Intervention de Nicole Bricq

Réunion du 27 juin 2006 à 16h20
Règlement définitif du budget de 2005 — Discussion d'un projet de loi

Photo de Nicole BricqNicole Bricq :

Je reviens sur l'insincérité budgétaire.

Selon la Cour des comptes, bien que l'hypothèse de croissance du PIB de 2, 5 % retenue en loi de finances initiale n'ait pas été, loin s'en faut, réalisée, puisqu'elle a été finalement de 1, 2 %, l'équilibre des recettes pour 2005 n'en a pas été pour autant bouleversé. La Cour démontre ainsi que la prévision du taux de croissance des recettes fiscales de 2005 était appliquée à la base de 2004, elle-même fortement sous-estimée.

De plus, la création par la loi de finances rectificative d'un nouvel acompte d'impôt sur les sociétés versé en décembre a apporté une recette supplémentaire de 2, 3 milliards d'euros.

Ainsi, comme le disaient les Romains, « la pièce est dite » ! Le niveau des recettes est proche de celui qui était prévu par la loi de finances initiale, malgré des baisses d'impôts massives. La conséquence relevée par la Cour des comptes - ce qui m'apparaît comme le plus important -, c'est la déconnexion entre la dette de l'État et le solde budgétaire, déconnexion qui en dit long sur le sérieux du plan quinquennal de réduction de la dette qui nous a été présenté la semaine dernière par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

En vérité, le bilan de la législature est mauvais : le poids de la dette s'est accru de plus de dix points par rapport au PIB ; les dépenses publiques ont augmenté de 2, 3 points de PIB ; les prélèvements obligatoires ont crû d'un point de PIB ; la France est en déficit excessif chronique et sa croissance est en moyenne, depuis 2002, de 1, 4 % par an. Les finances traduisent les mauvais résultats économiques.

J'ajoute que le déficit du commerce extérieur a triplé entre 2004 et 2005. Les causes n'en sont pas seulement conjoncturelles : importations et prix du pétrole ; elles témoignent, plus largement, de la faiblesse structurelle de notre appareil productif.

Devant un tel panorama, il ne faut pas s'étonner que le pays ne soit pas porté à un optimisme serein.

De ce constat, je veux tirer des enseignements. À ce titre, je reviendrai sur deux paramètres essentiels pour nos finances : la croissance et la dette.

S'agissant de la croissance, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie s'est réjoui, la semaine dernière, devant notre assemblée, qu'elle ait atteint 0, 54% au cours du premier trimestre. Or il faut se méfier de l'utilisation d'un chiffre pour bâtir une hypothèse budgétaire compte tenu de ce que nous avons constaté dans le budget de 2005, pour lequel l'hypothèse la moins crédible avait été retenue. Nous avions auditionné en commission des finances l'ensemble des économistes libéraux et keynésiens, qui nous avaient tous dit, sans exception, que la croissance n'atteindrait pas 2, 5 %.

Pour autant, pourrait-on se passer de la référence à la croissance pour établir un budget ? Certainement pas, car le PIB reste l'indicateur qui nous permet d'établir des comparaisons internationales. Nous savons bien que, même avec une croissance potentielle de 2, 25 %, la France ne dégage pas de marges de manoeuvre qui lui permettent de remédier à ses faiblesses structurelles, et notamment de réarmer son appareil productif dans le jeu mondial. De la même manière, cette croissance ne permet pas, autrement que par le biais démographique, de créer suffisamment d'emplois dans le secteur privé.

En réalité, nous avons besoin d'objectifs clairs et non démagogiques d'amélioration des perspectives de la croissance à moyen terme. À cet égard, le budget, année après année, au moyen de la LOLF, devrait traduire la progression vers ces objectifs sur un temps forcément long. C'est cela qu'il faut faire, plutôt que de chercher à instrumentaliser des chiffres ponctuels de croissance.

J'en viens maintenant à la dette : elle est très clairement l'ennemie de gauche.

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