Intervention de Pierre Bernard-Reymond

Réunion du 23 novembre 2011 à 9h30
Loi de finances pour 2012 — Article 30 et participation de la france au budget de l'union européenne

Photo de Pierre Bernard-ReymondPierre Bernard-Reymond :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les ressources propres ne représentent que 14 % des recettes totales du budget de l’Union européenne, tandis que les deux contributions directes des États, l’une étant fondée sur la TVA et l’autre sur le revenu national brut, en représentent 86 %.

Cette dérive par rapport aux règles fixées en 1970, selon lesquelles l’essentiel des ressources de l’Union européenne doit provenir de ressources propres, constitue une véritable renationalisation des recettes du budget communautaire.

De mon point de vue, cette renationalisation entraîne deux inconvénients : d'une part, l’extrême complexité du dispositif, et, d’autre part, la généralisation de réflexes nationaux conduisant à oublier – Jean Arthuis l’a rappelé tout à l'heure – que l’intérêt de participer à l’Union ne réside pas uniquement dans un calcul budgétaire, et donc à raisonner en termes de juste retour. C’est cette logique qui a conduit à accorder un rabais au Royaume-Uni puis à consentir des rabais sur le rabais à d’autres pays contributeurs nets.

Tout le monde constate que le système actuel a atteint ses limites, mais tout le monde semble s’en satisfaire. On se contente, par des retouches successives, d’ajouter de la complexité à la complexité.

À la suite d’un accord entre les deux branches de l’autorité budgétaire, il a été décidé de revoir cette question dans le cadre des négociations sur les perspectives financières 2014-2020.

La Commission européenne, consciente de la nécessité d’une remise à plat, a formulé des propositions, qu’elle vient d'ailleurs de préciser.

La principale proposition est la création de deux nouvelles ressources propres : d'une part, une partie du produit de la TVA – je rappelle que l’assiette est aujourd'hui utilisée pour calculer une contribution nationale – serait affectée au budget de l’Union européenne ; d’autre part, la fameuse taxe sur les transactions financières, la TTF, serait créée, les deux tiers de son produit étant directement versés au budget de l’Union européenne.

Malheureusement, le Royaume-Uni et la Suède viennent de s’opposer de façon assez catégorique à cette dernière proposition. En revanche, la France et l’Allemagne, ainsi que le Parlement européen, y sont favorables. Notre assemblée s’est elle aussi prononcée en ce sens, par un vote qui a réuni des élus de la majorité et de l’opposition. En effet, cette taxe qui, dans l’idéal, devrait s’appliquer à l’ensemble des États du monde pourrait à la rigueur n’être qu’européenne, voire, au minimum, se limiter aux pays membres de l’Eurogroupe.

Si ces deux nouvelles ressources étaient créées, le pourcentage des ressources propres dans le budget de l’Union européenne passerait de 14 % à 60 %. De mon point de vue, cela constituerait un progrès considérable vers une gouvernance plus intégrée de l’Union. Qui plus est, chaque État retrouverait – j’y insiste – davantage de marges de manœuvre pour son budget national, ce qui, dans les circonstances actuelles, n’est pas négligeable.

Par ailleurs, la Commission européenne propose une réforme radicale des rabais : ceux-ci seraient forfaitisés et leur réévaluation serait interdite. Cette simplification considérable va dans le bon sens.

Monsieur le ministre, dans quel état d’esprit le Gouvernement abordera-t-il cette question ? Que pense-t-il des propositions de la Commission européenne ? Est-il d’accord pour augmenter sensiblement les ressources propres du budget de l’Union européenne – sans pour autant augmenter le budget lui-même ? Approuve-t-il la création des deux nouvelles ressources propres proposées par la Commission européenne ?

Ne faudrait-il pas suggérer la création d’autres ressources, comme, par exemple, un impôt sur les sociétés, des accises sur les carburants, le tabac, l’alcool ou l’énergie, ou encore des ressources fondées sur les quotas de CO2 – ces différentes ressources ont été envisagées puis abandonnées –, voire une taxe sur le commerce des armes ?

Cette réforme peut très bien être intégrée aux réformes institutionnelles qu’induira nécessairement le bilan de la crise actuelle. J’espère que le Gouvernement français jouera, une fois encore, un rôle moteur dans cette nécessaire évolution.

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