En février 2002, dans son rapport sur la gestion du risque AT-MP, la Cour des comptes, sans complaisance à l'égard de l'action des régimes de sécurité sociale en faveur de la prévention des risques d'origine professionnelle, soulignait le manque d'effectivité de la surveillance postprofessionnelle des salariés ayant été exposés à un risque susceptible d'entraîner une affection liée à l'amiante.
En outre, malgré l'extension, depuis 1996, du dispositif aux affections causées par des agents cancérigènes et en dépit des précisions apportées sur les conditions de sa mise en oeuvre, la Cour notait que le nombre des personnes suivies demeurait extrêmement faible.
L'utilité d'une telle surveillance médicale en termes de santé, de prévention, de réparation et d'amélioration de la connaissance ne fait pas débat.
Dans ce cas, pourquoi, trois ans plus tard, un autre rapport, en l'occurrence celui de la mission commune d'information du Sénat sur le bilan et les conséquences de la contamination par l'amiante, dresse-t-il le même constat, celui d'une application difficile et déficiente de ce dispositif de surveillance ?
Le cadre juridique est-il opérant ? Les moyens de la CNAMTS sont-ils en jeu ? Est-ce une question de méthode ou d'outils ? N'est-ce pas tout simplement l'absence de réelle volonté des pouvoirs publics ? C'est, je crois, la somme de ces facteurs.
Certes, les textes instituent au profit des salariés exposés dans le cadre de leur carrière professionnelle le droit à une surveillance médicale postprofessionnelle. Il reste que l'effectivité de ce dernier dépend largement de la connaissance que peuvent en avoir les bénéficiaires potentiels, mais aussi du bon vouloir des employeurs, puisque ce sont eux qui délivrent l'attestation d'exposition, préalable nécessaire à la mise en place du dispositif.
Les auditions menées par la mission d'information ont permis d'établir que nombreux sont les employeurs qui violent leurs obligations légales. Nous nous sommes accordés sur la nécessité de sanctionner les employeurs refusant de signer cette déclaration d'exposition. Monsieur le ministre, souscrivez-vous à cette proposition ? Si tel est le cas, comment comptez-vous faire appliquer la législation avec aussi peu d'inspecteurs du travail ?
S'agissant du travail d'information à réaliser en direction des salariés afin de leur faire connaître leur droit au suivi médical, là encore, la mission d'information convient qu'un effort doit être fait, sans pour autant préconiser de solutions. Concernant le protocole de surveillance postprofessionnelle, l'attentisme l'emporte également, au motif que n'a pas été évaluée l'expérimentation en cours depuis deux ans dans trois régions en vue d'améliorer la procédure de suivi.
Pourtant, depuis la publication en septembre 2005 d'un premier rapport sur le fonctionnement expérimental SPP amiante, des résultats médicaux préliminaires ont été obtenus.
Plusieurs enseignements peuvent déjà être tirés.
En premier lieu, deux méthodes de sollicitation des anciens salariés sont probantes, qu'il s'agisse de la sollicitation médiatique ou de la sollicitation active par envoi personnalisé et individuel de courriers à des retraités récents.
En second lieu, l'étude démontre « la meilleure sensibilité de l'imagerie par tomodensitométrie thoracique dans le dépistage des anomalies considérées comme les plus spécifiquement liées à une exposition à l'amiante ».
Monsieur le ministre, pourquoi ne pas généraliser dès à présent cette expérimentation ? Pourquoi ne pas inclure le dépistage par l'examen au scanner dans le dispositif de surveillance postprofessionnelle amiante ?
Sur cette question du suivi postprofessionnel, un représentant syndical a souhaité, devant la mission d'information, « ne pas retrouver la torpeur de l'Etat et des pouvoirs publics des cent dernières années ».
Nous considérons effectivement qu'il est de votre responsabilité d'agir et, surtout, de ne plus attendre. C'est le sens de notre amendement, qui renforce sur le plan législatif le dispositif de suivi, lui donne toute sa portée, en posant que toute personne qui, au cours de son activité professionnelle, a été exposée au risque amiante est informée par sa caisse primaire d'assurance maladie de son droit à bénéficier gratuitement d'une surveillance médicale postprofessionnelle comprenant notamment un dépistage par un examen au scanner.
Par souci d'efficacité, nous avons accepté en commission des affaires sociales de préciser la rédaction de notre amendement et d'élargir le dispositif aux examens médicaux complémentaires appropriés.