Intervention de Rachida Dati

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 12 novembre 2008 : 2ème réunion
Pjlf pour 2009 — Mission justice - Audition de Mme Rachida daTi garde des sceaux ministre de la justice

Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice :

a indiqué que les crédits du ministère de la justice progresseraient, en 2009, de 167 millions d'euros pour atteindre 6,66 milliards d'euros, soit une hausse de 2,65 %, et que 952 emplois supplémentaires seraient créés.

Elle a cité, parmi les priorités de l'action de son ministère, la lutte contre la récidive qui s'était d'abord traduite par une politique pénale ferme. Ainsi, la loi du 10 août 2007 a permis de condamner plus de la moitié des récidivistes à des peines-plancher. Par ailleurs, la délinquance générale a baissé de 3,5 % sur les douze derniers mois et en particulier, pour la première fois depuis 1995, le nombre d'agressions contre les personnes a diminué depuis mars 2008.

a présenté ensuite les principaux axes d'une politique pénitentiaire qu'elle a jugé ambitieuse :

- l'amélioration des conditions de détention avec l'ouverture programmée, en 2009, de sept établissements, soit 5.130 places et le recrutement de 1.087 agents dont 917 surveillants ;

- le renforcement des actions de réinsertion des détenus à travers une politique d'aménagement de peine dynamique (près de 6.000 peines aménagées aujourd'hui, contre 2.000 en moyenne annuelle entre 2002 et 2007), la création de 500 emplois de conseillers d'insertion et de probation d'ici à 2012, dont 170 en 2009 et la mise en service, l'année prochaine, de 2.500 bracelets électroniques (12.000 étant prévus au total en 2012).

a estimé que les 63.000 places disponibles en 2012 permettraient d'en finir avec le problème de la surpopulation carcérale.

La ministre a indiqué que la modernisation de l'organisation judiciaire constituait une deuxième priorité afin de parvenir à une justice plus efficace. Elle a relevé que la réforme de la carte judiciaire en constituait la première étape avec le regroupement des moyens sur 863 juridictions (au lieu de 1.200) pour un coût total de 427 millions d'euros (385 millions d'euros pour l'immobilier, dont 70 en 2009 ; 21,5 millions d'euros pour les primes de restructuration versées aux magistrats et fonctionnaires ; 20 millions d'euros pour les avocats). Elle a confirmé que le calendrier serait tenu et même anticipé, alors que le terme prévu était fixé au 31 décembre 2010. Elle a noté en outre qu'une nouvelle génération de maisons de justice et du droit serait parallèlement développée, six de ces MJD étant expérimentées en 2009.

a indiqué que la réforme des contentieux constituerait la deuxième étape de la modernisation de l'organisation judiciaire et s'inspirerait des recommandations de la commission sur la répartition des contentieux présidée par le recteur Serge Guinchard.

Elle a marqué sa volonté de déjudiciariser des infractions et des actes civils de la vie courante en instituant : une possibilité de divorce par consentement mutuel sans audience, un barème national des pensions alimentaires, une médiation obligatoire pour les conflits familiaux postérieurs à un divorce ou encore des procédures simplifiées pour les primo-délinquants et les petits délits routiers.

Soulignant la difficulté de présenter au Parlement un projet de loi mettant en oeuvre l'ensemble des recommandations de la commission sur la répartition des contentieux, elle s'est félicitée de ce que certaines d'entre elles aient pu être reprises dans la proposition de loi de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures, adoptée par l'Assemblée nationale le 16 octobre 2008 à l'initiative de M. Jean-Luc Warsmann, et a formé le voeu que d'autres puissent également faire l'objet d'initiatives parlementaires.

a par ailleurs souligné que les tribunaux utilisaient désormais les nouvelles technologies de l'information et de la communication. Ainsi, elle a apporté les éléments suivants :

- les avocats n'ont plus à se déplacer pour obtenir la copie d'un dossier, car ils la reçoivent directement sous forme d'un CD-ROM ;

- la mise en état des affaires civiles est largement dématérialisée, avec l'échange des pièces par voie électronique entre avocats et magistrats, ce qui devrait permettre une réduction des délais de jugement ;

- les transferts de détenus entre les prisons et les tribunaux sont de moins en moins nombreux grâce au recours à la visioconférence.

Elle a indiqué que cette modernisation serait poursuivie en 2009, grâce à une augmentation de 7,6 % du budget informatique du ministère de la justice, d'une part, et à la création de 59 postes de magistrat et de 150 postes de greffier, d'autre part. Les nouveaux postes de magistrat, a-t-elle précisé, permettront de renforcer les effectifs des juges des tutelles et des juges de l'application des peines.

a ajouté que cette réorganisation ne concernerait pas seulement les juridictions :

- l'administration centrale, après avoir vu deux de ses directions supprimées, disposera d'un budget de 249 millions d'euros en 2009, n'obtiendra le remplacement d'aucun départ à la retraite, et devra poursuivre une politique des ressources humaines qui s'est déjà traduite par la réception de cinq cents magistrats pour des entretiens de carrière ;

- des synergies seront créées entre les services déconcentrés, avec notamment la réduction de quatorze à neuf du nombre des directions régionales de la protection judiciaire de la jeunesse, dont les périmètres coïncideront avec ceux des directions régionales de l'administration pénitentiaire au 1er janvier 2009.

Enfin, Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice, a mis en exergue la rénovation de la formation des magistrats, volet essentiel de la réforme de la justice, en exposant qu'en 2009, le concours serait modernisé et plus ouvert et que la formation initiale serait davantage centrée sur les qualités humaines dont doit témoigner tout magistrat, conformément aux recommandations de la mission d'information de la commission des lois du Sénat conduite par MM. Pierre Fauchon et Charles Gautier et de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur les dysfonctionnements de la justice dans l'affaire d'Outreau.

a indiqué que la refonte du droit applicable aux mineurs délinquants constituerait la troisième de ses priorités pour 2009, avec pour objectifs d'améliorer la prise en charge de ces mineurs, de mieux protéger la société et d'éviter un empilement des mesures de suivi.

Elle a précisé que le rapport de la commission chargée de faire des propositions de réforme, présidée par le recteur André Varinard et au sein de laquelle siègent cinq sénateurs, devrait lui être remis à la fin du mois de novembre.

Estimant que les centres éducatifs fermés avaient fait la preuve de leur efficacité, dans la mesure où 61 % des mineurs qui y ont été pris en charge n'ont pas récidivé dans l'année ayant suivi leur sortie et 84 % ont réintégré un cursus scolaire, elle a annoncé la création de sept nouveaux centres en 2009 et l'extension des moyens de prise en charge des jeunes atteints de troubles mentaux qui y sont accueillis, après une expérimentation lancée en 2008 dans cinq centres.

Elle a également indiqué que la direction de la protection judiciaire de la jeunesse disposerait d'un budget de 787 millions d'euros en 2009.

a exposé que la quatrième de ses priorités, et non des moindres, serait d'obtenir une réelle prise en compte des victimes.

Elle a tout d'abord rappelé la création :

- le 1er janvier 2008, du juge des victimes, qui a déjà fait l'objet de trois cents saisines ;

- le 1er octobre 2008, du service d'aide au recouvrement des victimes (SARVI), qui doit éviter aux quelque 72.000 victimes qui ne sont pas éligibles à la Commission d'indemnisation des victimes (CIVI), alors qu'elles ont obtenu en justice des dommages et intérêts, d'avoir à accomplir elles-mêmes des démarches parfois douloureuses pour en obtenir le versement.

Elle a ensuite annoncé :

- la fixation à 11 millions d'euros en 2009 des crédits de l'aide aux victimes, qui connaîtront une progression de 15,8 % par rapport à 2007 ;

- une réforme prochaine de l'aide juridictionnelle destinée à mieux répondre aux besoins des justiciables, saluant à cet égard l'intérêt des propositions formulées par M. Roland du Luart dans un rapport établi au nom de la commission des finances du Sénat ;

- l'ouverture de dix points d'accès au droit dans des quartiers difficiles, dans le cadre du plan « Espoir Banlieues » ;

- la création de nouvelles classes préparatoires à l'école nationale de la magistrature réservées aux candidats issus de milieux défavorisés, une à Douai et l'autre à Bordeaux, en complément des classes déjà créées dans chacun des écoles du ministère de la justice.

En conclusion, Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice, a insisté sur le caractère ambitieux du budget du ministère de la justice pour 2009, en faisant observer que la réforme de l'Etat ne consistait pas à toujours dépenser plus, mais à mettre les bons moyens aux bons endroits.

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