La mission Politique des territoires participe à l'effort d'économies budgétaires engagé par le Gouvernement : son budget diminue de 5 % en autorisations d'engagement (AE) et de 11 % en crédits de paiements (CP), pour s'établir à 356 millions et 328 millions d'euros. La baisse est moins sensible en considérant le collectif budgétaire du 9 mars dernier, qui a déjà réduit de 7 millions les crédits de la mission. Surtout, les AE demeurent nettement supérieures au niveau inscrit dans le cadre de la programmation pluriannuelle 2009-2011 pour 2011.
La diminution des crédits devrait prendre de l'ampleur dans les années à venir, puisque la nouvelle programmation pluriannuelle 2011-2013 prévoit une baisse de 10 % supplémentaire des AE entre 2011 et 2013.
La Datar devra prendre sa part de l'effort budgétaire inédit que nous impose la situation de notre économie : son budget, retracé dans le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire », baisse de 14 %, à 291 millions en CP. Cependant, ses missions se sont élargies aux activités liées au Grand Paris. Le programme 112 attribue ainsi une subvention de 6 millions d'euros à la Société du Grand Paris, correspondant à un transfert de crédits et d'emplois. Vous savez que l'Etat prévoit par ailleurs d'apporter 4 milliards pour le développement du réseau de transports du Grand Paris et qu'il compte développer le plateau de Saclay ; je me réjouis du développement de ce pôle de recherche indispensable pour la compétitivité de notre pays, mais cela devra se faire en plus et non pas à la place des politiques d'aménagement menées dans le reste du territoire.
C'est aussi dans le cadre du programme 112 que le Gouvernement soutient des politiques indispensables à l'attractivité de nos territoires :
- le programme national du très haut débit, lancé cette année et dont l'objectif est de connecter 100 % des foyers d'ici à 2025. M. Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire, a annoncé que 2 milliards seraient affectés au Fonds d'aménagement numérique du territoire, mis en place par la loi du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique ;
- 15 millions seront consacrés dès l'an prochain au financement du plan d'action annoncé par le Gouvernement à l'issue des Assises des territoires ruraux ; ce plan concernera notamment les maisons de santé pluridisciplinaires et la mutualisation des services essentiels à la population, expérimentée dans 23 départements.
Les nouveaux pôles d'excellence rurale (PER) bénéficieront, comme leurs prédécesseurs, d'une enveloppe de 235 millions d'euros, dont 115 millions en provenance du fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT). Cette année, 115 PER ont été validés dès le mois de juin, une seconde phase est prévue l'an prochain, pour laquelle 454 dossiers ont été déposés. Pour mémoire, 379 PER ont été validés depuis 2006.
Je m'interroge sur la mise en oeuvre de la réforme de La Poste : comme Pierre Hérisson nous l'a déjà fait remarquer, le décret qui devait permettre à l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) de calculer le coût de la mission d'aménagement du territoire de La Poste n'est toujours pas publié. Or, en vertu de la loi, cette évaluation est indispensable pour permettre de donner à La Poste les moyens de maintenir son réseau. Ce retard n'est pas un signal positif, même si le Gouvernement assure que le décret est presque prêt et que le financement de la présence postale sera assuré.
Le programme 162 « Interventions territoriales de l'Etat » regroupe comme l'année passée quatre actions destinées à des territoires particuliers : la reconquête de la qualité des eaux en Bretagne, le programme exceptionnel d'investissement en faveur de la Corse, le plan gouvernemental sur le marais poitevin - Poitou-Charentes et le plan chlordécone en Martinique et en Guadeloupe. Ces actions représentent 34 millions en CP et sont stables par rapport à l'an passé, sauf pour la Bretagne : le lancement du plan contre la prolifération des algues vertes se traduit par des engagements d'un montant de 7,5 millions dès 2011.
La politique d'aménagement du territoire ne se limite pas, bien heureusement, aux crédits de cette mission. Le document de politique transversale chiffre l'effort total de l'Etat à 5,15 milliards, supportés par 16 missions budgétaires différentes. Cet éparpillement n'est guère propice à la lisibilité de l'action publique en ce domaine, et je me demande si l'esprit de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) est vraiment respecté dans l'architecture de cette mission. Il faudrait aussi considérer les dépenses fiscales, d'un montant prévu de 410 millions d'euros en 2011, en baisse sensible conformément à la politique de réduction des « niches fiscales ».
Enfin, cette année encore, le projet de loi de finances contient des dispositions relatives aux zones de revitalisation rurale.
L'article 65 étend aux reprises d'activité l'exonération d'impôt sur les bénéfices qui concerne actuellement les seules créations d'entreprises. Il faut s'en féliciter : cette évolution répond à une demande des territoires, même si, en contrepartie, elle est limitée aux entreprises de moins de dix salariés, de sorte que cette mesure est budgétairement neutre.
L'article 88 soulève plus de débats en limitant aux organismes employant moins de dix personnes l'exonération de cotisations sociales dont bénéficient les organismes d'intérêt général situés en ZRR. Cette exonération a été introduite par l'Assemblée nationale aux articles 15 et 16 de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux (loi DTR). Elle a été supprimée pour les nouvelles embauches à compter du 1er novembre 2007, mais elle continue à valoir pour les contrats de travail en cours à cette date. Cela représentait une charge de 219 millions d'euros en 2009.
Plusieurs rapports ont critiqué cette exonération, estimant qu'elle n'aurait pas profité aux petites associations rurales visées par les députés en 2005, mais plutôt à des structures importantes, notamment hospitalières. Si elle n'est pas parfaite et si elle a pu induire un effet d'aubaine pour certains organismes, il nous semble difficile de la supprimer brutalement, quand bien même les établissements peuvent recourir à la « réduction Fillon » de droit commun qui concerne les salaires proches du Smic. Pensons aux conditions de vie dans nos territoires ruraux, aux organismes qui s'occupent des handicapés ou des personnes âgées. Les collectivités risquent de faire face à des demandes d'aide de la part des associations qui n'auront plus droit à l'exonération.