A Charles Revet je veux dire que nous avons créé une nouvelle structure, dotée de 5 millions d'euros, où pêcheurs et scientifiques travaillent ensemble, si bien que les relations s'apaisent. Mais il y ensuite les choix politiques. Sur le thon rouge, par exemple, on sait qu'un quota de 13 500 tonnes en 2011 nous donne plus de 50 % de chances d'atteindre en 2022 le rendement maximum durable. A 6 000 tonnes, c'est 100 % de chances, mais alors, nous menaçons 500 emplois de pêcheurs artisanaux. Nous avons fait le choix de rester à 13 500 tonnes, sans toucher un seul emploi, c'est un arbitrage politique plus sérieux que certaines estimations techniques au doigt mouillé ! Nous avons commencé à travailler sur les schémas de l'aquaculture. Nous aurons des résultats avant la fin de l'année.
Sur la méthanisation, pratique courante en Allemagne, nous sommes très en retard et des crédits ont été débloqués - il y a là une source d'amélioration notable des revenus des éleveurs.
A Gérard Le Cam, j'indique que des propositions ont été formulées pour intégrer des farines animales à la nourriture porcine, uniquement. J'ai demandé à l'Agence nationale de sécurité sanitaire un avis très rigoureux et j'attends sa réponse avant de prendre une décision.
Il est une question politique essentielle, qui m'inquiète : il s'agit des négociations avec le Mercosur (marché commun comprenant le Brésil, l'Argentine, l'Uruguay et le Paraguay auxquels sont associés le Chili et la Bolivie) et l'OMC sur l'élevage bovin. La bataille est difficile, les pressions sur la Commission fortes. Nos interlocuteurs au plan mondial demandent que nous laissions entrer des quantités données de viande bovine, en contrepartie de compensations dans le secteur des services ou sur d'autres secteurs économiques. Nous n'avons pas, soit dit en passant, d'assurances sanitaires ni environnementale sur ces produits. Une vigilance absolue s'impose, afin que tous nos efforts pour soutenir nos producteurs, pour restructurer l'offre, valoriser les carcasses, ne soient pas réduits à néant.
En matière de pêche, les contrats bleus sont reconduits en 2011 au même niveau. Sur la conchyliculture, la mobilisation de tous est indispensable. On a constaté une mortalité de 75 % des huîtres dans certains bassins. Les coûts explosent et les prix ne peuvent pas monter indéfiniment. Nous avons fait venir de nouvelles souches du Japon, le résultat n'est pas concluant... Il faut continuer, si besoin est, en plus du soutien actuellement dispensé, je dégagerai les moyens nécessaires même si le budget ne les prévoit pas. La reconnaissance de calamité agricole a été prononcée pour 2010. J'en prends l'engagement pour ne pas laisser disparaître une filière à laquelle je suis particulièrement attaché.
L'innovation est essentielle, c'est pourquoi les crédits et les emplois sont maintenus. Je vous rejoins, François Patriat, dans vos propos sur la viticulture ; le développement repose sur la conquête de parts de marché, la valorisation des produits à l'exportation. Mais la moitié des vins sont en AOC, je crois que cela représente une difficulté. On a tort de ne pas miser davantage sur les cépages, les vins sans IGP (indication géographique protégée), la conjugaison des volumes et de la qualité, à prix stable. Les Chinois ont signé avec le groupe Castel un contrat sur 30 millions de bouteilles par an - c'est déjà énorme ; le prochain contrat, ont-ils prévenu, portera sur 60 millions. Si le producteur français ne peut pas suivre en garantissant prix, volumes et qualité sur cinq ans, ils iront chercher ailleurs. Pour un Bordeaux AOC à 9 euros produit sur une petite surface, le débouché est difficile à trouver...
Jean Boyer, la compétition agricole fait rage dans le monde. Il y a nos voisins, comme les Allemands. Il y a les pays d'Amérique du sud, en particulier le Brésil - nous savions qu'ils allaient être de rudes concurrents, mais pas si rapidement ! La compétition se noue autour du prix mais aussi du modèle économique, de l'utilisation des OGM, des rendements à l'hectare, des biotechnologies... Si nous arrêtons la recherche et négligeons l'innovation, nous sommes morts. Nous devons défendre notre modèle, mais celui-ci est totalement minoritaire. Seules l'Italie et en partie l'Espagne travaillent comme nous, avec des exploitations de taille moyenne au rendement équilibré, en agriculture durable, sur tout le territoire, avec des produits à forte valeur ajoutée. Tout le reste du monde ne jure que par les prix et les volumes. Nous devons donc être imaginatifs. Par exemple, si le prix directeur de la viande est celui de la vache de réforme, et que nous produisons de la qualité avec des races particulières, il faut nous adapter, sinon notre modèle agricole disparaîtra.
Les crédits pour l'agriculture durable, Jacques Muller, sont intégralement maintenus ; il y a des retards, qui seront rattrapés facilement.
Nous poursuivons l'effort en 2011 pour combler notre retard sur les biocarburants. Les soutiens à la filière équine diminuent mais je souhaite que cela n'affecte pas le cheval de trait.