La crise nuit au développement de la recherche. En France, l'investissement global en recherche et développement (R&D) avoisine les 2 % du PIB : nous sommes loin des 2,8 % des Etats-Unis et de l'objectif de 3 % fixé par la stratégie de Lisbonne. En cause, un positionnement sectoriel inadapté, avec trop peu d'entreprises à fort potentiel technologique, mais aussi une trop faible intensité en R&D des entreprises de taille intermédiaire. A l'échelle européenne, les dépenses en R&D des grandes entreprises ont chuté de 2,6 % en 2009. Cela a incité la commissaire européenne à la recherche, à l'innovation et à la science à présenter, le 6 octobre, une nouvelle stratégie européenne intitulée « l'Union de l'innovation ». Ses orientations devraient être débattues lors du Conseil européen de décembre.
Ces chiffres sont inquiétants quand on les compare avec ceux de la Chine qui, avec 35 millions de scientifiques et techniciens, dont 1,36 million de chercheurs à temps plein, occupe les toutes premières places au monde.
Les crédits de la MIRES augmentent de 468 millions d'euros, pour s'établir à 25,2 milliards. Avec le crédit d'impôt recherche (CIR) - 4,95 milliards d'euros -, les 500 millions d'euros de crédits partenariat public-privé ainsi que les 3,6 milliards consacrés cette année aux investissements d'avenir, ce ne sont pas moins de 32,2 milliards qui seront consacrés au périmètre de la MIRES, en augmentation de presque 16 %.
Les crédits consacrés à la recherche, au sens strict, s'élèvent à 15,23 milliards d'euros, en hausse de 2,79 %. Cependant, les économies demandées aux établissements publics scientifiques et technologiques s'élèveront à 42,3 millions d'euros, auxquels s'ajoute pour ces établissements une mise en réserve de crédits demandée par le Premier ministre.
Il en résulte des contraintes budgétaires assez fortes pour certains grands organismes de recherche. L'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), par exemple, gagne 22,9 millions d'euros, mais son budget baisse en réalité de 10 millions et sa dotation de fonctionnement recule de 12 millions, une fois neutralisés les changements de périmètre, mesures d'économie et mises en réserve. J'ai été étonné de constater que les chercheurs de l'Inserm étaient dispersés dans une multitude de laboratoires d'autres organismes. L'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et IFP-Energies nouvelles connaissent également des budgets très tendus.
Si ce budget de crise comporte donc des « zones grises », il n'en faut pas moins retenir la tendance remarquable à la hausse, comme les trois précédentes années. Elle confirme la volonté du Président de la République de mettre la recherche et l'innovation au centre de notre projet de société. Le chef de l'Etat est en passe de tenir l'engagement d'augmenter de 9 milliards d'euros le budget consacré à l'enseignement supérieur et à la recherche durant son mandat : nous passerions ainsi de 22,9 milliards d'euros en 2007 à 31,9 milliards en 2012.
Les « investissements d'avenir » font l'objet de deux programmes spécifiques, abondés par le collectif budgétaire pour 2010. Ils financent des projets importants : le réacteur de 4ème génération, des démonstrateurs et plateformes technologiques en énergies renouvelables, le développement des réseaux de télécommunication à très haut débit, la recherche pour mettre au point le véhicule du futur, des plateformes mutualisées d'innovation pour les pôles de compétitivité ou encore le complexe du plateau de Saclay.
Or, dans les 35 milliards débloqués, la MIRES entre pour 21,6 milliards : 6,9 milliards sont directement consommables, le solde, 15 milliards d'euros, est « non consomptible », selon le terme désormais consacré, c'est-à-dire que les bénéficiaires n'en recevront que les produits financiers.
Ces crédits devraient permettre de financer de grands projets structurants à raison de 10 milliards pour l'enseignement supérieur et la formation universitaire, 7,9 milliards pour la recherche et 500 millions pour le domaine spatial. La procédure se déroule en trois temps. D'abord la signature de conventions entre le commissariat général à l'investissement (CGI), présidé par M. René Ricol, et chacun des dix opérateurs : cette phase est achevée. Ensuite, des appels à projets : après une évaluation scientifique et économique des projets par un jury composé d'experts de niveau international, c'est le Premier ministre qui décide de les retenir ou non, sur proposition du CGI. Cette phase est en cours de réalisation : la première vague d'appels à projets a commencé en juin dernier et s'achèvera début 2011. Enfin, la dernière phase, celle de la réalisation des projets et du financement, a déjà commencé, avec l'octroi des premiers « prêts verts » et « aides à la réindustrialisation ».
Les effets attendus de ce grand emprunt sont doubles : un effet de levier de 20 à 25 milliards venant du secteur privé, des collectivités territoriales, de l'Europe et d'autres acteurs publics ; des retours sur investissement pour l'État, dont les modalités sont précisées par les conventions.
Pour la quatrième année consécutive, les crédits de la MIRES augmentent, et je vous propose d'émettre un avis favorable à leur adoption.