Intervention de Dominique Leclerc

Commission des affaires sociales — Réunion du 8 novembre 2006 : 1ère réunion
Loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 — Examen du rapport

Photo de Dominique LeclercDominique Leclerc, rapporteur pour l'assurance vieillesse :

a rappelé l'attachement que la commission porte à quelques principes fondamentaux : le respect de l'équilibre financier des régimes de retraite ; la préservation de l'équité entre les générations et notamment à l'égard des jeunes actifs ; la réduction des injustices entre les assurés sociaux ; l'introduction de davantage de transparence dans le fonctionnement de l'assurance vieillesse ; l'amélioration du pilotage et de la gouvernance des régimes, en particulier dans la fonction publique d'Etat ; la simplification des transferts financiers de la « compensation démographique » et la garantie, pour les assurés sociaux du secteur privé, de la neutralité des opérations d'adossement de régimes spéciaux.

Puis, soulignant la situation paradoxale de la branche vieillesse, il a exposé les raisons du déficit constaté depuis deux ans en dépit de l'entrée en vigueur de la réforme de 2003.

Le déséquilibre de la branche vieillesse devrait atteindre 3,5 milliards d'euros en 2007, après 2,4 milliards en 2006 et 1,9 milliard en 2005. Le déficit du fonds de solidarité vieillesse, en revanche, devrait se réduire sensiblement et être ramené à 0,6 milliard d'euros en 2007, après 1,2 milliard en 2006 et 2 milliards en 2005, mais la situation de ce fonds demeure problématique et la Cour des comptes s'est d'ailleurs récemment prononcée en faveur de sa suppression.

Le déficit de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav) tient essentiellement à des facteurs démographiques, notamment aux départs en retraite massifs des premières classes d'âge du baby-boom, et à certaines mesures généreuses de la réforme de 2003, dont celle des carrières longues. La charge de ce dispositif de retraite précoce s'est encore alourdie en raison du fait que les assurés sociaux ont été autorisés à racheter leurs années de cotisations incomplètes ou d'études pour en bénéficier, ce qui n'était pas l'intention du législateur.

s'est également inquiété de la faiblesse persistante du taux d'emploi des seniors. D'abord, les comportements n'ont pas changé ; ensuite, les nombreuses possibilités de contournement du report de l'âge de départ en retraite ont modifié l'esprit de la réforme de 2003 : 124 accords de branches ont été signés en ce sens et huit ont même autorisé des départs avant l'âge de soixante ans, ce qui est illégal.

D'autres mesures sont susceptibles d'aggraver encore la situation, par exemple, la possible dérive des négociations en cours sur la pénibilité du travail vers la création d'un mécanisme supplémentaire de cessation précoce d'activité.

Puis il a évoqué la fragilité de la place de la caisse nationale d'assurance vieillesse dans l'architecture de l'assurance vieillesse, soulignant la vulnérabilité du régime général dans ses rapports avec l'Etat et les autres régimes sociaux, dont témoigne notamment le dossier de l'adossement futur de La Poste.

En réalité, en dépit de son statut, de sa personnalité juridique et de son autonomie financière, le régime général entretient des relations complexes et déséquilibrées avec l'Etat, qui justifie son pouvoir d'intervention sur les équilibres financiers de la Cnav par la contribution financière que lui apportent le fonds de solidarité vieillesse (FSV) et la CSG, qui représente 17 % des recettes de la caisse.

En définitive, la réforme des critères de la compensation démographique de 2002 a fait de la Cnav le financeur en dernier ressort du système de protection sociale, sans qu'elle en ait forcément les moyens. Si l'on devait l'appliquer au Ffipsa, ainsi que certains le soutiennent, il en résulterait une charge annuelle de 700 millions d'euros pour le régime général.

De la même façon, le coût de la généralisation des adossements des régimes spéciaux s'élèverait à environ 300 milliards d'euros d'engagements : 95 milliards pour les industries électriques et gazières (IEG), 23 milliards pour la RATP, 70 milliards pour La Poste et plus de 105 milliards pour la SNCF.

Il serait donc prudent de s'assurer a posteriori de la neutralité de ces opérations pour les assurés sociaux du secteur privé, d'autant que l'obligation légale d'information préalable du Parlement n'est pas respectée. Deux amendements seront, pour ces motifs, présentés visant à sécuriser davantage les prochains adossements, ainsi que le préconise le dernier rapport de la Cour des comptes.

Enfin, M. Dominique Leclerc, rapporteur pour l'assurance vieillesse, a souhaité tirer quelques enseignements de la réforme de 2003 pour préparer la clause de rendez-vous de 2008.

Rappelant son analyse critique du rapport récent du Conseil d'orientation des retraites (COR) sur les prospectives à long terme des régimes de retraite, il s'est inquiété de l'excès d'optimisme de certains scénarios et de la présentation contestable, voire tendancieuse, de certaines informations. Par exemple, en termes de taux de remplacement, le rapport du COR fait apparaître une situation plus avantageuse dans le secteur privé que dans le secteur public, ce qui n'est pas conforme à la réalité.

a par ailleurs plaidé pour que s'engage une réflexion préalable sur la méthodologie de la réforme, en s'inspirant de quelques exemples étrangers, notamment suédois. Le débat devra se concentrer sur les questions prioritaires afin de clarifier les enjeux de la future réforme et envisager l'hypothèse d'une régulation de l'assurance vieillesse à partir des grands paramètres de gestion des régimes, sans procéder à une réforme « lourde » au début de chaque législature, qui se traduit par un psychodrame national. Une telle évolution supposerait l'abandon du mode de calcul des retraites par annuités au profit d'un système par points, comme l'ont fait l'Allemagne en 1992 et la Suède, en 1998, grâce au dispositif des « comptes notionnels ».

En conclusion, M. Dominique Leclerc, rapporteur pour l'assurance vieillesse, s'est ainsi clairement prononcé en faveur d'une réforme structurelle à long terme, car il n'y a guère d'alternative. Ainsi, une hausse massive des cotisations ou de la CSG ne peut être envisagée, car elle se traduirait par une forte baisse du pouvoir d'achat des actifs et un accroissement du coût du travail défavorable aux créations d'emplois et contraire au principe d'équité entre les générations.

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