Intervention de Roland Courteau

Commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire — Réunion du 25 novembre 2009 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2010 — Mission « ecologie développement et aménagement durables » - examen du rapport pour avis

Photo de Roland CourteauRoland Courteau, rapporteur pour avis :

a ensuite présenté le programme « énergie et après-mines », qui s'élève pour 2010 à 818,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 820,3 millions d'euros en crédits de paiement. Il a rappelé que ce programme apparaît très déséquilibré si l'on considère les seuls volumes des crédits, puisque l'action 4 « gestion économique et sociale de l'après-mines », qui est dotée de 756,4 millions d'euros, représente 92 % du total en crédits de paiement. Cette action est pour l'essentiel consacrée aux prestations servies par l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (ANGDM) et par la Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines (CANSSM) aux anciens mineurs et à leurs ayants droit, au nombre d'environ 180 000. L'évolution démographique spontanée de cette population, qui ne se renouvelle plus, explique que les crédits correspondants soient en diminution de près de 5 % en 2010 par rapport à 2009.

Il a souligné que la baisse tendancielle des crédits de l'après-mine permet de dégager une marge de manoeuvre pour l'accroissement des autres actions du programme. C'est ainsi que l'action « politique de l'énergie » est présentée en augmentation de 61 % en crédits de paiement, pour atteindre 38,1 millions d'euros. Ces crédits, qui ne représentent toutefois que 5 % du programme, sont essentiellement consacrés aux subventions à l'ADEME et à l'ANDRA. Leur hausse spectaculaire se justifie par les moyens nouveaux nécessaires à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement. A ce sujet, M. Roland Courteau, rapporteur pour avis, a cité notamment la création du fonds de soutien au développement de la chaleur renouvelable, qui est doté de 110 millions d'euros en crédits de paiement, ainsi que celle du fonds démonstrateur de recherche, doté de 41 millions d'euros, et qui vise à valider en grandeur réelle les technologies émergentes en amont de la phase de déploiement industriel et commercial. Il s'agit du captage et stockage de CO2, de l'énergie solaire, des biocarburants de deuxième génération, du stockage et de la gestion de l'énergie, des véhicules hybrides et électriques, des énergies marines et des bâtiments à énergie positive.

Il a indiqué que l'action « lutte contre le changement climatique » est présentée en hausse de 22 %, pour atteindre 25,8 millions d'euros en crédits de paiement, soit 3 % du programme. Ces crédits sont consacrés en majorité aux subventions au Centre interprofessionnel d'étude de la pollution atmosphérique (CITEPA) et aux Associations agréées de surveillance de la qualité de l'air (AASQA). Mais leur augmentation s'explique principalement par l'accroissement des moyens consacrés à la lutte contre l'intensification de l'effet de serre, qui bondissent de moins de 900 000 euros en 2009 à plus de 4 millions d'euros en 2010. Ces crédits financeront notamment les études nécessaires à la mise en place des schémas régionaux du climat, de l'air et de l'énergie prévus par le projet de loi portant engagement national pour l'environnement.

a observé qu'une particularité du programme « énergie et après-mines » est l'importance des dépenses fiscales qui lui sont attachées. En effet, celles-ci sont estimées pour 2010 à 2,9 milliards d'euros au total. Ce montant impressionnant est à comparer à celui des crédits, qui n'est que de 820 millions d'euros. L'essentiel de ces dépenses fiscales est constitué par le crédit d'impôt pour dépenses d'équipement de l'habitation principale en faveur des économies d'énergie et du développement durable, qui est chiffré à lui seul à 2,6 milliards d'euros. Le reste est constitué de dix-neuf catégories d'incitations fiscales différentes, dont les coûts sont bien plus modestes.

Il a souhaité revenir sur l'un des éléments du crédit d'impôt pour dépenses d'équipement de l'habitation principale en faveur des économies d'énergie, qui a été recentré par la loi de finances initiale pour 2009. C'est ainsi que le taux d'exonération des chaudières au bois a été progressivement abaissé de 50 % jusqu'alors à 40 % en 2009, puis à 25 % à compter de 2010.

a estimé que cette réduction de l'avantage fiscal, votée dans un souci d'économie budgétaire, présente un inconvénient. En effet, environ 4 millions sur les 6 millions du parc des chaudières au bois domestique sont anciennes et ont des performances énergétiques et environnementales faibles, avec un rendement médiocre et un taux d'émissions polluantes élevé. Un label « Flamme verte » a été lancé en l'an 2000, et les performances des appareils n'ont cessé de s'améliorer depuis lors, leur facteur d'émission d'oxyde de carbone ayant été divisé par quatre en moyenne entre 2001 et 2009. Il a donc considéré qu'il conviendrait d'inciter au renouvellement du parc, en maintenant un taux d'exonération de 40 % pour les chaudières qui viennent en remplacement d'un équipement existant.

a rappelé que la commission de l'économie avait adopté, à l'initiative de M. Jean-Claude Merceron et des membres du groupe de l'Union centriste, un amendement en ce sens dans le cadre de l'examen du projet de loi portant engagement national pour l'environnement. Toutefois, en séance publique, le Gouvernement a demandé la suppression de cette disposition, au motif principalement qu'elle serait difficile à contrôler, et le Sénat a bien voulu l'accepter. Il a estimé cette suppression très regrettable. La modernisation du parc des chaudières au bois est non seulement un enjeu en termes d'économies d'énergie et de réduction des émissions polluantes, mais aussi en termes industriels. Les trois quarts des chaudières vendues en France sont de fabrication française, et cette filière représente 20 000 emplois selon l'ADEME. Il a donc estimé opportun de donner un « coup de pouce » à la décision du propriétaire d'une chaudière au bois vieillissante, mais qui hésiterait à la renouveler.

a annoncé qu'il déposerait cet amendement en seconde partie du projet de loi de finances, à titre personnel, en l'assortissant d'une disposition prévoyant que le bénéfice du taux de 40 % est subordonné à la justification de la reprise de l'ancienne chaudière par l'installateur en vue de sa destruction, afin de répondre à l'objection du Gouvernement relative au bon contrôle du dispositif. Bien sûr, le taux demeurera fixé à 25 % pour une première installation. Le coût net de cet amendement, par différence entre le taux de 40 % et le taux de 25 %, est d'environ 30 millions d'euros.

Outre les crédits budgétaires et les dépenses fiscales, M. Roland Courteau, rapporteur pour avis, a mentionné les ressources extrabudgétaires dont disposent les divers organismes intervenant dans le champ de ce programme. En 2009, ces ressources affectées devraient s'élever à 220,7 millions d'euros pour l'ANDRA, 57,4 millions d'euros pour l'ANGDM, 600 000 euros pour le CITEPA et 531,7 millions d'euros pour l'ADEME, qui est destinataire du produit de la taxe générale sur les activités polluantes.

Dans ce domaine, il a évoqué le sujet du financement des commissions locales d'information (CLI), instituées auprès des sites accueillant des installations nucléaires de base, abordé lors de la récente audition par la commission de M. André-Claude Lacoste, président de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN). L'article 22 de la loi du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire, dite « loi TSN », prévoit un financement mixte des CLI par l'Etat et par les collectivités locales concernées. Pour les CLI non dotées de la personnalité morale, le fonctionnement est assuré par des personnels du conseil général. Par contre, les CLI adoptant un statut d'association, comme la loi TSN les y incite, doivent recourir à l'embauche de salariés. M. Roland Courteau, rapporteur pour avis, a estimé qu'il convient qu'une partie au moins de ces charges de personnel soient couvertes par des ressources de niveau national. Or, les crédits dont dispose l'ASN pour subventionner les CLI permettent tout juste de soutenir des actions d'information ou des études, mais non de rémunérer leurs salariés.

Il a rappelé que l'article 22 de la loi TSN prévoit que les CLI dotées de la personnalité juridique peuvent recevoir une partie du produit de la taxe sur les installations nucléaires de base instituée par l'article 43 de la loi de finances pour 2000. Pour l'année 2010, une douzaine de CLI répondraient aux critères pour bénéficier de cette affectation de taxe, dont les conditions doivent être définies par une loi de finances. Sur la base d'une dotation de 50 000 euros au maximum pour chacune d'entre elles, le montant ainsi prélevé sur le produit de la taxe sur les installations nucléaires de base (INB), qui est estimé à 363 millions d'euros pour 2010, serait de 600 000 euros. A terme, il pourrait y avoir une quarantaine de CLI en activité sous statut associatif, ce qui implique un prélèvement s'élevant alors à 2 millions d'euros.

Dans la mesure où cet amendement ne peut plus être déposé en première partie du projet de loi de finances initiale, M. Roland Courteau, rapporteur pour avis, a proposé qu'il soit présenté dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2009, qui viendra bientôt en discussion au Sénat. L'amendement pourrait être cosigné par tous les membres du groupe d'études de l'énergie qui voudront bien se joindre à cette initiative. Dans l'immédiat, il a suggéré à la commission d'adopter un amendement de crédits, qui abonde de 600 000 euros le programme « Prévention des risques », afin de financer les CLI en 2010, dans l'attente de la mise en place du prélèvement sur la taxe INB.

Pour conclure, M. Roland Courteau, rapporteur pour avis, a abordé le développement des énergies renouvelables. Evoquant le rapport de la commission sur le grand emprunt national, coprésidée par MM. Alain Juppé et Michel Rocard, qui fixe le montant souhaité de l'emprunt à 35 milliards d'euros et ventile les investissements qui seront ainsi financés selon sept axes thématiques, il a relevé que l'axe 4, auquel seraient affectés 3,5 milliards d'euros, soit exactement un dixième de la somme empruntée, est consacré au développement des énergies décarbonées et à l'efficacité dans la gestion des ressources.

Il a indiqué que le rapport de la commission propose d'identifier un acteur public consacré au développement de solutions énergétiques décarbonées, qui permettent à la France de rassembler ses forces et ses compétences pour atteindre ses objectifs écologiques ambitieux. Une agence de moyens légers, l'Agence pour les énergies renouvelables, dotée de la personnalité juridique, pourrait rapidement être créée à cet effet, et financée par l'emprunt national pour co-investir dans la recherche partenariale et l'innovation dans le domaine des technologies propres et économes, à l'exclusion du nucléaire. Plus spécifiquement, le rapport de la commission identifie trois actions différentes pour cet axe d'investissement :

- le développement de démonstrateurs et de plateformes coopératives d'expérimentation pour les nouvelles technologies dans les énergies décarbonées et l'économie du recyclage, auquel seraient attribué 1,5 milliard d'euros ;

- la création de cinq à dix instituts de recherche technologique dans le domaine des énergies décarbonées, sélectionnés par un jury international, auxquels seraient attribué 1 milliard d'euros ;

- l'accélération de la transition vers les technologies nucléaires de demain et vers une gestion encore plus efficace des déchets radioactifs, auxquelles seraient attribué 1 milliard d'euros.

Enfin, M. Roland Courteau, rapporteur pour avis, a formulé quelques réflexions à propos des différentes énergies renouvelables (ENR). Rappelant que la France a pris l'engagement d'atteindre le pourcentage de 23 % d'énergies renouvelables dans sa consommation énergétique totale en 2020, ce qui correspond à un accroissement de 20 millions de tonnes équivalent pétrole par rapport à 2006, il a indiqué que cet objectif suppose qu'elle multiplie par deux sa production dans le domaine du bois énergie, par six dans celui de la géothermie, par dix dans l'éolien, et par quatre cents dans celui de l'électricité photovoltaïque.

a estimé que, si le succès n'est jamais assuré, la France semble prendre le chemin pour atteindre cet objectif. Selon les chiffres publiés à la fin du premier semestre de cette année, la production d'électricité éolienne a progressé de 36 % en un an, et celle d'électricité d'origine photovoltaïque de 265 %. Il a considéré que notre pays semble donc avoir effectivement commencé sa transition énergétique. Compte tenu du fait que le potentiel hydraulique est déjà pleinement exploité, sous réserve du développement encore possible de la petite hydraulique, et que le photovoltaïque n'en est qu'à ses débuts, ce sont surtout la biomasse et l'éolien qui permettront d'atteindre l'objectif de 23 % d'ENR dans la consommation finale en 2020.

Il a rappelé que la France est déjà aujourd'hui le premier producteur européen de bois énergie, qui représentait 5 % de la consommation finale énergétique en 2007. Mais le gisement de la biomasse est encore largement inexploité. Ainsi, la récolte annuelle de bois, soit 52 millions de m3, est inférieure à la production biologique de la forêt française, soit 125 millions de m3. La forêt progresse de 48 000 hectares par an. Selon l'ADEME, une ressource supplémentaire de bois pour l'énergie d'environ 7 à 12 millions de tonnes équivalent pétrole (tep) est mobilisable en plus des 9,4 millions de tep prélevées actuellement.

a indiqué que l'autre filière sur laquelle la France devait fonder l'essentiel de ses espoirs est celle de l'énergie éolienne, dont la technologie est à la fois la plus mature et la moins chère. Mais il a constaté que les éoliennes sont aujourd'hui contestées, et estimé qu'il y a eu pendant trop longtemps un défaut d'encadrement de la filière par l'État, qui n'y a pas vraiment cru. En l'absence de véritables schémas directeurs, le développement de l'éolien s'est fait de manière anarchique, suscitant en retour une opposition de plus en plus virulente. Il a espéré que les choses rentreront progressivement dans l'ordre, avec les schémas régionaux du climat, de l'air et de l'énergie prévus par le projet de loi d'engagement national pour l'environnement en cours de discussion.

a estimé que le passage des éoliennes sous le régime des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), voulu par le Gouvernement dans le cadre du projet de loi « Grenelle II », n'est pas réellement une bonne idée, et que la commission de l'économie a eu raison d'introduire dans le projet de loi des dispositions d'accompagnement destinées à atténuer les inconvénients de ce classement ICPE. Il a indiqué que le dispositif est d'ailleurs encore susceptible d'évoluer, puisque l'Assemblée nationale vient de créer une mission d'information sur l'éolien commune à la commission des affaires économiques et à celle du développement durable. Il a considéré que l'une des faiblesses de l'énergie éolienne est l'absence de véritable filière industrielle dans ce secteur en France, même si de nombreuses entreprises françaises en fabriquent déjà des composantes, mais s'est déclaré convaincu que le développement d'une industrie éolienne dans notre pays est encore possible, dès lors qu'existe une volonté politique.

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