Monsieur le secrétaire d'État, je voudrais revenir sur ce que vous avez déclaré ce matin.
Selon vous, le Grand huit est un projet essentiel en ce qu’il permettra de désenclaver les territoires en difficulté de la République, ces territoires qui souffrent d’avoir été abandonnés pendant trop longtemps.
Je m’intéresse trop à cette question pour ne pas être sensible à vos arguments, tant il est vrai que certains territoires subissent une réelle mise à l’écart des réseaux de transports. Cette relégation relève d’une longue histoire, que vous avez partiellement restituée.
Cependant, je peine à comprendre comment, en connaissant le dossier, vous pouvez affirmer que les projets Arc Express et Grand huit sont interchangeables. Rien n’est moins vrai. Apparemment, la partie nord d’Arc Express serait parallèle au tracé du Grand huit, mais ce dernier s’écarte des zones denses, et donc des populations qui ont les plus grands besoins, pour rejoindre Roissy, tandis qu’Arc Express reste au cœur de la Seine-Saint-Denis et vise à relier entre elles toutes les terminaisons des lignes de métro. Cette interconnexion est d’autant plus nécessaire qu’elle permettra de désengorger ces lignes. À cet instant, je tiens à faire miennes les observations de M. Caffet sur l’absence de carte un tant soit peu précise dans les documents qui nous ont été fournis : dans un dossier d’une telle ampleur, c’est tout simplement incroyable !
Il est souvent question de la ligne A du RER. Pour ma part, je voudrais évoquer la ligne 13 du métro, qui est parvenue à saturation et dont le désengorgement est impératif. Or Arc Express peut y pourvoir. Il s’agit là d’une priorité qui ne saurait attendre.
Vous nous dites, monsieur le secrétaire d'État, que le Val-de-Marne sera probablement prioritaire pour le tracé, au grand bonheur des élus de ce département. Mais je doute que les communes de Saint-Mandé, de Saint-Maur ou de Vincennes, pourtant les premières concernées, appartiennent aux « territoires perdus » de la République… J’aimerais que les situations difficiles vécues par les habitants des territoires enclavés ne servent pas de prétextes pour justifier certains choix. Je ne suis pas personnellement opposée à ce que le Val-de-Marne soit privilégié, car des besoins existent dans ce département, mais, dans ce cas, n’instrumentalisez pas les populations reléguées : trouvez des arguments plus convaincants !
Plus généralement, je trouve curieux que vous vous fassiez le défenseur de ces populations quand, dans le même temps, vous refusez à M. Dallier des éclaircissements pourtant élémentaires sur la situation du logement. Les populations défavorisées risquent d’être les premières à pâtir d’une hausse des prix de l’immobilier si rien n’est fait pour les en protéger : c’est, en substance, la crainte que nous partageons avec M. Dallier. Puisque vous ne pouvez pas lui donner quelques assurances en matière de logement, gardez-vous de vous poser en héraut des populations fragiles de notre République !
Par ailleurs, on nous affirme, depuis le début, que les travaux doivent être effectués le plus rapidement possible. Monsieur le secrétaire d’État, la région achèvera Arc Express en 2017, et vous nous avez confirmé que votre métro en boucle entrerait en fonction dans treize ans, soit en 2023. Si urgence il y a, alors il n’y a guère de doute sur le projet à privilégier : vous avez beau avoir raccourci le débat public, il n’en demeure pas moins que vous êtes en retard sur la région.
Au lieu de chercher à concurrencer un exécutif qui a été reconduit plus que brillamment, cherchez au contraire à collaborer avec lui : c’est le bon sens même ! Comment voulez-vous instaurer un climat de confiance en passant en force et en interrompant le débat public ? Si vous voulez faire œuvre utile, alors joignez les deux tronçons d’Arc Express. La région, pour l’heure, n’y a pas pourvu, et sera sans doute ravie que vous la secondiez. La concertation implique le respect des partenaires, un dialogue loyal suppose de tenir compte du travail accompli. Ne soyez pas hégémonique, nous avons tous à y perdre !
Monsieur le secrétaire d’État, vous cherchez à vous faire l’avocat de certains quartiers construits dans l’urgence et la précipitation. On sait quels résultats donne cette méthode. Essayons d’apprendre de nos erreurs afin d’éviter de les reproduire, et surtout conjuguons nos efforts. Je vous invite donc, à ce stade, à montrer que vous tendez vraiment la main.