autres programmes ne disposent pas de l'ensemble des moyens nécessaires à l'accomplissement de leurs objectifs.

Ce programme interdit toute comptabilité analytique des coûts pourtant prévue par la LOLF.

Je ferai deux autres remarques avant de conclure.

L'évolution des crédits de personnel - titre 2 - me paraît paradoxale : ils augmentent de 8, 7 millions d'euros - soit une hausse de 2, 3 % -, alors même que le plafond d'emplois diminue de 248 équivalents temps plein par rapport au plafond ministériel pour 2007, plus d'ailleurs en raison de changements de périmètre - 188 équivalents temps plein - que pour des gains de productivité - 60 équivalents temps plein. Monsieur le secrétaire d'État, pourriez-vous nous éclairer à ce sujet ?

Dans ce contexte, la création de cinq emplois d'inspecteur général de la jeunesse et des sports, seule création en 2008, m'étonne.

L'argumentation avancée pour justifier ces créations ne me convainc pas, car les missions évoquées - audits, révisions générales des politiques publiques et contrôle interne au titre de la LOLF - relèvent de la responsabilité de l'administration centrale et non de l'inspection générale.

Par ailleurs, les dépenses d'immobilier passent de 12, 6 millions d'euros à 27 millions d'euros. À ce sujet, monsieur le secrétaire d'État, vos services m'ont fait valoir qu'en 2008 les crédits demandés intégraient des crédits inscrits sur une autre ligne budgétaire en 2007. Espérons que, cette fois, « le compte est bon » et que ce poste ne causera plus de surprise à l'avenir.

Néanmoins, et sous le bénéfice de l'ensemble de ces observations, je vous inviterai, mes chers collègues, au nom de la commission des finances, à adopter les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », modifiés par un amendement que je vous présenterai.

De même, je suis favorable à l'adoption des trois articles rattachés à la mission introduits par l'Assemblée nationale.

L'article 51 ter vise à étendre aux nouveaux médias la contribution de 5 % prélevée en faveur du CNDS sur les droits de diffusion des événements sportifs, dite « taxe Buffet ». Il s'agit d'une harmonisation logique et bienvenue du droit, qui a d'ailleurs été adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale. Cependant, sa mise en oeuvre dès le 1er janvier pourrait poser problème à la ligue et aux clubs, dont les budgets couvrent des saisons. Il vous appartiendra, monsieur le secrétaire d'État, d'essayer de régler ce problème avec vos services.

L'article 51 quater tend à ce que le Gouvernement présente un rapport sur l'efficience de l'exonération dont bénéficient les sportifs professionnels au titre de leur « droit à l'image collectif ». Travaillant moi-même sur ce sujet, j'aurais mauvaise grâce à m'opposer à cette nécessaire évaluation.

Enfin, l'article 51 quinquies vise à ce que le Gouvernement dépose un autre rapport sur les résultats, l'actualisation et l'exploitation du recensement des équipements sportifs.

Telles sont, madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, les observations que je souhaitais formuler.

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