Intervention de Daniel Raoul

Commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire — Réunion du 16 novembre 2010 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2011 — Mission recherche et enseignement supérieur - examen du rapport pour avis

Photo de Daniel RaoulDaniel Raoul, rapporteur pour avis :

Depuis 2007, le Gouvernement répète que la recherche est une priorité nationale, qu'elle va bénéficier de 9 milliards d'euros de plus sur cinq ans. Nous avons entendu aussi les discours accompagnant la stratégie européenne de Lisbonne. Mais la réalité des chiffres est moins souriante : nous sommes très en retard dans le passage à la société de la connaissance ! Et quand on voit comment le Gouvernement exige des établissements de recherche qu'ils coupent dans leurs budgets de fonctionnement entre 2011 et 2013, on comprend vite que ces discours sur la recherche sont avant tout de la communication politique.

L'effort pour la recherche augmenterait de 412 millions d'euros en 2011 ? Il faut y inclure les 189 millions de dividendes d'Areva, les 145 millions imputables à un jeu d'écritures sur le CIR, ainsi que les crédits du plan cancer, qui sont transférés vers l'Inserm. La progression effective n'est alors plus que de 78 millions, soit une augmentation de 0,9 % à 1 %, ce qui n'est pas si mal comparé aux autres budgets soumis à un effet « rabot ». Et les responsables de laboratoires ne s'y trompent pas : une augmentation de crédits « non consomptibles », cela ne veut pas dire autant de crédits en plus pour la recherche, puisque seuls les intérêts sont mobilisables !

En réformant en 2008 son CIR, la France s'est dotée d'un des systèmes les plus favorables au monde. De nombreux rapports d'étude, y compris ceux de l'Inspection générale des finances (IGF) et de la Cour des comptes, sans oublier le rapport de notre collègue Christian Gaudin et celui de Mission d'évaluation et de contrôle (MEC) de l'Assemblée nationale, ont souligné son rôle majeur dans l'attractivité de notre territoire, la deuxième au monde pour les investissements. Instauré par la gauche en 1983, le dispositif a été élargi depuis et les entreprises peuvent, depuis 2009, se voir restituer immédiatement leur créance. Le coût pour l'État a progressé en conséquence, passant de 457 millions en 2000 à 4,95 milliards cette année. Les PME sont sur-représentées, mais l'industrie demeure sous-représentée : elle ne recueille que 65 % du crédit d'impôt alors que les entreprises industrielles réalisent 88 % de la R&D.

Le CIR a un important effet levier, il représenterait 0,33 point de croissance supplémentaire et 18 000 à 25 000 chercheurs supplémentaires d'ici 2020, ce qui est essentiel face au phénomène du papy boom chez les chercheurs auquel les universités vont devoir faire face. Le CIR renforce l'attractivité de notre territoire : il explique pour partie notre deuxième place au monde pour les investissements étrangers.

Cependant, des améliorations doivent y être apportées. D'abord pour lutter contre les abus. On sait que l'optimisation fiscale conduit des grandes entreprises à ventiler leurs investissements par filiales pour accroître leur crédit d'impôt, sans aucun bénéfice pour la recherche. La commission des finances a prévu un amendement contre ces pratiques, et je vous proposerai de le soutenir. Autre forme d'abus, des sociétés de conseil se font rétribuer excessivement pour aider à monter les dossiers, jusqu'à 40 % de ce que représente le crédit d'impôt. Nos collègues députés ont adopté un amendement pour encadrer ces pratiques. Enfin, le CIR serait plus efficace s'il était davantage pérenne et lisible. Nos auditions ont mis en lumière la forte demande de stabilité du dispositif dans le temps. Il faudrait également faire coïncider notre guide du CIR avec le manuel de Frascati, qui constitue la référence méthodologique internationale pour les pays de l'OCDE.

Nous devons nous assurer encore que le CIR serve bien l'innovation technologique. Or, comparée aux 5 milliards d'euros de crédit d'impôt, l'aide à l'innovation pour les PME innovantes ne représente que 300 millions d'euros. Si l'idée d'un crédit d'impôt innovation paraît devoir être écartée, il faudrait conforter les aides directes à l'innovation, octroyées, notamment, par Oséo. Enfin, il me semblerait utile d'inciter davantage les PME à se regrouper pour mutualiser leur R&D ; j'ai préparé un amendement en ce sens.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion