Je suis également très heureux de venir vous présenter mes crédits et de répondre à vos questions.
Le projet de loi de finances prévoit de doter mon ministère en crédits de paiement de 5,27 milliards en 2011, de 5,22 milliards en 2012 et de 5,16 milliards en 2013. Par rapport aux 5,17 milliards pour 2010, la hausse est de 1,8 %, grâce au redéploiement des crédits libérés par l'arrivée à échéance des dispositifs antérieurs. Cette hausse s'annule néanmoins progressivement en raison des économies réalisées grâce à la réduction des coûts de gestion des services de l'État et des structures d'accompagnement.
Mon souci principal est d'accompagner la reprise économique dans le secteur agricole et de préserver les crédits d'investissement, de modernisation et d'innovation du programme 154 « Agriculture - pêche » afin qu'ils bénéficient à tous les agriculteurs.
Ce programme est doté de 2 milliards de crédits de paiement. J'ai souhaité réaliser des économies pour pouvoir mieux investir dans d'autres domaines, plus utiles pour les agriculteurs eux-mêmes. Ces économies résultent de l'arrivée à échéance de dispositifs antérieurs : le plan de soutien exceptionnel à l'agriculture, ce qui permet d'économiser 150 millions d'euros en CP ; la non-reconduction de la mesure rotationnelle, d'où une économie de 135 millions en AE ; le bilan de santé de la PAC, soit une économie de 22 millions en CP. Enfin, nous avions budgété 31 millions en CP pour la taxe carbone : comme elle n'a pas été mise en oeuvre, cela fait autant d'économie pour le programme 154.
Au-delà de ces économies mécaniques, des réformes ont été engagées par mon ministère dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP). Ainsi en est-il de la rationalisation des crédits de FranceAgriMer, qui permet de dégager 15 millions de CP, de la réaffectation des 9,6 millions d'euros de génétique animale et de sélection végétale sur le compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural » (CASDAR), de la réforme des aides aux associations départementales pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles (ADASEA), soit 6 millions d'économies, de la réduction des dépenses de fonctionnement de l'administration qui représente près de 16 millions d'économies sur trois ans. Ainsi, le développement de la télé-déclaration est plus rapide que prévu et permet de faire plusieurs millions d'économie chaque année.
Toutes ces économies permettent de renforcer les mesures de soutien au revenu des agriculteurs. C'est ma priorité absolue : nous avons donc décidé de maintenir intégralement la prime nationale supplémentaire à la vache allaitante (ANSVA), soit 165 millions d'euros. Il en est de même pour l'indemnité compensatoire de handicap naturel (ICHN) pour 248 millions. Les élus de la montagne savent que le maintien de cette indemnité est un choix politique majeur en faveur des agriculteurs de ces zones défavorisées.
Les crédits nécessaires ont également été prévus pour couvrir un engagement que j'avais pris devant vous lors de l'examen de la loi de modernisation de l'agriculture (LMAP) : il s'agit du renouvellement intégral des contrats de primes herbagères agro-environnementale (PHAE) opérés en 2010. Nous avons donc prévu 65 millions d'euros en CP et l'intégralité des contrats sera honoré jusqu'en 2014. Nous renouvellerons par anticipation les contrats arrivant à échéance en 2011 et en 2012. Tout cela à un coût élevé mais il sera cofinancé par l'État et par l'Union européenne.
Enfin, les crédits en faveur de l'installation des jeunes agriculteurs sont sanctuarisés à hauteur de 350 millions d'euros.
Ces trois points sont vraiment essentiels.
Les crédits du programme 154 permettront également de renforcer la compétitivité de nos filières. Nous allons accompagner la modernisation de l'agriculture en mobilisant 300 millions sur trois ans pour financer les plans de développement par filière : 180 millions sur le budget de l'État sur trois ans, soit 60 millions par an, et 120 millions sur trois ans provenant de la taxe sur le foncier agricole que vous avez adoptée dans la LMAP. Ces plans de développement sont indispensable pour réaliser des économies d'énergie dans les exploitations, gagner en compétitivité, financer les mises aux normes de certains élevages, notamment en raison des nouvelles règles de bien-être animal qui s'appliqueront en 2013.
Nous allégeons également certaines contraintes qui induisent des distorsions de concurrence vis-à-vis de nos voisins européens. Nous avons exonéré le travail occasionnel de toutes charges sociales, soit un surcoût pour le budget de l'État de 170 millions d'euros en année pleine par rapport au dispositif antérieur. L'ensemble des exonérations de charges sur le travail occasionnel s'élève à 492 millions. Le prix du travail occasionnel en France, 11,29 € de l'heure, doit en effet parvenir à peu près au même niveau que chez nos voisins, dont l'Allemagne, où il est de 9,26 €. Ces mesures ne permettent néanmoins pas de résoudre le problème du coût du travail permanent, ce qui pèse sur la compétitivité de la filière agricole française. Il est ainsi difficile d'être compétitif quand nos voisins allemands utilisent du personnel polonais sous contrat de service à 6 euros de l'heure alors que nos salariés sont payés 12,3 euros. Le problème reste donc posé. Je vous demande de nous faire rapidement des propositions constructives.
Enfin, nous allons réformer la gouvernance de la pêche et développer l'aquaculture, chère à Charles Revet. Nous poursuivrons certaines actions innovantes en matière de pêche, comme les contrats bleus, bénéficiant de 10 millions d'euros par an. Nous renforcerons la recherche en matière de ressources halieutiques, en y consacrant 5 millions. Il faut encourager un véritable partenariat entre pêcheurs et scientifiques, pour mettre fin au face à face actuel stérile.
J'en viens au programme 206 : « Sécurité et qualité sanitaire » dont les crédits baissent de 12,7 % en CP. Cette diminution significative résulte du transfert du financement et de la gestion de l'équarrissage aux filières professionnelles et de la fin de l'élimination des farines animales, soit une économie de 27 millions en CP ; du transfert aux services du Premier ministre des crédits mutualisés des directions départementales interministérielles, soit près de 17 millions en CP. Nous ne baissons donc pas la garde sur la sécurité et la qualité sanitaire mais nous procédons à des réajustements. Pour preuve, le budget de la nouvelle Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSéS), qui résulte de la fusion de la l'AFSSA et de l'AFSSET, augmente de 3,7 millions.
Les crédits prévus pour améliorer la qualité de l'offre alimentaire augmente de 0,7 millions en CP. Les crédits dédiés à la protection des végétaux et des animaux sont stables. Enfin, le projet de loi de finances intègre les conclusions des États généraux du sanitaire avec le financement des réseaux d'épidémio-surveillance pour 750 000 euros et la responsabilisation des éleveurs en matière de soins vétérinaires.
Un mot sur la forêt, sujet majeur s'il en est. Mes deux priorités sont les suites de la tempête Klaus et la gestion de l'Office national des forêts (ONF). Comme l'a souhaité le Président de la République, 371 millions seront consacrés au développement des forêts, soit une hausse d'environ 10 % des CP. Près de 25 % de ceux-ci sont destinés à la reconstitution des forêts touchées par cette terrible tempête.
Le renforcement de l'ONF est une préoccupation majeure. J'ai lu avec attention les recommandations faites par mon prédécesseur, Hervé Gaymard, qui propose plusieurs solutions pour parvenir à l'équilibre financier. Nous avons équilibré le budget pour 2011 en augmentant la subvention du ministère de l'agriculture de 5 millions. Nous avons maintenu les 144 millions du versement compensateur sur la programmation pluriannuelle 2011-2013. Nous devrons néanmoins nous interroger l'année prochaine sur les choix que nous voulons faire en matière d'équilibre financier de l'ONF, car nous ne pourrons continuer à augmenter systématiquement les dotations du ministère de l'agriculture.
Grâce à votre mobilisation, le Premier ministre a décidé de maintenir le programme «Enseignement technique agricole » dans la mission « Enseignement scolaire ». C'est une excellente décision. Rien n'aurait été plus dommageable que d'isoler l'enseignement agricole en le délégant entièrement à mon ministère. Nous consacrerons 1,6 milliard d'euros à l'enseignement agricole dont 1,3 à l'enseignement technique et 300 millions à l'enseignement supérieur et à la recherche. Pour 2010, j'avais annoncé un moratoire sur la suppression de postes d'enseignants agricoles. Pour l'année prochaine, la règle d'un remplacement pour deux départs ne sera pas appliquée dans ce domaine : seuls 25 % des départs à la retraite ne seront pas remplacés, soit 120 postes. S'agissant du départ à la retraite des autres fonctionnaires de mon ministère, nous poursuivrons en revanche le non remplacement d'un départ sur deux : 890 départs sont prévus en 2011 contre 980 en 2010 et cela représente 650 emplois non remplacés en 2011, dont 450 emplois de titulaires.
Les priorités de ma politique sont donc claires : poursuivre le redressement de l'agriculture française, en ne relâchant pas le soutien aux exploitations, aux paysans et aux pêcheurs eux-mêmes, quitte à faire des économies sur les crédits de fonctionnement de mon ministère.