Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en ouvrant, le 20 novembre 2003, le débat national sur l'avenir de l'école, le Président de la République rappelait que « l'école a été le rêve de la République » et qu'elle reste « la plus belle de ses réussites ». Cependant, ajoutait-il, « l'école exprime une forme de désarroi. Elle s'interroge sur le contenu de ses missions ».
Il a souhaité, alors que notre système éducatif cherche un nouveau souffle, que l'ensemble des Français puissent faire partager leurs préoccupations et exprimer leurs attentes et leurs aspirations.
En effet, notre destin collectif est intimement lié à l'avenir de l'école.
La commission du débat national sur l'avenir de l'école, présidée par M. Claude Thélot, à qui je souhaite rendre un hommage appuyé, comme vous l'avez fait, monsieur le ministre, a accompli un travail considérable pour établir la synthèse de ces contributions.
Cette démarche confère une assise et une légitimité toutes particulières au projet de loi d'orientation qui a ensuite été élaboré par le Gouvernement.
A l'occasion d'une rencontre organisée dans ma région, une jeune enseignante m'a semblé avoir trouvé les mots justes pour formuler le constat partagé : « l'école va bien pour les enfants qui vont bien ».
Le projet de loi d'orientation que vous nous présentez aujourd'hui, monsieur le ministre, nourri de ces débats et de nombreuses concertations, vise à permettre à notre école d'aller bien pour tous nos enfants.
L'école de la réussite pour tous, c'est d'abord celle qui assure l'égalité des chances, laquelle n'est pas seulement l'égalité dans l'instant, mais est aussi l'égalité face à l'avenir.
Ce n'est pas par la seule inflation continue des moyens que nous gagnerons ce pari. Dans son rapport intitulé Mieux gérer, mieux éduquer, mieux réussir, la commission d'enquête sénatoriale constituée en 1998, sous la présidence de notre collègue Adrien Gouteyron, nous avait déjà mis en garde contre les limites d'une hausse budgétaire mal maîtrisée.
En effet, pendant plusieurs décennies, notre système éducatif a enregistré une formidable progression, conjuguant massification et démocratisation de l'accès aux niveaux supérieurs de formation. Mais, depuis dix ans, il a atteint un palier, et ce en dépit d'une augmentation de 25 % du budget de l'enseignement scolaire.
La persistance d'inégalités jette le doute sur la capacité de l'école à remplir son rôle de meilleur instrument de promotion sociale. Un enfant d'ouvrier a toujours dix-sept fois moins de chances qu'un enfant de cadre d'accéder à une grande école. Enfin, dans un récent avis, le Haut Conseil de l'évaluation de l'école a montré que la pauvreté, au sens large, - la pauvreté économique et sociale, mais également culturelle -, était la première cause du grand échec scolaire.
L'éducation est notre première priorité nationale. Chacun se sent concerné par ce qui touche à cette question. Le temps est venu pour la nation de se réapproprier son école pour en fixer les grandes orientations, afin qu'elle porte ses espoirs et ses exigences.
La première de ces exigences est que chacun maîtrise, à l'issue de la scolarité obligatoire, un socle commun de connaissances et de compétences indispensables. C'est la condition primordiale de l'efficacité et de la qualité de notre école. C'est avant tout un impératif de justice sociale, en termes d'égalité des chances face à la transmission des savoirs, dès lors que l'école s'adresse à tous les élèves.
A ceux qui prétendent que le socle commun de connaissances constituerait une culture au rabais ou un nivellement des ambitions, je me contenterai de rappeler ces quelques chiffres connus de tous : quand 15 % des élèves entrent en sixième en éprouvant de grandes difficultés en lecture, que 7 % des adolescents de dix-sept ans sont dans une situation proche de l'illettrisme et que 150 000 jeunes sortent chaque année du système scolaire sans qualification et sans maîtrise des bases fondamentales du savoir, garantir à tous la maîtrise d'un socle commun de connaissances est une ambition forte et élevée. Je défie quiconque de dire le contraire !