Intervention de Thierry Repentin

Commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire — Réunion du 25 novembre 2009 : 2ème réunion
Loi de finances pour 2010 — Mission « ville et logement » - examen du rapport pour avis

Photo de Thierry RepentinThierry Repentin, rapporteur pour avis :

a expliqué que la politique de la ville est extrêmement complexe compte tenu de la multitude de dispositifs qui se superposent. Il a ensuite estimé que la question de l'évolution du zonage est légitime, notamment au regard de l'échec de la politique de lutte contre la pauvreté. Toutefois, il a souligné que le zonage a bien fonctionné en matière de rénovation urbaine. Quoiqu'il en soit, il a considéré que l'Etat doit demeurer le garant de la solidarité territoriale et s'assurer qu'aucune population n'est abandonnée. Il a, à cet égard, regretté que le secrétariat d'Etat au logement et à l'urbanisme soit peu audible, notamment s'agissant du besoin de financement de l'agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) qui s'élève à plus de 1,5 milliard d'euros à l'échéance 2011. Enfin, il a souhaité que le Gouvernement indique clairement aux élus locaux ce qu'il compte faire dans le cadre de la réorientation programmée de la dotation de solidarité urbaine (DSU) en faveur d'un nombre plus restreint de communes.

rapporteur sur les crédits relatifs à la mission « ville et logement », a ensuite présenté les grands axes des programmes consacrés au logement.

Indiquant en préambule que notre pays traverse l'une des crises les plus dures des vingt dernières années, il a expliqué que ce contexte n'est pas sans conséquence sur la situation du logement en France. Ainsi, 340 000 logements ont été mis en chantiers sur les douze derniers mois, soit un repli de 20 % par rapport aux douze mois précédents. Les promoteurs immobiliers craignent en effet de ne pas trouver d'acheteurs, tétanisés par le contexte économique. Or, 270 000 ménages de plus arrivent chaque année sur un marché qui accuse déjà un déficit évalué à 800 000 logements.

En clair, a-t-il indiqué, la France manque de logement, surtout là où elle en aurait le plus besoin, puisque paradoxalement, c'est là où les besoins sont les plus importants que construire coûte le plus cher.

C'est dans son contexte qu'il convient, selon lui, d'analyser le budget du logement. Certes, ce budget évalué à 6,98 milliards d'euros en autorisations d'engagements et 7,1 milliards d'euros en crédits de paiement connaît une hausse de 6 % par rapport à l'année dernière. Toutefois, il a tenu à relativiser immédiatement cette augmentation. En effet, elle ne résulte pas d'un effort particulier du Gouvernement en faveur du logement mais s'explique en réalité par la hausse des aides personnalisées au logement qui augmentent mécaniquement sous l'effet de la montée du chômage pesant directement sur la situation financière des ménages.

A cet égard, il s'est inquiété de l'avenir du financement des aides personnalisées au logement puisqu'une partie de celui-ci provient des cotisations des employeurs, amenées à décroitre sous l'impact du ralentissement économique.

Pourtant, ces aides sont aujourd'hui indispensables, selon lui, pour nos concitoyens. En 2008, plus de 6,3 millions de ménages ont ainsi bénéficié d'une aide personnelle au logement, leur permettant de réduire, dans le secteur locatif comme dans le secteur de l'accession, leurs dépenses de loyers ou de mensualités d'emprunt et charges. C'est pourquoi il a estimé que, en ces temps d'interrogation sur le pouvoir d'achat, le logement est devenu un critère pertinent pour mesurer les disparités de conditions de vie entre les ménages les plus aisés et les plus modestes. Plus généralement, il a constaté que, depuis une vingtaine d'années, ce poste de dépenses a augmenté, passant de 14 % du budget des ménages en 1988 à près de 30 % aujourd'hui. Or, l'élévation du coût du logement est de plus en plus durement ressentie par les ménages qui s'imposent des restrictions sur d'autres postes de leur budget.

S'agissant du programme consacré à la « prévention de l'exclusion » et à « l'insertion des personnes vulnérables », il a fait part de son étonnement en découvrant que 56 % des Français estiment pouvoir un jour se retrouver sans-abri, selon le résultat d'un sondage réalisé le 20 novembre dernier par l'institut CSA pour le compte de l'association Emmaüs.

Ces inquiétudes démontrent, selon lui, à quel point la prévention de l'exclusion et l'insertion des personnes vulnérables doit rester une composante essentielle de la politique du logement en France.

Il a ensuite fait part d'un constat douloureux pour la France : aujourd'hui, près de 8 millions de personnes, soit plus de 13 % des Français, sont confrontés à la pauvreté. C'est pourquoi il s'est étonné de constater une diminution de près de 2 % des crédits consacrés à cette politique alors même que la situation sociale se dégrade sous l'impact de la crise économique.

S'agissant du programme consacré au « développement et à l'amélioration de l'offre de logement », il s'est demandé ce qui peut justifier une baisse de plus de 15 % des crédits budgétés en autorisation d'engagement, alors même que ces dotations sont indispensables pour financer la construction de logements sociaux et la réhabilitation du parc privé et que les besoins en la matière sont considérables. C'est pourquoi il a considéré que le désengagement progressif de l'Etat est inacceptable, dans la mesure où la mobilisation des opérateurs du logement social ne cesse de se confirmer et de s'amplifier et que les collectivités locales sont de plus en plus mises à contribution.

Il a également souligné que la participation des employeurs à l'effort de construction illustre le désengagement de l'Etat, celle-ci représentant près de 4 milliards d'euros.

A cet égard, il a émis des doutes sur la pertinence de la réforme du « 1 % logement ». En effet, celui-ci devrait théoriquement contribuer au financement de l'ANAH à hauteur de 480 millions d'euros par an en 2009, 2010 et 2011. Or, ce versement accuse déjà un retard en 2009, puisque seulement 200 millions d'euros ont été versés à ce jour.

Il a par ailleurs indiqué que 480 millions d'euros sont budgétés cette année pour produire 110 000 nouveaux logements sociaux, un chiffre bien insuffisant face à l'ampleur des besoins, puisqu'aujourd'hui 60 % des ménages français sont éligibles à l'attribution d'un logement social. Surtout, il a observé que le Gouvernement réduit l'enveloppe budgétaire consacrée au logement social de 550 millions d'euros en 2009 à 480 millions d'euros cette année. Comme le nombre de logements financés en PLUS et PLAI est identique à celui de 2009, ce sont donc les subventions unitaires moyennes qui seront revues à la baisse. Le choix a été donc fait d'une réduction de la subvention unitaire du PLUS de 2 700 euros à 1 000 euros, un choix paradoxal puisque, au moment où l'Etat demande de développer le logement social, il diminue sa participation.

Enfin, il a souligné que, contrairement aux idées reçues, l'effort national en faveur du logement ne concerne que très marginalement le logement social, les avantages fiscaux en faveur de la production de logements sociaux devraient représentant en effet 1,53 milliard d'euros en 2010 sur un total de 34,9 milliards d'euros. Les deux plus significatifs sont ainsi le taux réduit de TVA pour certaines opérations portant sur les logements sociaux (750 millions d'euros) et l'exonération d'impôt sur les sociétés pour les organismes HLM et les offices publics d'aménagement et de construction (700 millions d'euros). A titre de comparaison, à eux seuls les dispositifs d'aide à l'investissement locatif (Robien, Borloo, Scellier) représentent une dépense de 665 millions d'euros en 2010.

Enfin, il a tenu à insister sur le sujet de la promotion de l'habitat durable qui intéresse particulièrement la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, et pour lequel celle-ci a été très active lors des discussions relatives au Grenelle de l'environnement.

a fait part de sa conviction selon laquelle le secteur du logement peut apporter une contribution majeure à la lutte contre le changement climatique, celui-ci représentant en effet 40 % de la consommation d'énergie finale dans notre pays.

C'est pourquoi il a estimé que la conversion de notre habitat à un haut niveau de performance énergétique est un impératif pour notre parc immobilier. Ainsi, la consommation énergétique moyenne des 32 millions de logements en France atteint 240 kWh/m2/an et doit être abaissé de 38 % d'ici à 2020 pour répondre aux objectifs du Grenelle de l'environnement. Or, de nombreux logements demeurent « énergivores », à l'image des maisons individuelles construites avant 1975 qui n'ont pas été rénovées et qui consomment en moyenne 460 kWh/m2/an. L'ANAH évalue le nombre de « passoires thermiques » dans notre pays à 7 millions. Toutefois, les propriétaires concernés sont souvent modestes alors que la rénovation de ce parc est très coûteuse. Cette contradiction indique donc l'ampleur de l'effort qui reste à fournir et, dans cette perspective, M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis, a souscrit à l'objectif de « verdissement » de la législation fiscale dans le domaine du logement.

En définitive, il a expliqué que la crise que nous traversons doit être l'occasion de refonder la politique du logement pour l'adapter aux besoins des personnes et l'orienter résolument vers l'édification d'un habitat durable. Répondre à cette exigence constitue en réalité, selon lui, un double dividende pour la société. Elle permettra, d'une part, d'assurer la pérennité d'un parc respectueux de l'environnement, et, d'autre part, de réduire la facture de nos concitoyens, consacrée à un poste de dépenses devenu aujourd'hui incontournable.

Sous le bénéfice de ces observations, M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis, a appelé à voter contre le budget consacré à la politique du logement.

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