Cependant, s’ils sont bien formés à leur discipline, les enseignants ne le sont pas suffisamment à leur métier, même si l’instauration de stages d’accueil et la création de masters en alternance y contribuent.
En matière de rémunération, les efforts sont réels. Nous nous félicitons, monsieur le ministre, de l’augmentation, que vous avez annoncée le 24 novembre dernier, du salaire des jeunes enseignants, à hauteur de 2 000 euros pour un temps plein. Cet effort sans précédent, consenti de surcroît dans un contexte budgétaire très contraint, représente une augmentation de 5 % par rapport à la rentrée 2011 et de 18 % par rapport à 2007 !
J’ajoute que le non-remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux a permis d’augmenter la rémunération des enseignants en début de carrière. La France est le seul pays à le faire, au moment même où ses voisins, par exemple l’Espagne, réduisent le salaire des enseignants tout en leur demandant de travailler quelques heures de plus par semaine…
Ainsi, beaucoup est fait pour soutenir et accompagner ceux qui se consacrent avec dévouement à ce beau métier.
Dans le même ordre d’idées, monsieur le ministre, il me paraît important de donner aux jeunes enseignants les moyens d’entrer dans la carrière le plus sereinement possible. Ils doivent pouvoir acquérir de l’expérience avant d’être nommés à des postes dans des établissements plus difficiles. Tout le monde y gagnera, à commencer par les élèves qui, parce qu’ils rencontrent des difficultés de nature à compromettre leur parcours scolaire, ont besoin d’un encadrement expérimenté propre à leur fournir tout le soutien nécessaire.
C’est donc dans l’intérêt de l’ensemble des acteurs du système éducatif que nous devons réformer la politique d’affectation actuelle : à mon sens, elle ne permet pas de tirer le meilleur profit des compétences de chacun.
Par ailleurs, il ne faut pas oublier que les collectivités locales interviennent financièrement dans la politique de l’éducation. Or nous savons que ce qui est imposé est souvent mal compris et inefficace sur le terrain. La mission commune d’information sur l’organisation territoriale du système scolaire et sur l’évaluation des expérimentations locales en matière d’éducation, dont j’ai eu l’honneur d’être le rapporteur, a pu s’en rendre compte !
C’est pourquoi je suis attaché à l’idée de partenariat et convaincu que le recours aux contrats entre les élus locaux, les parents et le monde socioprofessionnel est un vecteur d’avancées essentielles. Je le dis au vu de la réussite d’initiatives locales qui illustrent les vertus de cette méthode. Selon moi, nous devrions les étudier avec intérêt : je pense, par exemple, aux expérimentations conduites par M. Dubois dans la Somme et par M. Jardel dans votre propre région, monsieur le ministre.
Je souhaite enfin attirer votre attention sur l’accompagnement scolaire des enfants âgés de trois à six ans. C’est au cours de cette période de la vie que l’enfant se construit et acquiert le socle de connaissances indispensable à son épanouissement.
Je tiens à rendre hommage au travail accompli par les enseignants des écoles maternelles ; la réussite de nos enfants dépend de leur engagement.
Cette tranche d’âge est particulièrement sensible, et nous devons la considérer à la hauteur de l’importance qu’elle représente dans la vie.
C’est pourquoi je suis favorable au travail qui est engagé vers un repérage précoce des difficultés scolaires, n’en déplaise aux bien-pensants qui y voient un nouveau sujet de polémique stérile en parlant d’évaluation, de test, alors qu’il n’est aucunement question de cela, comme vous l’avez souvent rappelé, monsieur le ministre.
Je suis favorable à cette démarche, car je suis convaincu que c’est en identifiant le plus tôt possible les difficultés d’un enfant que le système éducatif pourra lui apporter le soutien et l’accompagnement nécessaires lui permettant de dépasser ses faiblesses du moment et de préparer sa réussite de demain.
Monsieur le ministre, ce budget témoigne, dans un contexte de crise, de votre volonté de donner à nos enfants le meilleur investissement qui soit : celui du savoir. D’ailleurs, ce n’est pas moi qui le dis, mais Socrate, qui, voilà vingt-cinq siècles, déclarait : « Le savoir est la seule matière qui s’accroît quand on la partage. » Il est de notre devoir de réussir un meilleur partage de ce savoir.
Pour conclure, permettez-moi de suggérer trois pistes afin d’améliorer un système qui peine à réduire les inégalités scolaires, conséquences trop souvent d’inégalités sociales.
Tout d’abord, le politique doit prendre toute sa place. Le Parlement ne doit plus se satisfaire d’un rôle contemplatif sur un budget véritable « boîte noire » décryptable par les seuls initiés. Beaucoup de ceux que nous avons auditionnés nous l’ont dit.
Ensuite, les priorités actuelles ne sont plus celles des années cinquante. Les affectations et le statut des enseignants devront s’inscrire dans cette réalité.
Enfin, seule une politique intégrant et responsabilisant la famille, l’école et la ville permettra de réduire ces inégalités.
Quant à la méthode, monsieur le ministre, elle est évidente : le contrat vaut toujours mieux que la circulaire. Passons de compétences aujourd’hui encore trop séparées à des compétences véritablement partagées, parce que nos enfants le valent bien.