La commission examine le rapport pour avis sur le projet de loi de finances pour 2011 de M. Rémy Pointereau sur les crédits de la mission Politique des territoires.
Nous allons examiner les crédits de la mission Politique des territoires, et ouvrirons le débat après l'exposé du rapporteur.
La mission Politique des territoires participe à l'effort d'économies budgétaires engagé par le Gouvernement : son budget diminue de 5 % en autorisations d'engagement (AE) et de 11 % en crédits de paiements (CP), pour s'établir à 356 millions et 328 millions d'euros. La baisse est moins sensible en considérant le collectif budgétaire du 9 mars dernier, qui a déjà réduit de 7 millions les crédits de la mission. Surtout, les AE demeurent nettement supérieures au niveau inscrit dans le cadre de la programmation pluriannuelle 2009-2011 pour 2011.
La diminution des crédits devrait prendre de l'ampleur dans les années à venir, puisque la nouvelle programmation pluriannuelle 2011-2013 prévoit une baisse de 10 % supplémentaire des AE entre 2011 et 2013.
La Datar devra prendre sa part de l'effort budgétaire inédit que nous impose la situation de notre économie : son budget, retracé dans le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire », baisse de 14 %, à 291 millions en CP. Cependant, ses missions se sont élargies aux activités liées au Grand Paris. Le programme 112 attribue ainsi une subvention de 6 millions d'euros à la Société du Grand Paris, correspondant à un transfert de crédits et d'emplois. Vous savez que l'Etat prévoit par ailleurs d'apporter 4 milliards pour le développement du réseau de transports du Grand Paris et qu'il compte développer le plateau de Saclay ; je me réjouis du développement de ce pôle de recherche indispensable pour la compétitivité de notre pays, mais cela devra se faire en plus et non pas à la place des politiques d'aménagement menées dans le reste du territoire.
C'est aussi dans le cadre du programme 112 que le Gouvernement soutient des politiques indispensables à l'attractivité de nos territoires :
- le programme national du très haut débit, lancé cette année et dont l'objectif est de connecter 100 % des foyers d'ici à 2025. M. Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire, a annoncé que 2 milliards seraient affectés au Fonds d'aménagement numérique du territoire, mis en place par la loi du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique ;
- 15 millions seront consacrés dès l'an prochain au financement du plan d'action annoncé par le Gouvernement à l'issue des Assises des territoires ruraux ; ce plan concernera notamment les maisons de santé pluridisciplinaires et la mutualisation des services essentiels à la population, expérimentée dans 23 départements.
Les nouveaux pôles d'excellence rurale (PER) bénéficieront, comme leurs prédécesseurs, d'une enveloppe de 235 millions d'euros, dont 115 millions en provenance du fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT). Cette année, 115 PER ont été validés dès le mois de juin, une seconde phase est prévue l'an prochain, pour laquelle 454 dossiers ont été déposés. Pour mémoire, 379 PER ont été validés depuis 2006.
Je m'interroge sur la mise en oeuvre de la réforme de La Poste : comme Pierre Hérisson nous l'a déjà fait remarquer, le décret qui devait permettre à l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) de calculer le coût de la mission d'aménagement du territoire de La Poste n'est toujours pas publié. Or, en vertu de la loi, cette évaluation est indispensable pour permettre de donner à La Poste les moyens de maintenir son réseau. Ce retard n'est pas un signal positif, même si le Gouvernement assure que le décret est presque prêt et que le financement de la présence postale sera assuré.
Le programme 162 « Interventions territoriales de l'Etat » regroupe comme l'année passée quatre actions destinées à des territoires particuliers : la reconquête de la qualité des eaux en Bretagne, le programme exceptionnel d'investissement en faveur de la Corse, le plan gouvernemental sur le marais poitevin - Poitou-Charentes et le plan chlordécone en Martinique et en Guadeloupe. Ces actions représentent 34 millions en CP et sont stables par rapport à l'an passé, sauf pour la Bretagne : le lancement du plan contre la prolifération des algues vertes se traduit par des engagements d'un montant de 7,5 millions dès 2011.
La politique d'aménagement du territoire ne se limite pas, bien heureusement, aux crédits de cette mission. Le document de politique transversale chiffre l'effort total de l'Etat à 5,15 milliards, supportés par 16 missions budgétaires différentes. Cet éparpillement n'est guère propice à la lisibilité de l'action publique en ce domaine, et je me demande si l'esprit de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) est vraiment respecté dans l'architecture de cette mission. Il faudrait aussi considérer les dépenses fiscales, d'un montant prévu de 410 millions d'euros en 2011, en baisse sensible conformément à la politique de réduction des « niches fiscales ».
Enfin, cette année encore, le projet de loi de finances contient des dispositions relatives aux zones de revitalisation rurale.
L'article 65 étend aux reprises d'activité l'exonération d'impôt sur les bénéfices qui concerne actuellement les seules créations d'entreprises. Il faut s'en féliciter : cette évolution répond à une demande des territoires, même si, en contrepartie, elle est limitée aux entreprises de moins de dix salariés, de sorte que cette mesure est budgétairement neutre.
L'article 88 soulève plus de débats en limitant aux organismes employant moins de dix personnes l'exonération de cotisations sociales dont bénéficient les organismes d'intérêt général situés en ZRR. Cette exonération a été introduite par l'Assemblée nationale aux articles 15 et 16 de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux (loi DTR). Elle a été supprimée pour les nouvelles embauches à compter du 1er novembre 2007, mais elle continue à valoir pour les contrats de travail en cours à cette date. Cela représentait une charge de 219 millions d'euros en 2009.
Plusieurs rapports ont critiqué cette exonération, estimant qu'elle n'aurait pas profité aux petites associations rurales visées par les députés en 2005, mais plutôt à des structures importantes, notamment hospitalières. Si elle n'est pas parfaite et si elle a pu induire un effet d'aubaine pour certains organismes, il nous semble difficile de la supprimer brutalement, quand bien même les établissements peuvent recourir à la « réduction Fillon » de droit commun qui concerne les salaires proches du Smic. Pensons aux conditions de vie dans nos territoires ruraux, aux organismes qui s'occupent des handicapés ou des personnes âgées. Les collectivités risquent de faire face à des demandes d'aide de la part des associations qui n'auront plus droit à l'exonération.
La commission des finances de l'Assemblée nationale a voté la suppression de cet article et la commission des affaires sociales de la même Assemblée a proposé de porter le seuil d'effectif à 30 salariés au lieu de 10. Dans l'attente de l'examen de cet article en séance publique à l'Assemblée nationale, je vous soumets un projet d'amendement à l'article 88, afin de maintenir l'exonération pour les associations qui relèvent du secteur social et médico-social ; et de prévoir un aménagement de l'extinction du dispositif entre 2011 et 2013 pour les autres organismes. L'article 88 relève de la mission « Travail et emploi », mais la dimension évidente d'aménagement du territoire du dispositif des ZRR nous permet de nous saisir pour avis de cet article afin de l'amender.
Les crédits de la mission Politique des territoires proprement dit se place dans une perspective de contrainte budgétaire indéniable, mais il a réussi à préserver les marges de manoeuvre indispensables à la continuité de la politique de soutien aux territoires. C'est pourquoi je vous proposerai d'émettre un avis favorable à l'adoption de la mission et d'adopter notre amendement.
Nous prenons acte de la baisse des crédits, qui vaut pour l'ensemble des politiques publiques et qui est nécessaire, dans le contexte d'endettement que nous connaissons.
Les crédits des PER sont maintenus pour 2011, c'est une bonne chose. Cependant, peut-on en savoir davantage sur les critères de sélection de ces pôles ? Quels types de projets peut-on y faire entrer ? Je pense en particulier, dans mon département, à un projet de restauration d'une ligne de chemin de fer.
En 2006-2007, les critères ont été très contraignants et le nombre des pôles limité à 270. Les critères sont désormais plus souples et le nombre de pôles plus important. L'un des critères essentiels est la dimension économique du projet.
Les critères principaux sont le développement de la capacité économique des territoires ruraux, la réponse aux besoins de la population, le service au public, en particulier sur le plan de la santé. Avec un projet visant le transport collectif, vous êtes bien dans la course. Cependant, la subvention maximale étant de 1,5 million d'euros, le projet doit être raisonnable.
Les maisons de santé pluridisciplinaires peuvent-elles être soutenues dans le cadre d'un pôle ?
Elles ont pu l'être jusqu'ici. Désormais, il y a aussi le programme de développement des maisons de santé pluridisciplinaires.
L'Etat nous incite à passer par le dispositif du PER. Je pense à un site classé de mon département, qui a dû faire l'objet d'un plan de travaux important et où passent quelque cinq cent mille visiteurs chaque année : la préfecture nous a conseillé de monter un pôle d'excellence, pour obtenir plus de financements.
Pour monter une maison de santé pluridisciplinaire, il faut l'accord de l'agence régionale de santé (ARS), qui établit le constat qu'on est en zone insuffisamment pourvue.
Le programme de maisons de santé pluridisciplinaires peut aller jusqu'à 50 000 euros par maison de santé. Si le projet est important, il faut en passer par un PER.
Quelques remarques liminaires. D'abord, je dois constater que l'esprit de la LOLF est de plus en plus contourné : les missions devaient nous donner une lecture claire et transparente des politiques publiques, elles servent aujourd'hui à cacher la misère, comme on peint sur la rouille des bateaux. Sur le terrain pourtant, chacun sait bien ce qu'il en est : cela ne sert à rien de prétendre que les politiques publiques ont plus de moyens quand chacun constate l'inverse ! J'admire donc avec quel brio notre rapporteur nous a présenté son numéro d'équilibre ! Cependant, nous ne nous laissons pas prendre : nous voterons contre ce budget ! Le Gouvernement ne peut pas prétendre tout et son contraire, dire qu'il veut à la fois des agglomérations plus fortes et des territoires ruraux plus prospères, prétendre que la présence postale est maintenue alors que nous savons tous que des bureaux de poste ferment, y compris en agglomération ! Les files d'attente s'allongent jusque dans la rue ! La Poste ne met plus assez d'agents derrière les comptoirs, le nombre de bureaux diminue, qu'en sera-t-il demain ? On a de quoi s'inquiéter, surtout quand on voit les atermoiements de la Caisse des dépôts pour investir dans La Poste, comme il en a été convenu.
Dans la loi relative à l'entreprise publique La Poste et aux activités postales, que nous avons adoptée définitivement en janvier dernier, nous avons obtenu le maintien de 17 000 Points Poste. L'activité postale évolue en profondeur, le volume de courrier diminue de 6 % par an, soit un recul de 30 % d'ici 2015 : La Poste doit impérativement se réorienter, en particulier vers l'activité colis, à l'échelon européen. La présence postale sera compensée, un contrat entre l'AMF, La Poste et l'Etat prévoit 300 millions pour le courrier, et l'exonération de taxe professionnelle est évaluée à 170 millions, au lieu des 135 à 155 millions estimés en début d'année.
La présence postale n'implique pas nécessairement le maintien du bureau de poste lui-même, d'autres solutions peuvent être préférables. Lorsque vous accueillez le Point Poste en mairie, La Poste peut vous aider à réaliser les travaux d'aménagement, et lorsque vous êtes en ZRR, vous êtes soutenus à hauteur de 965 euros par mois, ce qui finance un mi-temps : j'invite chacun de vous à regarder de près ces conditions.
Quant à l'engagement de la Caisse des dépôts, nous en avons eu confirmation avec nos collègues députés, de la part du directeur général de la Caisse : elle va entrer dans le capital de La Poste à hauteur de 1,5 milliard, soit une participation de 26 %, avec un programme d'investissements industriels, et l'Etat va compléter avec 1,2 milliard d'euros : ce que nous avons prévu est en marche.
Je déplore aussi que la LOLF soit contournée : notre politique en direction des territoires n'est pas lisible, nous avons besoin d'un document transversal, qui rassemble toutes les lignes budgétaires concernées.
Sur la présence postale, il faut partir de l'attente des usagers. Que demandent-ils ? Non pas un bureau de poste qui ferme dès 16 heures, mais des services postaux accessibles dès le matin tôt et jusqu'au soir : si cela peut se faire dans des commerces ou des mairies, il est utile d'en passer par là.
Il faut être réaliste et parler le langage de la vérité : les pôles d'excellence ruraux et les ZRR sont maintenus, la parité entre eux demeure, c'est une très bonne chose. A l'origine, les pôles de proximité étaient urbains, le monde rural attendait. Depuis deux ans, les PER répondent à de vraies aspirations, avec une logique de projet plutôt que de guichet, un tiers ayant porté sur des projets forestiers. Aujourd'hui, on demande plus d'innovation, ce qui n'empêche pas la filière bois de présenter encore des projets. Cependant, nous manquons d'une ligne budgétaire spécifique aux PER, car nous avons déjà dû composer par le passé et rien ne nous garantit les financements annoncés. Je connais bien la situation de ce qu'on appelle la France profonde, puisque 22 des 35 cantons de mon département sont en ZRR et que deux ont moins de cinq habitants au kilomètre carré.
Enfin, pour atteindre l'objectif annoncé le 22 février dernier par le président de la République, de 250 maisons de santé pluridisciplinaires, faut-il passer par les PER, ou par le programme spécifique à ces maisons ?
Les PER sont effectivement très appréciés dans les territoires ruraux, ils y fédèrent des énergies autour de projets porteurs.
La filière bois et l'élevage représentent un nombre important de PER, tel le Palmipôle du Gers, faut-il pour autant changer de secteurs ? L'innovation est un bon critère, mais nous ne devons pas perdre de vue que des projets demandent de la continuité, et qu'un arrêt brutal du soutien pourrait les compromettre. Peut-on parvenir à une ligne budgétaire spécifique ? Les PER sont soutenus par plusieurs financeurs et on nous annonce l'éventualité d'un fonds mutualisé : c'est encourageant, et cela évitera de compenser certains manques de financement par des recours à la dotation globale d'équipement (DGE) qui enlèvent des moyens à d'autres projets.
Enfin, sur les maisons de santé pluridisciplinaires, je dirai que le plus difficile est de réunir l'équipe médicale. Il existe ensuite plusieurs pistes financières, toutes méritent d'être explorées.
J'encourage chacun à faire des réunions de terrain sur le sujet. Une maison de santé pluridisciplinaire commence à trois médecins, cela suppose 6 000 à 7 000 habitants au moins, ce qui demande parfois de réunir plusieurs cantons.
Quand le maire embauche pour le Point Poste qu'il accueille, et que des fonds y disparaissent, ou que des erreurs comptables s'y produisent, qui est responsable : l'employé ? Le maire ? La Poste ?
J'accueille l'agence postale dans ma mairie depuis douze ans, après avoir constaté que le bureau de poste coûtait plus cher à la commune que cette solution ; nous avons doublé le temps d'ouverture, les employés qui y travaillent sont agréés par La Poste, après une formation rapide et ils sont rémunérés en fonction de l'activité. Quand une erreur se produit, La Poste est responsable.
Dès lors que La Poste délivre son agrément, elle est responsable, en plus du champ de la responsabilité personnelle de l'employé.
On me dit qu'on ne peut retirer d'argent à un bureau de poste en mairie lorsqu'on n'est pas détenteur du compte mais qu'on a une procuration : qu'en est-il ?
Nous allons le vérifier.
J'en reviens à l'article 88 du projet de loi de finances pour 2011. L'Assemblée nationale va se prononcer le 16 novembre, éventuellement pour supprimer l'article. En attendant, notre rapporteur nous propose de maintenir l'exonération pour les associations intervenant dans le domaine de l'action sociale et médico-sociale, et de réduire progressivement le montant des exonérations pour les autres bénéficiaires : c'est l'objet de son amendement. Quelque 3 900 associations seraient concernées, l'exonération représenterait 146 millions d'euros. Quant au lissage, il porterait sur 43 millions d'euros d'exonération.
Nous proposons en effet de ne pas appliquer le plafond de dix salariés pour les associations intervenant dans le domaine de l'action sociale et médicosociale. Notre amendement propose également un mécanisme de lissage de la fin de l'exonération, avec une application progressive de 2011 à 2013 pour les autres organismes.
L'association d'aide à domicile en milieu rural (ADMR) peut-elle bénéficier de ce mécanisme ?
Oui, même si la loi de finances pour 2008 a déjà écorné l'exonération, alors qu'elle ne datait que de 2005, et il ne faut pas exagérer les montants en jeu : si les ZRR couvrent 40 % des communes françaises, elles représentent seulement 4,5 millions d'habitants.
Dans mon département, des communes ont dû créer une communauté de communes, spécialement pour monter une maison de retraite gérée par une association. Je me vois mal leur annoncer la fin de l'exonération, qui se traduirait par une hausse de 15 % des tarifs.
La durée des prises en charge dans les ZRR, qui était de 12 ans a-t-elle été réduite ?
Il existe plusieurs dispositifs ; l'exonération de cotisations sociales dans les organismes d'intérêt général est permanente.
Je vais mettre aux voix les crédits de la mission. En revanche, nous n'adopterons l'amendement qui vous a été présenté que lorsque la loi de finances sera transmise au Sénat.
Les crédits de la mission Politique des territoires sont adoptés.
Puis, la commission procède à l'audition de M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche, sur le projet de loi de finances pour 2011.
Je souhaite remercier M. Le Maire d'être venu nous présenter les crédits de son ministère pour 2011.
Je suis également très heureux de venir vous présenter mes crédits et de répondre à vos questions.
Le projet de loi de finances prévoit de doter mon ministère en crédits de paiement de 5,27 milliards en 2011, de 5,22 milliards en 2012 et de 5,16 milliards en 2013. Par rapport aux 5,17 milliards pour 2010, la hausse est de 1,8 %, grâce au redéploiement des crédits libérés par l'arrivée à échéance des dispositifs antérieurs. Cette hausse s'annule néanmoins progressivement en raison des économies réalisées grâce à la réduction des coûts de gestion des services de l'État et des structures d'accompagnement.
Mon souci principal est d'accompagner la reprise économique dans le secteur agricole et de préserver les crédits d'investissement, de modernisation et d'innovation du programme 154 « Agriculture - pêche » afin qu'ils bénéficient à tous les agriculteurs.
Ce programme est doté de 2 milliards de crédits de paiement. J'ai souhaité réaliser des économies pour pouvoir mieux investir dans d'autres domaines, plus utiles pour les agriculteurs eux-mêmes. Ces économies résultent de l'arrivée à échéance de dispositifs antérieurs : le plan de soutien exceptionnel à l'agriculture, ce qui permet d'économiser 150 millions d'euros en CP ; la non-reconduction de la mesure rotationnelle, d'où une économie de 135 millions en AE ; le bilan de santé de la PAC, soit une économie de 22 millions en CP. Enfin, nous avions budgété 31 millions en CP pour la taxe carbone : comme elle n'a pas été mise en oeuvre, cela fait autant d'économie pour le programme 154.
Au-delà de ces économies mécaniques, des réformes ont été engagées par mon ministère dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP). Ainsi en est-il de la rationalisation des crédits de FranceAgriMer, qui permet de dégager 15 millions de CP, de la réaffectation des 9,6 millions d'euros de génétique animale et de sélection végétale sur le compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural » (CASDAR), de la réforme des aides aux associations départementales pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles (ADASEA), soit 6 millions d'économies, de la réduction des dépenses de fonctionnement de l'administration qui représente près de 16 millions d'économies sur trois ans. Ainsi, le développement de la télé-déclaration est plus rapide que prévu et permet de faire plusieurs millions d'économie chaque année.
Toutes ces économies permettent de renforcer les mesures de soutien au revenu des agriculteurs. C'est ma priorité absolue : nous avons donc décidé de maintenir intégralement la prime nationale supplémentaire à la vache allaitante (ANSVA), soit 165 millions d'euros. Il en est de même pour l'indemnité compensatoire de handicap naturel (ICHN) pour 248 millions. Les élus de la montagne savent que le maintien de cette indemnité est un choix politique majeur en faveur des agriculteurs de ces zones défavorisées.
Les crédits nécessaires ont également été prévus pour couvrir un engagement que j'avais pris devant vous lors de l'examen de la loi de modernisation de l'agriculture (LMAP) : il s'agit du renouvellement intégral des contrats de primes herbagères agro-environnementale (PHAE) opérés en 2010. Nous avons donc prévu 65 millions d'euros en CP et l'intégralité des contrats sera honoré jusqu'en 2014. Nous renouvellerons par anticipation les contrats arrivant à échéance en 2011 et en 2012. Tout cela à un coût élevé mais il sera cofinancé par l'État et par l'Union européenne.
Enfin, les crédits en faveur de l'installation des jeunes agriculteurs sont sanctuarisés à hauteur de 350 millions d'euros.
Ces trois points sont vraiment essentiels.
Les crédits du programme 154 permettront également de renforcer la compétitivité de nos filières. Nous allons accompagner la modernisation de l'agriculture en mobilisant 300 millions sur trois ans pour financer les plans de développement par filière : 180 millions sur le budget de l'État sur trois ans, soit 60 millions par an, et 120 millions sur trois ans provenant de la taxe sur le foncier agricole que vous avez adoptée dans la LMAP. Ces plans de développement sont indispensable pour réaliser des économies d'énergie dans les exploitations, gagner en compétitivité, financer les mises aux normes de certains élevages, notamment en raison des nouvelles règles de bien-être animal qui s'appliqueront en 2013.
Nous allégeons également certaines contraintes qui induisent des distorsions de concurrence vis-à-vis de nos voisins européens. Nous avons exonéré le travail occasionnel de toutes charges sociales, soit un surcoût pour le budget de l'État de 170 millions d'euros en année pleine par rapport au dispositif antérieur. L'ensemble des exonérations de charges sur le travail occasionnel s'élève à 492 millions. Le prix du travail occasionnel en France, 11,29 € de l'heure, doit en effet parvenir à peu près au même niveau que chez nos voisins, dont l'Allemagne, où il est de 9,26 €. Ces mesures ne permettent néanmoins pas de résoudre le problème du coût du travail permanent, ce qui pèse sur la compétitivité de la filière agricole française. Il est ainsi difficile d'être compétitif quand nos voisins allemands utilisent du personnel polonais sous contrat de service à 6 euros de l'heure alors que nos salariés sont payés 12,3 euros. Le problème reste donc posé. Je vous demande de nous faire rapidement des propositions constructives.
Enfin, nous allons réformer la gouvernance de la pêche et développer l'aquaculture, chère à Charles Revet. Nous poursuivrons certaines actions innovantes en matière de pêche, comme les contrats bleus, bénéficiant de 10 millions d'euros par an. Nous renforcerons la recherche en matière de ressources halieutiques, en y consacrant 5 millions. Il faut encourager un véritable partenariat entre pêcheurs et scientifiques, pour mettre fin au face à face actuel stérile.
J'en viens au programme 206 : « Sécurité et qualité sanitaire » dont les crédits baissent de 12,7 % en CP. Cette diminution significative résulte du transfert du financement et de la gestion de l'équarrissage aux filières professionnelles et de la fin de l'élimination des farines animales, soit une économie de 27 millions en CP ; du transfert aux services du Premier ministre des crédits mutualisés des directions départementales interministérielles, soit près de 17 millions en CP. Nous ne baissons donc pas la garde sur la sécurité et la qualité sanitaire mais nous procédons à des réajustements. Pour preuve, le budget de la nouvelle Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSéS), qui résulte de la fusion de la l'AFSSA et de l'AFSSET, augmente de 3,7 millions.
Les crédits prévus pour améliorer la qualité de l'offre alimentaire augmente de 0,7 millions en CP. Les crédits dédiés à la protection des végétaux et des animaux sont stables. Enfin, le projet de loi de finances intègre les conclusions des États généraux du sanitaire avec le financement des réseaux d'épidémio-surveillance pour 750 000 euros et la responsabilisation des éleveurs en matière de soins vétérinaires.
Un mot sur la forêt, sujet majeur s'il en est. Mes deux priorités sont les suites de la tempête Klaus et la gestion de l'Office national des forêts (ONF). Comme l'a souhaité le Président de la République, 371 millions seront consacrés au développement des forêts, soit une hausse d'environ 10 % des CP. Près de 25 % de ceux-ci sont destinés à la reconstitution des forêts touchées par cette terrible tempête.
Le renforcement de l'ONF est une préoccupation majeure. J'ai lu avec attention les recommandations faites par mon prédécesseur, Hervé Gaymard, qui propose plusieurs solutions pour parvenir à l'équilibre financier. Nous avons équilibré le budget pour 2011 en augmentant la subvention du ministère de l'agriculture de 5 millions. Nous avons maintenu les 144 millions du versement compensateur sur la programmation pluriannuelle 2011-2013. Nous devrons néanmoins nous interroger l'année prochaine sur les choix que nous voulons faire en matière d'équilibre financier de l'ONF, car nous ne pourrons continuer à augmenter systématiquement les dotations du ministère de l'agriculture.
Grâce à votre mobilisation, le Premier ministre a décidé de maintenir le programme «Enseignement technique agricole » dans la mission « Enseignement scolaire ». C'est une excellente décision. Rien n'aurait été plus dommageable que d'isoler l'enseignement agricole en le délégant entièrement à mon ministère. Nous consacrerons 1,6 milliard d'euros à l'enseignement agricole dont 1,3 à l'enseignement technique et 300 millions à l'enseignement supérieur et à la recherche. Pour 2010, j'avais annoncé un moratoire sur la suppression de postes d'enseignants agricoles. Pour l'année prochaine, la règle d'un remplacement pour deux départs ne sera pas appliquée dans ce domaine : seuls 25 % des départs à la retraite ne seront pas remplacés, soit 120 postes. S'agissant du départ à la retraite des autres fonctionnaires de mon ministère, nous poursuivrons en revanche le non remplacement d'un départ sur deux : 890 départs sont prévus en 2011 contre 980 en 2010 et cela représente 650 emplois non remplacés en 2011, dont 450 emplois de titulaires.
Les priorités de ma politique sont donc claires : poursuivre le redressement de l'agriculture française, en ne relâchant pas le soutien aux exploitations, aux paysans et aux pêcheurs eux-mêmes, quitte à faire des économies sur les crédits de fonctionnement de mon ministère.
Pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, si les 33 millions d'euros que votre ministère s'était engagé à verser cette année en matière d'assurance risque agricole ont été consommés ? Quid des 100 millions d'euros annoncés par l'Europe dans le cadre du bilan de santé de la PAC ?
Vous avez dit vouloir maintenir l'enveloppe de 350 millions pour les aides à l'installation. Pouvez-vous être plus précis sur le contenu de cette enveloppe ?
Où en sommes-nous de la déduction pour aléas climatiques ? Qu'en est-il de la déduction pour investissement (DPI) et de la déduction pour aléas (DPA) ?
Quelle est la lettre de mission que vous avez confiée à M. Pascal Viné qui est pressenti pour devenir directeur général de l'ONF ? L'Office devra-t-il faire un effort structurel ?
Enfin, je souhaite en savoir plus sur les crédits de soutien aux exportations agricoles et agroalimentaires, d'autant qu'elles vont diminuer l'année prochaine alors même que le secteur a perdu des parts de marché.
La filière élevage est en grande difficulté, en particulier du fait de l'augmentation du coût de l'alimentation animale. Quelles mesures entendez-vous prendre pour lui venir en aide ?
L'hydraulique agricole est en voie de disparition depuis la loi de finances pour 2009. Quels seront les moyens publics et privés disponibles pour financer les aménagements indispensables à la maîtrise de l'approvisionnement en eau de nos territoires qui est cruciale ?
La loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche a modifié les missions des chambres d'agriculture. Or, nous avons constaté en 2010 une stagnation du produit de la taxe additionnelle sur le foncier non bâti qui les finance à plus de 40 %. Prévoyez-vous une revalorisation de cette ressource pour 2011 ?
La filière élevage connaît de graves difficultés : quelle politique de soutien à la viande allez-vous mettre en place ?
Il avait été question de vendre une partie du patrimoine de l'ONF, comme les maisons domaniales forestières, pour assurer le financement du déménagement du siège de l'Office. Où en est-on ?
La couverture des risques en agriculture est une de mes grandes priorités. Il est indispensable que nous disposions d'une meilleure protection, notamment face aux risques économiques. Les contrats d'assurance au titre d'une année sont pris en charge par l'État sur le budget de l'année n +1 : la dotation budgétaires pour 2010 est donc utilisée pour honorer les contrats 2009, pour lesquels 26 millions avaient été versés. Les contrats 2010 seront payés par les dotations pour 2011 qui prévoient 33,3 millions, plus 100 millions de crédits communautaires.
Nous ne connaîtrons précisément le nombre de contrats d'assurance souscrits cette année que fin novembre.
La question de la réassurance publique est capitale et nous nous sommes tous battus pour en obtenir la création. Les travaux de réflexion ont commencé avec le Trésor, les assureurs et les réassureurs. Le démarrage officiel du groupe de travail est prévu pour le 15 novembre. Je souhaite qu'il aboutisse fin janvier 2011, conformément aux délais prévus dans la loi de modernisation. S'agissant plus spécifiquement de l'assurance fourrage, nous devrons vraisemblablement mettre l'épée dans les reins des assureurs, car Groupama et Pacifica n'avancent que très lentement : ils n'ont pas l'intention de lancer de produits avant 2012, voire 2013. Des expérimentations sont plus que souhaitables dès l'année prochaine, et je demande votre soutien.
Vous m'avez également interrogé sur les 350 millions d'euros destinés aux jeunes agriculteurs. Chaque année, 11 000 jeunes de moins de 40 ans s'installent en agriculture, dont 6 000 sont aidés car ils répondent aux critères de formation. Les plans de professionnalisation personnalisés ont connu un réel succès car ils mettent l'accent sur tout ce qui précède l'installation. Un fonds pour les jeunes agriculteurs a été créé, alimenté par la taxe dont je vous ai parlé, afin de favoriser l'accès des jeunes au foncier et de développer les projets innovants.
Les 350 millions se décomposent ainsi : 169 millions de crédits budgétaires inscrits en loi de finances pour 2011, au titre de mon ministère, et 86,9 millions qui proviennent de dépenses fiscales comptabilisées au titre de l'installation des jeunes, soit des exonérations fiscales ou sociales. Le total est donc de 255,9 millions, auquel il convient d'ajouter 94,1 millions de dotations jeunes agriculteurs au titre de la politique commune. Nous en arrivons donc à 350 millions.
La DPA et la DPI ne sont pas à mettre sur la même échelle puisqu'elles concernent respectivement 1 100 et 115 000 entreprises. La dépense fiscale est de 2 millions pour la DPA et de 305 millions pour la DPI. Vous avez souhaité renforcer la DPA ce qui permettra une meilleure couverture face aux aléas économiques.
Sur l'ONF, je tiens à éviter toute mauvaise interprétation sur le départ de mon directeur de cabinet. Nous nous connaissons depuis des années et nous avons toujours remarquablement bien travaillé ensemble, en véritables partenaires politiques. Une opportunité se présentait à lui et je m'en réjouis. N'ayez crainte, son successeur sera également excellent. L'audition de demain permettra à Pascal Viné d'exposer en détail sa vision et le projet qu'il a pour l'ONF.
En 2011, nous allons consacrer 19,7 millions pour la promotion internationale des produits et du modèle agro-alimentaire français. Nous consacrerons au maximum 15 millions à la délégation de service public de la Sopexa qui court jusqu'en 2012. Je crois au maintien d'un instrument spécifique pour soutenir les exportations des produits agro-alimentaire et je suis opposé à la fusion entre la Sopexa et Ubifrance, dont les relations se sont d'ailleurs améliorées. L'industrie agroalimentaire est un domaine à part entière : 400 000 emplois en dépendent et ce secteur compte pour beaucoup dans notre balance commerciale.
L'Union européenne accorde des crédits à la France pour soutenir ses exportations, or seuls 8 % sont consommés pour la promotion vers les pays tiers, comme la Chine ou l'Amérique du sud, tout le reste étant consacré aux pays européens, alors que ce sont les pays émergents qui connaissent la croissance la plus forte. Au Salon international de l'alimentation, j'ai constaté que les Italiens avaient réussi à imposer une seule marque italienne, identifiable partout dans le monde, avec des indications régionales. Pourquoi poursuivons-nous nos querelles de chapelle et ne sommes-nous capables d'avoir une marque France, clairement identifiable au Japon, en Inde, en Chine, au Canada ou au Brésil ? Il est temps d'y travailler ! Les filières professionnelles doivent se remettre en question. Ainsi, le travail engagé pour la viticulture doit se poursuivre. Nous produisons 47 millions d'hectolitres de vin chaque année, dont la moitié en AOC. Est-ce raisonnable ? Je suis persuadé du contraire.
Enfin, la question du coût du travail dans l'industrie agro-alimentaire est vitale. Nous avons fait des efforts pour le travail occasionnel. Nous devons nous pencher sur le travail permanent, et j'attends vos propositions. Nous devrons aussi poser un jour ou l'autre la question de l'harmonisation sociale européenne pour éviter des distorsions de concurrence insupportables pour nos agriculteurs. Est-il normal qu'il existe des contrats de service dans certains pays européens et pas dans d'autres ? Est-il normal que certains salariés dans les abattoirs allemands puissent être embauchés pour un travail pénible à 6 euros de l'heure alors que les nôtres le sont à 14 ou 15 euros ?
Je continuerai à me battre pour une harmonisation des règles européennes. On ne peut demander à nos éleveurs d'être compétitifs et de rogner un centime d'euro par kilo de carcasse tout en leur interdisant, en matière de transport, d'utiliser des 44 tonnes, comme en Allemagne : cela représente 10 centimes supplémentaire par kilo de carcasse ! De tels choix engagent la survie de la filière toute entière.
A marché unique, je souhaite des règles uniques.
J'en viens aux questions de Raymond Vall. L'hydraulique est un sujet majeur : le Conseil de modernisation des politiques publiques a mis fin en 2008 au financement de l'État pour tous les travaux hydrauliques agricoles, en dehors des ouvrages domaniaux et des concessions de l'État. Nous allons mettre en place divers programmes, notamment sur la question des tuyaux et des relais hydrauliques. Avec les collectivités territoriales et les agences de l'eau, nous devrons nous accorder sur le partage de ces financements.
On ne peut pas demander des efforts à l'État en matière de crédits de fonctionnement et parallèlement exonérer les chambres d'agriculture de toute réduction de leurs dépenses de fonctionnement. La baisse des subventions de l'État est progressive : 14,7 millions en 2010, 8 millions en 2011 et 3 millions en 2012. L'année prochaine, les chambres d'agriculture verront leur budget baisser de 6,7 millions, soit 1 % de leur budget total. Dans mon ministère, je réduis mes dépenses de fonctionnement de 5 %. Nous avons prévu une augmentation de 1,5 % de la taxe pour les chambres et il sera possible de prévoir des taux différenciés par département pouvant aller jusqu'à 3 %. Tout cela doit permettre d'opérer le transfert des missions des ADASEA aux chambres d'agriculture dans les meilleures conditions possibles.
Enfin, Joël Bourdin m'a interrogé sur le soutien à la filière bovine. Dans de nombreuses filières, de vraies réformes structurelles ont été mises en place. Ce fut le cas dans les secteurs laitier, des fruits et légumes, et pour la viticulture. Reste la filière de l'élevage, notamment bovin. Le revenu moyen des éleveurs de bovins, c'est 40 % du revenu moyen agricole, qui est lui-même inférieur de 15 % au revenu moyen des salariés français. Ces éleveurs sont donc dans une situation de grande détresse. Nous avons proposé des plans de développement et des aides immédiates. Mais les subventions n'ont jamais réglé les problèmes. Nous sommes donc convenus aujourd'hui même avec les représentants de la filière de mettre en place un plan d'urgence qui tient en trois points. Il est indispensable que tous les acteurs de la filière jouent le jeu, surtout dans le secteur de l'abattage, pour que les prix remontent rapidement. Si tel n'est pas le cas, aucune discussion ne sera possible car les éleveurs refuseront de se mettre autour de la table des négociations. J'ose espérer que les résultats se feront sentir rapidement, c'est la condition sine qua non. Deuxième point : l'interprofession va se réunir pour traiter d'un certain nombre de sujets qui n'ont jamais été examinés depuis des années. Or, cette réunion marque une avancée importante car cela faisait des mois que ses représentants ne se parlaient plus ! Ils doivent apprendre à renouer le dialogue : tous les acteurs ont pris l'engagement d'être là demain matin, en présence d'un médiateur.
J'ai proposé divers chantiers : la valorisation des carcasses en fonction de l'origine des bêtes. Il n'est pas normal que le prix directeur en matière d'élevage soit fixé par rapport à celui de la vache de réforme. Tous ceux qui font de la race à viande, Salers, Charolais, Blonde d'Aquitaine... se retrouvent systématiquement dévalorisés. L'échelonnage du produit doit donc être beaucoup plus strict car la force de la France, c'est la qualité.
Deuxième chantier : la question de l'évaluation des carcasses. Ce sujet est majeur, mais on ne dispose pas aujourd'hui d'instruments d'évaluation fiables aux yeux des éleveurs. Il n'est pas possible de valoriser les avants ou les arrières : on ne sait que peser l'ensemble de la carcasse. Il existe des machines pour faire cela, mais elles sont coûteuses. Elles auraient dû être installées depuis des années et elles ne le seront qu'en 2012. On ne va pas attendre jusque là ! J'ai demandé à l'interprofession de hâter les choses et si elle n'y parvient pas, je publierai un décret.
Troisième chantier : les contrats. On m'explique depuis des mois que cela ne se fait pas dans l'élevage mais les éleveurs sont sans ressources, ce qui prouve que le système actuel ne fonctionne pas. Je m'attends à des oppositions mais je dois garantir le revenu des éleveurs !
Enfin, j'ai demandé au président de l'Observatoire des prix et des marges de me remettre d'ici la fin de l'année un rapport sur les prix et les marges dans la filière de l'élevage bovin. Je n'arrive en effet pas à comprendre pourquoi une entrecôte à 17 euros dans la grande distribution n'est payée que 3 euros au producteur. Où passent les 14 euros manquants ?
Contrairement à ce que croient certaines bonnes âmes, l'agriculture est facilement délocalisable. Si on ne défend pas nos filières agricoles, elles partiront ailleurs. La viande viendra d'Amérique du sud, les fruits et légumes seront produits en Afrique du nord et notre agriculture disparaîtra. Il est indispensable de tout faire pour éviter la désespérance et les fermetures d'exploitations.
Pour ce qui est de l'ONF, seules une dizaine de maisons forestières sont en cours de vente alors qu'une centaine de cessions était prévue. Cela rapportera 2,5 millions au lieu des 10 millions espérés. Pascal Viné a donc du travail en perspective. (Sourires)
Je suis tout à fait d'accord avec vous : l'Europe doit harmoniser les charges, les coûts et les méthodes de fonctionnement.
Vous annoncez des réductions d'effectifs dans votre ministère. C'est dans l'air du temps, mais ces réductions vont-elles frapper l'administration centrale ou vos services dans les départements ? Nous vivons actuellement le « mariage » entre les directions départementales de l'agriculture et les directions départementales de l'équipement, et cela ne se passe pas facilement - c'est un euphémisme ! Le monde agricole est souvent négligé. Quand allez-vous arrêter de réduire les effectifs ? Pouvons-nous espérer un coup de frein ?
Un programme de trois ans sur les biocarburants avait été lancé avec des aides fiscales. Or, il va prendre fin en 2011. Qu'en sera-t-il ensuite ?
Les crédits d'impôt pour favoriser les remplacements ne seraient pas prorogés. C'est bien dommage car on touche là aux conditions de vie des jeunes agriculteurs. Qu'en est-il précisément ?
La filière des fruits et légumes a connu en 2009 de grosses difficultés. Les choses se sont améliorées en 2010, mais la situation reste fragile. Pouvez-vous rassurer les acteurs de cette filière ?
Que pensez-vous de la proposition de la Cour des comptes qui suggérait en 2008 de remplacer le système de subvention des actions de développement des chambres d'agriculture, qui représente environ 40 millions, par une affectation directe du produit de la taxe sur le chiffre d'affaire des exploitations ?
La politique de réduction des effectifs dans la fonction publique s'arrêtera en 2012, si les Français le décident, ce qui est peu probable. Sinon, elle pourrait se prolonger.
Pour 2011, 650 emplois sont concernés : 450 emplois permanents et 200 contrats à durée déterminée. L'effort portera sur l'administration centrale et sur les autres services déconcentrés plutôt que sur l'enseignement agricole.
En 2011, dans l'enseignement agricole, le non-renouvellement des départs à la retraite n'atteindra que 25 % des postes contre 50 % dans le reste de la fonction publique, soit 120 emplois de fonctionnaires et 25 postes de contractuels.
Nous tiendrons les engagements pris sur les biocarburants. Le rôle des parlementaires sera essentiel. Nous ne reviendrons pas sur le choix fait en 2008 de maintenir pendant trois ans le même niveau de défiscalisation - mais pour 2012, rien n'est arrêté, or ce serait un coup très dur pour les biocarburants si l'on modifiait les montants actuels à savoir 14 euros par hectolitre pour l'éthanol et 8 euros pour le biogazole.
Je suis très attaché au crédit impôt remplacement qui permet aux agriculteurs de partir en vacances ; il coûte 10 millions d'euros par an pour 21 700 exploitations, soit 460 euros par exploitation, ce qui est raisonnable. A l'Assemblée nationale, un amendement de M. Michel Raison propose de maintenir ce crédit d'impôt. Nous ne souhaitons pas revenir sur cet engagement pris en 2006.
Quant à votre proposition concernant les chambres d'agriculture, je n'y suis pas favorable. Le compte d'affectation spéciale « Développement agricole et durable » assure un meilleur pilotage des recettes de la taxe, incluant une évaluation scientifique. Tenons-nous en au système actuel.
Reconduirez-vous les aides financières à ces agriculteurs dont les résultats sont dramatiques en 2010, pires qu'en 2009 ? Dans la production céréalière, le prix à la tonne est peut-être remonté à 200 euros, mais si le rendement a chuté de 8 à 5 tonnes l'hectare, la situation des exploitants reste catastrophique. Eh oui, certains céréaliers, dans l'Oise, ont un rendement de 6 tonnes à l'hectare, sur 50 hectares. Je sais qu'on s'intéresse plus aux producteurs de légumes ou aux éleveurs qu'aux céréaliers, considérés comme les nantis de l'agriculture ! Mais vous, Monsieur le ministre, vous devriez vous sentir plus proche d'eux, car vous en avez quelques-uns dans votre département.
Je vous avais adressé une lettre il y a quelques mois - restée sans réponse - pour vous interroger sur les mécanismes de régulation. Lors du vote de la loi de modernisation de l'économie, vous aviez annoncé des outils de régulation, des prix planchers et des mesures pour éviter le yo-yo. Où en sont les négociations européennes sur le sujet ?
La compétence de l'Observatoire des prix et des marges, s'agissant de l'élevage bovin, peut-elle s'étendre jusqu'aux ovins et aux productions agricoles ? L'écart entre le prix versé aux producteurs et le prix à l'étal est énorme. Lorsque le prix du pain se renchérissait, on invoquait le cours de la farine mais lorsqu'il a diminué, la baguette est restée au même prix.
Un mot enfin des dotations d'assurance, car les agriculteurs font l'avance de trésorerie. Quand l'année est bonne, ils peuvent le supporter mais lorsque leur revenu provient des subventions, non. Le montant de ma prime d'assurance a doublé cette année, mais, m'a-t-on dit, cela sera compensé par la subvention de l'État... versée au printemps prochain. J'ai été obligé d'aller au Crédit agricole demander une avance de trésorerie - avec des frais...
Aucune filière ne suscite l'indifférence du ministre de l'agriculture, sachez-le - surtout d'un ministre qui est élu de l'Eure, où les terroirs calcaires du sud ont un faible rendement. Un comité de suivi des grandes cultures sera réuni en fin d'année, pour examiner le cas de chaque filière. Mais les statistiques sont sans appel : la situation est meilleure dans les grandes cultures que dans l'élevage.
Il existe à présent un consensus européen en faveur de la régulation, laquelle figure dans la position franco-allemande pour l'avenir de la PAC. Mais la conception française de la régulation est ambitieuse par rapport à ce que veulent la plupart de nos partenaires. Pour nous, filet de sécurité, stockages, interventions ne suffisent pas et il faut aussi faire de la prévention, en particulier élaborer des mécanismes d'alerte pour les flambées ou les effondrements de prix. C'est là-dessus que nous aurons à nous battre.
L'observatoire se penche sur toutes les productions, y compris céréales et ovins. Il met en oeuvre des outils statistiques élaborés mais certains travaux complexes n'ont jamais été conduits : impossible d'expliquer la formation du prix d'un steak. J'ai demandé à Philippe Chalmin de s'intéresser à l'élevage bovin, aux nombreuses ruptures de charge qu'il subit, à la valorisation avant et arrière. Lorsqu'elle part à l'abattoir, la vache de réforme est amortie depuis plusieurs années ; il en va différemment avec la race à viande.
Enfin, je comprends votre problème d'avance de trésorerie, mais il y a la réglementation européenne. Je puis vous indiquer au moins que le niveau de subvention va augmenter.
La viticulture traverse une crise grave. Les producteurs français sont unanimement opposés à la disparition des droits de plantation : la vigne redescendrait des coteaux dans la plaine, ce serait la surproduction, la chute des prix assurée, la fin des efforts de qualité et il faudrait débloquer des moyens budgétaires considérables pour faire face à la surproduction. Il importe de réintroduire dans la réforme de la PAC le système des droits de plantation. Je connais votre position, celle de Mme Angela Merkel, celle du rapporteur Gérard César. Mais le Président de la République ? Il est essentiel que la France prenne la tête des pays favorables au maintien des instruments de régulation.
Les investissements matériels dans la viticulture relèvent soit du Fonds européen agricole de garantie (Feaga), soit du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader). Du fait d'une surconsommation en 2010, vous auriez, Monsieur le ministre, décidé de clore cette enveloppe. Il conviendrait de modifier la ligne de partage afin de sortir de l'OCM (Organisation commune des marchés) et de faire financer les investissements matériels par le Feader, à l'instar de ce qui a été fait pour l'irrigation. Pour cela, il faut une notification du ministre à la Commission européenne.
Vous avez affiché le rétablissement de 150 postes d'enseignants en 2010, soit pour un trimestre, un équivalent temps plein de 50 postes. Or l'année scolaire se poursuit en 2011, mais je ne trouve aucun crédit correspondant dans votre budget. La filière d'enseignement technique agricole, pourtant de grande qualité, est menacée. Quel dommage. A force de réductions d'effectifs, on a commencé à attaquer le gras et, à un certain niveau, la filière risque de perdre sa cohérence.
La production de viande bovine est en déclin. Même la Franche-Comté a perdu 5.000 têtes ces dernières années. La commission départementale d'orientation agricole n'a pu répondre à toutes les demandes d'aides à la modernisation des bâtiments d'élevage, car elle accorde la priorité aux aides aux jeunes agriculteurs et à la mise aux normes. Pourtant, des subventions de modernisation de 30 à 40 %, cela donne de la compétitivité ! Il faut en faire une priorité.
L'ESB (encéphalopathie spongiforme bovine) existe-t-elle toujours ou a-t-elle été éradiquée ? L'élimination de la moelle épinière, de la cervelle, le désossement, ont-ils encore une raison d'être ? Car c'est une valorisation de la carcasse que l'on s'interdit.
Quant au prix payé aux producteurs, tant qu'il n'y aura pas d'obligations imposées aux grandes surfaces, rien ne changera. M. Michel-Edouard Leclerc disait ce matin sur une radio « qu'il n'en a rien à faire » et que seuls les consommateurs comptent...
Enfin, où en est la filière bois-énergie ?
Où en est la mise en place des constats communs sur les réserves de pêche, établis conjointement par les scientifiques et les pêcheurs ? Vous l'aviez annoncée lors de la discussion du projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche. Une date butoir a été prévue pour établir les schémas de zones d'aquaculture. Les préfets ont-ils commencé à travailler ?
Le général de Gaulle avait qualifié Fécamp de «port de mer et qui entend le rester ». Aujourd'hui, nous importons 80 % des produits consommés, alors que la France possède de très vastes zones de pêche, par exemple autour des Kerguelen ou au large de La Réunion, où les autres pêchent abondamment: comment y relancer l'activité ?
Dans la production agricole, il faut aller vers une harmonisation du niveau des coûts de production, notamment avec notre partenaire allemand. Et ne pas oublier que dans la production de porc ou de lait, ce qui contribue à la position concurrentielle des agriculteurs allemands par exemple, ce sont les revenus complémentaires qu'ils obtiennent avec les installations de méthanisation...
Les charcutiers, les bouchers nous interrogent sur les matériaux à risque spécifié, sur le retrait des colonnes vertébrales. L'idée de réintroduire les farines animales dans l'alimentation des animaux court de temps en temps : qu'en est-il exactement ?
Compte tenu de l'évolution du prix de la viande de cheval et depuis la réforme des haras, les chevaux lourds, les chevaux de trait, disparaissent. C'est une perte...
L'interprofession de la filière bovine, qui comprend les producteurs, les importateurs, les équarisseurs, s'interrogent sur la concurrence que l'Amérique latine peut nous faire.
La baisse importante des crédits de l'action 16 correspond à la fin du plan « pour une pêche durable et responsable », d'accord. Mais d'autres diminutions touchent par exemples des interventions socio-économiques - les crédits passent de 13,16 millions d'euros à 6,8 millions en 2010. Sur les contrats bleus, où en sont les paiements pour 2008 et 2009 ? Où en est-on de la création d'une interprofession de la pêche ? Quelles sont les perspectives économiques de la conchyliculture et quelles sont les pistes pour surmonter la crise aiguë de la surmortalité des naissains ? Avez-vous une stratégie nationale pour sauver la filière ?
Je rejoins les préoccupations d'Evelyne Didier sur l'enseignement agricole. Quant à l'élevage équin, les chevaux lourds doivent être subventionnés, car il est important de pérenniser ces races... Des emplois sont aussi en jeu !
Comme ancien ministre de l'agriculture, je m'abstiens souvent dans le débat budgétaire. Mais je voudrais dire que j'adhère à la vision du ministre sur les contrats d'avenir. Le monde agricole a compris qu'il ne pouvait pas continuer à tabler sur des financements européens ou autres. Une partie de la profession souhaite des contrats - mais il faut qu'ils soient établis dans la transparence.
Oui à la Maison France mais je ne partage pas tout à fait votre avis, monsieur le ministre, sur les AOC. Pour soutenir le secteur viticole, il faut multiplier les crédits à l'exportation, aider toutes les entreprises, le gros négoce comme les caves particulières, à gagner des marchés à l'exportation, par exemple à Hong-Kong ou Singapour - comme le fait ma région.
Quel est votre avis, Monsieur le ministre, sur les crédits de l'enseignement supérieur et de la recherche ; et sur l'innovation, qui est la condition d'avenir de l'agriculture ?
Quel est pour l'essentiel la situation de la France dans le monde actuellement ? Les soutiens sont des vitamines pour notre agriculture, mais l'élément de fond, ce sont les prix. Comment peuvent-ils évoluer ?
On a réalisé 125 millions d'euros d'économies grâce à la non-reconduction de la mesure rotationnelle alors que cela encourage l'agriculture durable. La PAC ne reviendra sur cette question qu'à partir de 2013. Pourquoi dès lors supprimer l'éco-conditionnalité dans le budget 2011 ?
Je souscris à l'analyse de Roland Courteau et le Gouvernement français est opposé à la suppression des droits de plantation. Il y va de la survie des petits viticulteurs et du modèle français.
Si l'enveloppe des investissements a été clôturée en avril, c'est que les 180 millions d'euros étaient attribués. Les années passées, on avait observé une sous-consommation des crédits : nous avons décidé de fonctionner par appels à projets et nous avons reçu 400 millions d'euros de demandes ! Votre suggestion concernant le Feoga et le Feader est intéressante, nous attendons une réponse de la Commission européenne à ce sujet.
Je veux dire à Evelyne Didier que le moratoire 2010 ne vaut que pour l'année 2010-2011. Les suppressions d'emplois, cependant, ont été mesurées au plus près afin d'épargner au maximum l'enseignement agricole. Gérard Bailly, vous avez raison, la modernisation des bâtiments d'élevage est une question majeure, du reste le niveau des dotations - 29 millions d'euros - est intégralement maintenu. A cela s'ajoutent les 300 millions d'euros, sur trois ans, du plan de développement des filières, qui comporte notamment des aides au départ mais aussi des mesures de modernisation des bâtiments au nom du bien-être animal, qui sont un vrai souci pour beaucoup d'éleveurs.
Les obligations concernant la moelle épinière et la cervelle sont à l'étude, nous prendrons une décision dans le respect, bien sûr, de la sécurité sanitaire. Nombre de pays européens ont levé les interdictions et on nous interroge sur les raisons d'être plus strictes que nos voisins.
A Charles Revet je veux dire que nous avons créé une nouvelle structure, dotée de 5 millions d'euros, où pêcheurs et scientifiques travaillent ensemble, si bien que les relations s'apaisent. Mais il y ensuite les choix politiques. Sur le thon rouge, par exemple, on sait qu'un quota de 13 500 tonnes en 2011 nous donne plus de 50 % de chances d'atteindre en 2022 le rendement maximum durable. A 6 000 tonnes, c'est 100 % de chances, mais alors, nous menaçons 500 emplois de pêcheurs artisanaux. Nous avons fait le choix de rester à 13 500 tonnes, sans toucher un seul emploi, c'est un arbitrage politique plus sérieux que certaines estimations techniques au doigt mouillé ! Nous avons commencé à travailler sur les schémas de l'aquaculture. Nous aurons des résultats avant la fin de l'année.
Sur la méthanisation, pratique courante en Allemagne, nous sommes très en retard et des crédits ont été débloqués - il y a là une source d'amélioration notable des revenus des éleveurs.
A Gérard Le Cam, j'indique que des propositions ont été formulées pour intégrer des farines animales à la nourriture porcine, uniquement. J'ai demandé à l'Agence nationale de sécurité sanitaire un avis très rigoureux et j'attends sa réponse avant de prendre une décision.
Il est une question politique essentielle, qui m'inquiète : il s'agit des négociations avec le Mercosur (marché commun comprenant le Brésil, l'Argentine, l'Uruguay et le Paraguay auxquels sont associés le Chili et la Bolivie) et l'OMC sur l'élevage bovin. La bataille est difficile, les pressions sur la Commission fortes. Nos interlocuteurs au plan mondial demandent que nous laissions entrer des quantités données de viande bovine, en contrepartie de compensations dans le secteur des services ou sur d'autres secteurs économiques. Nous n'avons pas, soit dit en passant, d'assurances sanitaires ni environnementale sur ces produits. Une vigilance absolue s'impose, afin que tous nos efforts pour soutenir nos producteurs, pour restructurer l'offre, valoriser les carcasses, ne soient pas réduits à néant.
En matière de pêche, les contrats bleus sont reconduits en 2011 au même niveau. Sur la conchyliculture, la mobilisation de tous est indispensable. On a constaté une mortalité de 75 % des huîtres dans certains bassins. Les coûts explosent et les prix ne peuvent pas monter indéfiniment. Nous avons fait venir de nouvelles souches du Japon, le résultat n'est pas concluant... Il faut continuer, si besoin est, en plus du soutien actuellement dispensé, je dégagerai les moyens nécessaires même si le budget ne les prévoit pas. La reconnaissance de calamité agricole a été prononcée pour 2010. J'en prends l'engagement pour ne pas laisser disparaître une filière à laquelle je suis particulièrement attaché.
L'innovation est essentielle, c'est pourquoi les crédits et les emplois sont maintenus. Je vous rejoins, François Patriat, dans vos propos sur la viticulture ; le développement repose sur la conquête de parts de marché, la valorisation des produits à l'exportation. Mais la moitié des vins sont en AOC, je crois que cela représente une difficulté. On a tort de ne pas miser davantage sur les cépages, les vins sans IGP (indication géographique protégée), la conjugaison des volumes et de la qualité, à prix stable. Les Chinois ont signé avec le groupe Castel un contrat sur 30 millions de bouteilles par an - c'est déjà énorme ; le prochain contrat, ont-ils prévenu, portera sur 60 millions. Si le producteur français ne peut pas suivre en garantissant prix, volumes et qualité sur cinq ans, ils iront chercher ailleurs. Pour un Bordeaux AOC à 9 euros produit sur une petite surface, le débouché est difficile à trouver...
Jean Boyer, la compétition agricole fait rage dans le monde. Il y a nos voisins, comme les Allemands. Il y a les pays d'Amérique du sud, en particulier le Brésil - nous savions qu'ils allaient être de rudes concurrents, mais pas si rapidement ! La compétition se noue autour du prix mais aussi du modèle économique, de l'utilisation des OGM, des rendements à l'hectare, des biotechnologies... Si nous arrêtons la recherche et négligeons l'innovation, nous sommes morts. Nous devons défendre notre modèle, mais celui-ci est totalement minoritaire. Seules l'Italie et en partie l'Espagne travaillent comme nous, avec des exploitations de taille moyenne au rendement équilibré, en agriculture durable, sur tout le territoire, avec des produits à forte valeur ajoutée. Tout le reste du monde ne jure que par les prix et les volumes. Nous devons donc être imaginatifs. Par exemple, si le prix directeur de la viande est celui de la vache de réforme, et que nous produisons de la qualité avec des races particulières, il faut nous adapter, sinon notre modèle agricole disparaîtra.
Les crédits pour l'agriculture durable, Jacques Muller, sont intégralement maintenus ; il y a des retards, qui seront rattrapés facilement.
Nous poursuivons l'effort en 2011 pour combler notre retard sur les biocarburants. Les soutiens à la filière équine diminuent mais je souhaite que cela n'affecte pas le cheval de trait.
Le loup ! Ce week-end encore un troupeau de chèvres a été éventré. Il y a quinze jours, c'étaient des brebis. Ce n'est plus acceptable. Les éleveurs ne veulent pas un dédommagement financier, mais l'éradication du prédateur ! On a tout essayé, les effarouchements ne lui font pas peur. Les agents de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) sont consternés, car ils sont démunis du matériel adéquat pour chasser le loup la nuit.
Vous connaissez ma position. J'en rediscuterai avec mon collègue de l'environnement. Mais un peu de bon sens ne ferait pas de mal...