Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma première observation portera sur la méthode.
Il est vrai que le débat a eu lieu. Il a été riche et nous nous accordons tous à dire qu'il a été utile. De même, le rapport Thélot contenait des avancées significatives, et nous avons tous été intéressés par ce travail.
Vous nous proposez aujourd'hui recourir à la loi. Est-ce un exercice obligé ? Je vous pose la question, monsieur le ministre ! Alors que nous étions dans une dynamique de réflexion positive et qu'il semblait possible de trouver un accord sur de nombreux points, vous avez tout à coup voulu précipiter les choses et recourir à la procédure parlementaire afin d'élaborer une grande loi, dans un contexte difficile qui vient d'être largement décrit.
Je ne suis pas le seul à avoir cette impression. Ainsi, la commission des affaires culturelles a reçu de nombreuses personnalités et toutes se sont étonnées : pourquoi ne pas prendre le temps de la réflexion et se mettre d'accord sur les quelques éléments - ils ne sont pas très nombreux - qui relèvent spécifiquement de la loi ? Vous l'avez d'ailleurs vous-même admis, monsieur le ministre, puisque vous avez déjà retiré de ce texte un certain nombre d'articles.
Cette situation n'est pas nouvelle : face à une crise ou à un problème, on nomme une personnalité d'exception, qui remet un rapport de qualité. Puis vient le temps de la loi, qui fige tout - c'est ce qui risque d'arriver aujourd'hui avec la recherche - et qui referme l'espace d'ouverture que l'on s'était donné. Le moment de réflexion consensuelle que l'on avait su créer cesse alors, tout est terminé. C'est la crispation, les gens sont dans la rue, l'opposition des syndicats est quasi totale, les parents clament leur désaccord...
Cette façon de gouverner ne permet guère de progresser !
Permettez-moi, monsieur le ministre, de penser en cet instant aux responsables de grandes sociétés publiques - la SNCF ou EDF, par exemple -, qui gèrent des centaines de milliers de personnes. Ils dialoguent, cherchent à améliorer les structures, et ils obtiennent des résultats. Pour autant, ils ne réclament pas tous les jours de grandes lois, même si, de temps en temps, des aménagements législatifs s'imposent !
J'ai l'impression qu'ici, avec l'école, on ne s'occupe pas de l'institution. Comment la faire évoluer ? Quelle structure modifier ? Quel système choisir ?
Pour ma part, je m'étonne que soit enclenché un processus législatif accéléré sur une question que tout le monde juge essentielle. Cela crée d'importantes frustrations ! Une telle précipitation était-elle vraiment nécessaire, monsieur le ministre ? On a cité la loi Haby, la loi Jospin, on a dit que ce troisième exercice législatif marquerait une étape considérable dans le processus. Une telle conviction est sympathique, mais je crains que cette étape ne soit inachevée.
Vous annoncez, monsieur le ministre, la création de postes d'infirmières ou l'institution d'heures supplémentaires pour faire de l'accompagnement. C'est formidable ! Mais avec quels budgets ? Au demeurant, de telles mesures nécessitent-elles vraiment une loi ? Ne relèvent-elles pas d'un autre domaine ? Trop de lois tue la loi ! Sur un sujet aussi sensible, il aurait fallu se limiter à des dispositifs strictement législatifs.
J'en viens maintenant au fond.
Nous avons tous entendu de nombreuses personnalités, en commission comme sur le terrain. Comme mes collègues, dans les conseils d'établissement, j'ai rencontré les principaux de collèges ou les proviseurs de lycées. Ils sont respectueux des hiérarchies et connaissent leur sujet. Et je dois admettre qu'ils n'ont pas fait preuve d'un enthousiasme extraordinaire...
Sur l'échec scolaire, par exemple, de nombreux enseignants demandent une évaluation objective. Or, actuellement, personne n'est en mesure de donner des chiffres exacts et de dire si la situation s'est aggravée. Tous les personnels d'éducation regrettent la disparition du Haut Conseil de l'évaluation de l'école au profit du Haut Conseil de l'éducation. Cette institution, à laquelle ils étaient très attachés, permettait pourtant une évaluation des résultats et des comparaisons à l'échelon international.