Puis la commission a entendu M. Serge Lagauche, rapporteur pour avis, sur les crédits du programme « Création » de la mission « Culture » du projet de loi de finances pour 2010 et sur le secteur du cinéma.
a tout d'abord présenté les crédits et actions principales relevant du programme « Création » de la mission « Culture » :
- les crédits, dépenses de personnels s'établiront à 823,3 millions d'euros en autorisations d'engagement de programme (AE) et à 825,1 millions d'euros en crédits de paiement (CP). Néanmoins, compte tenu de l'inflation, la hausse de 2 % des crédits de paiement correspond à une stagnation ;
- il faut saluer la pérennisation de ressources qui étaient extra budgétaires l'an dernier, au bénéfice, notamment du financement du spectacle vivant, à hauteur de 15 millions d'euros ;
- compte tenu des redéploiements internes, les différents secteurs bénéficieront des moyens nouveaux suivants, hors dépenses de personnels : le spectacle vivant à hauteur de 2,6 millions d'euros (+ 0,4 %), les arts plastiques pour 3,2 millions (+ 5,9 %) et le livre et la lecture à concurrence de 0,2 million (+ 1,5 %), le soutien aux industries culturelles baissant fortement (- 9,08 %).
Après avoir renvoyé à son rapport écrit pour ce qui concerne l'évolution des indicateurs et la réforme du ministère, le rapporteur pour avis a signalé la création d'une direction générale de la création artistique remplaçant la direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles (DMDTS), qui sera aussi responsable du soutien à la création et de l'animation des réseaux de diffusion.
La stagnation des crédits consacrés au spectacle vivant recouvre une hausse de 5 millions d'euros (soit + 2 %) des crédits destinés aux opérateurs de l'Etat, qui concentrent 44 % des crédits. 82 % de cette somme sont destinés à l'Opéra national de Paris et aux caisses de retraites de l'Opéra et de la Comédie française. Dans le même temps, les crédits des autres institutions, qui sont situées à 85 % en région, stagneront.
La forte diminution des autorisations d'engagement (- 15,96 %) s'explique par l'ouverture exceptionnelle, en 2009, de celles allouées à la Philharmonie de Paris (à hauteur de près de 140 millions d'euros), qui n'ont pas lieu d'être reconduites. Si l'on exclut cette opération exceptionnelle, le budget est stabilisé par rapport à 2009.
Tout en comprenant l'intérêt de créer cet équipement afin de rivaliser avec les plus grandes salles mondiales et de créer ainsi un pôle musical très fort au nord-est de Paris, M. Serge Lagauche, rapporteur pour avis, s'est inquiété du fait que les grands projets parisiens concentrent une part essentielle des moyens budgétaires.
Par ailleurs, il a renvoyé à son rapport écrit pour le bilan des « Entretiens de Valois », qui se sont conclus le 2 juillet 2009, avec six mois de retard par rapport au calendrier prévu.
Après avoir constaté une certaine lassitude chez les professionnels, qui craignent que ces réflexions ne se traduisent pas par des avancées concrètes, le rapporteur pour avis a indiqué que trois axes de réforme seraient engagés :
- les conférences du spectacle vivant, qui permettront d'instaurer, dans chaque région, un nouveau mode de coopération entre les acteurs des politiques publiques ;
- la redéfinition des critères d'intervention de l'Etat, qui débouchera sur des cahiers des charges réécrits pour les établissements labellisés et un cadrage plus précis des missions de ces établissements ;
- une approche plus volontaire des questions liées à l'emploi, partagée par l'ensemble des collectivités publiques.
a relevé ensuite la forte hausse des crédits de paiement de près de 6 %, les autorisations d'engagement n'augmentant en revanche que de 1,64 %. Ces crédits nouveaux bénéficieront quasi-exclusivement à deux projets : la consolidation de l'établissement public « Sèvres Cité de la céramique » et le Palais de Tokyo. En revanche, la quasi-totalité des institutions et initiatives sur le territoire verront leurs moyens stagner.
Il a indiqué que les crédits consacrés au livre et à la lecture seraient stables en 2010, à 13,76 millions d'euros de crédits de paiement (+ 1,55 %). Pour ce qui concerne les bibliothèques, la dotation devrait diminuer en euros constants ce qu'il a déploré, au moment où l'enquête décennale sur les pratiques culturelles des Français montre que les relations des Français avec le monde du livre se sont distendues et alors que les bibliothèques ont connu un léger tassement de leur fréquentation. En revanche, il a approuvé le lancement d'une nouvelle politique d'expérimentation de l'extension des horaires d'ouverture des bibliothèques municipales, tout en s'inquiétant de son impact, à terme, sur les budgets des communes.
Enfin, il a précisé que les crédits consacrés aux industries culturelles baisseront de plus de 9 %, hors dépenses de personnels. Mais ceci s'explique en grande partie par la réévaluation du budget de la Haute autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur Internet (HADOPI). En effet, alors que 6,7 millions d'euros étaient alloués à la Haute autorité, en 2009, 5,3 millions d'euros seulement sont nécessaires pour 2010 en raison du recadrage de ses missions.
Puis, M. Serge Lagauche, rapporteur pour avis, a fait part de ses réflexions sur le cinéma : le secteur de la production cinématographique est aujourd'hui florissant. En 2008, on dénombrait 240 films et un niveau record d'investissements (+ 24,1 %). En revanche, le secteur de l'exploitation est préoccupant, car la hausse de 7,2 % des entrées entre septembre 2008 et septembre 2009 recouvre des évolutions très divergentes selon la nature des exploitations. Alors que la fréquentation augmente dans les grandes exploitations, notamment dans les centres urbains, la moyenne et la petite exploitation souffrent d'un très sévère tassement de leur fréquentation, de respectivement - 4,3 % et - 10,5 %. Il proposera un amendement visant à améliorer le dispositif permettant aux communes de les exonérer totalement ou partiellement de taxe professionnelle.
Le rapporteur pour avis a ensuite renvoyé à son rapport écrit pour les développements relatifs à l'évolution des différentes sources de financement du cinéma ainsi que pour ce qui concerne les ordonnances du 24 juillet et du 6 novembre 2009, par lesquelles le Gouvernement a modifié le code du cinéma, comme l'y a autorisé la loi du 5 mars 2009 relative à la liberté de communication et au nouveau service public de télévision.
Puis, le rapporteur pour avis a fait part de ses conclusions relatives à la politique du livre :
- les moyens de Centre national du livre doivent être renforcés pour lui permettre d'assumer ses nouvelles fonctions. A cette fin, une modification de l'assiette de la taxe relative aux appareils de reprographie, de reproduction et d'impression, est nécessaire ; elle inclurait les consommables de ce type de matériels et diminuerait le taux (1,35 %). Cet ajustement est nécessaire, compte tenu du caractère prioritaire des actions à engager, notamment en faveur des librairies et du livre numérique ;
- la proposition de loi que M. Hervé Gaymard présentera prochainement à l'Assemblée nationale afin d'exempter la filière du livre du plafonnement des délais de paiement doit être soutenue. En effet, l'ensemble de la chaîne du livre, jusqu'aux imprimeurs, serait menacée en cas d'application des délais de paiement de droit commun prévus par la loi de modernisation de l'économie (LME) ;
- il serait souhaitable que les communes et départements puissent allouer des aides directes aux librairies, sous forme de subventions ou d'avances remboursables, sans qu'une convention avec la région ait été nécessairement et préalablement passée ;
- s'agissant du livre numérique, il est impératif de susciter une approche européenne, qui s'inscrive dans une politique globale de long terme et qui intègre des problématiques culturelles, économiques et d'aménagement du territoire.
s'est ensuite déclaré préoccupé par la dégradation du marché de la musique. C'est pourquoi il lui paraît nécessaire de proroger le crédit d'impôt en faveur de la production phonographique pour quatre nouvelles années, couvrant la période 2010-2013.
S'agissant de l'emploi culturel, après avoir évoqué le régime d'assurance chômage des artistes et techniciens, il a salué l'accord cadre de développement de l'emploi et des compétences dans le spectacle vivant (ADEC), signé le 10 mars 2009 entre la branche du spectacle vivant et l'Etat.
Faisant un point sur la signature des conventions collectives et accords interbranches, il a relevé des avancées réelles. Dans le secteur du spectacle vivant et enregistré, le travail de restructuration du champ conventionnel n'a encore que partiellement réussi à encadrer le recours au contrat à durée déterminée d'usage ; en revanche, il a significativement renforcé les garanties dont disposent les salariés du secteur en termes de couverture conventionnelle.
a cependant souhaité solliciter l'attention du ministre sur la question de l'intermittence dans le cinéma et l'audiovisuel, car la convention collective dans ce domaine n'a toujours pas abouti. Il a insisté sur la nécessité de sortir de cette situation afin d'instaurer la sécurité juridique dont tous ont besoin dans ce secteur. A cette fin, les parties pourraient s'accorder sur des critères permettant de qualifier un film de « fragile » et sur les modalités de contrôle du recours à cette notion. Pour autant, il a estimé que les salariés concernés ne devraient pas faire office de « variable d'ajustement ». Il apparaîtrait légitime que l'effort soit équitablement réparti entre tous les acteurs qui concourent à la production du film.
Enfin, le rapporteur pour avis a évoqué les problèmes de numérisation, tant des oeuvres cinématographiques que des salles.
Compte tenu de la nécessité d'améliorer l'offre légale de contenus culturels dans les meilleurs délais et sur l'ensemble des supports de diffusion, il a rappelé sa question posée au Gouvernement, le 3 novembre 2009, relative à la numérisation des oeuvres cinématographiques et audiovisuelles.
Pour ce qui concerne la numérisation des salles, il a jugé urgent de lancer le fonds de mutualisation qui sera géré par le CNC. En effet, le développement d'un réseau à deux vitesses entraînerait une marginalisation puis une disparition des petites salles non numérisées ainsi que des effets pervers sur la programmation, la distribution et la diversité des films en salles.
a proposé d'interroger le ministre sur la coordination des interventions du CNC et des initiatives déjà lancées par des entreprises privées, afin que chacun puisse occuper sa place légitime ainsi que sur le calendrier de mise en oeuvre du fonds de mutualisation.
En conclusion, il a demandé à la commission de donner un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Création » de la mission « Culture » pour 2010 et d'adopter les amendements qu'il proposera.