Cet amendement vise à remédier au préjudice financier injustement subi par le salarié faisant l’objet d’une déclaration d’inaptitude consécutive à une maladie ou à un accident non professionnel.
En effet, l’intéressé ne peut bénéficier, durant toute la durée de cette procédure, ni de sa rémunération ni de ses indemnités pour maladie.
Comme vous le savez, l’interruption du versement des indemnités journalières prononcée par la caisse d’assurance maladie, conformément à l’avis de son médecin conseil estimant que l’état de santé du salarié est consolidé, peut aller de pair avec la décision du médecin du travail d’engager une procédure d’inaptitude, procédure dont la durée peut s’étendre jusqu’à six ou sept semaines, durant lesquelles le salarié se retrouve privé de ressources.
Pendant cette période, en effet, l’intéressé ne perçoit pas d’indemnités journalières puisqu’il n’est plus considéré comme étant en arrêt maladie.
Du fait de l’inexécution de sa prestation de travail, il ne reçoit pas non plus de salaire, une jurisprudence constante de la Cour de cassation établissant que la rémunération ne doit reprendre qu’à l’expiration du délai d’un mois à compter de la date du second examen médical à l’issue duquel le médecin du travail a confirmé l’inaptitude du salarié à réintégrer son précédent poste. Un délai d’un mois est alors laissé à l’employeur pour étudier les possibilités de reclassement du salarié au sein de l’entreprise ou procéder à son licenciement.
Cette situation est d’autant plus pénalisante que, selon les données du rapport Gosselin intitulé Aptitude et inaptitude médicale au travail : diagnostic et perspectives et publié en janvier 2007, les ouvriers sont surreprésentés parmi les salariés déclarés inaptes, notamment ceux du secteur du bâtiment et des travaux publics.
Ce problème n’est pas nouveau et il a déjà été pris en considération, s’agissant des victimes d’accidents du travail et de maladies professionnelles, les AT–MP, dans la loi du 17 décembre 2008 de financement de la sécurité sociale pour 2009. Le texte a en effet repris un point de l’accord conclu entre les partenaires sociaux le 25 avril 2007 relatif à l’amélioration de la prévention, de la tarification et de la réparation des AT–MP, qui recommandait de mettre en place un revenu de remplacement entre la date de reconnaissance de l’inaptitude de la victime d’un AT–MP et la date de la mise en œuvre de la décision de l’employeur concerné de la reclasser ou de la licencier.
Ainsi, l’article 100 de cette loi prévoit que, pendant cette période, qui ne peut excéder trente jours, la victime continue à bénéficier des indemnités journalières qu’elle percevait durant son arrêt de travail.
Nous considérons qu’il est juste d’étendre ces dispositions aux victimes d’une maladie ou d’un accident dont l’origine n’est pas professionnelle. Ce faisant, nous rejoignons une proposition de réforme faite par l’ancien Médiateur de la République, désormais Défenseur des droits.
Il nous semble en effet invraisemblable de laisser sans ressources des personnes que leur maladie ou les séquelles d’un accident empêchent de reprendre leur emploi, les mettant ainsi dans une situation financière compliquée.
Nous avons tous un jour reçu dans nos permanences le témoignage de salariés qui, à la suite d’un accident de voiture ou d’une maladie invalidante, ne peuvent reprendre leur travail, se retrouvent pendant des semaines sans ressources et ne peuvent plus payer leur loyer ou rembourser un crédit.
Voilà pourquoi nous proposons, par cet amendement, que, pendant cette période qui ne peut excéder trente jours, le salarié continue à bénéficier des indemnités journalières qu’il percevait durant son arrêt de travail.
Sur le plan financier, l’amendement prévoit de mettre cette indemnisation à la charge des employeurs ou d’un fonds de mutualisation inspiré de celui qu’a créé la loi n° 2008–596 du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail pour assurer le versement des indemnités dues aux salariés licenciés pour cause d’inaptitude consécutive à un accident ou une maladie d’origine professionnelle.
Approvisionné par des contributions des employeurs, ce fonds aurait ainsi pour vocation de verser les indemnités journalières pour le compte des employeurs qui auraient souscrit auprès de lui cette garantie.
À dire vrai, nous préférerions que le financement de cette mesure soit équitablement partagé entre l’assurance maladie et les employeurs. Étant donné que nous parlons bien d’accident et de maladie dont l’origine n’est pas professionnelle, il n’y a pas de raison que les employeurs supportent seuls cette charge. Mais les règles de l’article 40 de la Constitution nous empêchent de le faire, sous peine d’irrecevabilité. C’est pourquoi nous faisons appel au Gouvernement, qui lui seul a le pouvoir de proposer le partage de cette prise en charge.